GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

Une gauche fusionnée Nps-As au sein du Ps pour gagner le congrès du Mans !

C'est venu de loin : en fait, les courants Nps (Nouveau parti socialiste, 17 % des voix au congrès de Dijon) Nouveau monde (16,5 % des voix au congrès de Dijon) et Force militante (4,5 % des voix au congrès de Dijon) étaient déjà très proches politiquement. A lire le texte de leurs motions à l'époque, on pouvait constater qu'une feuille de papier à cigarettes les séparait. Il aurait suffi d'une concertation, d'un travail, en commun un peu volontaire pour parvenir dés ce moment-là à une unification des efforts.

Mais les rythmes militants ne peuvent être trop précipités : Nps venait d'une rupture de la majorité du congrès précédent de Grenoble et surtout du « choc » du 21 avril 2002. C'était une génération nouvelle qui s'interrogeait sur l'orientation, la situation du Parti socialiste après sa défaite. Quelle en était la cause ? Comment y remédier et bâtir un « nouveau parti socialiste » ? Plusieurs sensibilités s'y retrouvèrent : les unes préoccupées essentiellement de questions institutionnelles (VI° République, démocratie, fonctionnement du parti...) les autres de questions sociales (renouer avec le salariat, programme de transformation social) et Nps fut amené à prendre position contre la construction de l'Europe par une constitution libérale.

Dans Nps, il y avait les éléments jeunes de « nouvelle gauche », réseau de Benoit Hamon, des membres de la C6R (convention 6° République) regroupés autour de Arnaud Montebourg, les amis de Vincent Peillon, et une partie de la Gauche socialiste autour de Gérard Filoche.

Nouveau monde, regroupait ce que l'on appelle les anciens « poperenistes » à vocation sociale, les nouveaux emmanuellistes, et une autre partie de l'ex-Gauche socialiste autour de Jean-Luc Mélenchon. Nouveau monde défendait un programme social, remettait en cause, aussi, la V° République, réclamait un parti ré orienté à gauche, avec une base populaire.

Force militante, était une autre rupture de la majorité sous le choc du 21 avril : dans le Nord, confronté, chez lui, à un score de 12 % de voix pour Lionel Jospin et de 30 % des voix pour le front national, le premier secrétaire fédéral et député de Douai, Marc Dolez, militant et responsable socialiste depuis 1972, partait courageusement dans une bataille de redressement fondamental du parti.

Impossible de ne pas voir que tout cela convergeait !

D&S qui fut longtemps le « mensuel de la gauche socialiste » était partagé entre Nps et Nm, (40 % Nps, 60 % Nm) et, dés le début, avait ressenti cette division comme non fondée. De même que la revue avait tenté d'empêcher la scission de la Gauche socialiste en été 2002, elle se battit vigoureusement pour l'unité de Nps, Nm, Fm. D&S en 2002 avait proposé qu'au lieu de se diviser, la « Gs » se dissolve dans une grande gauche allant d'Henri Emmanuellli à Arnaud Montebourg : c'était même la proposition qui avait fait l'objet, à Nantes, fin août 2002, d'un vote unanime de tous ses militants, de tous ses dirigeants (y compris à l'époque, Jean-Luc Melenchon, Julien Dray, Marie-Noêlle Lienemann... ).

Dés le congrès de Dijon, dans les assemblées fédérales de présentation de motion, les orateurs de Nps, Nm, Fm se complétaient au lieu de s'opposer... Ils tenaient un discours proche et même, au fur et à mesure, tout à fait identique. La première grande concrétisation de l'unité fut, en été, 2003, la prise de position commune pour rejeter le projet de constitution libérale européenne de Giscard. Nps, Nm et Fm écrivirent un document de référence commun contre la constitution et pour l'Europe sociale, ce texte fut diffusé largement et donné lieu a des réunions, colloques, interventions publiques et dans le parti, communes.

Pendant la période de luttes et de grèves pour défendre les retraites, les trois courants soutinrent les syndicats qui refusaient la réforme Fillon. Ce fut même sous leur pression que fut rédigée une motion unanime du congrès de Dijon, promettant solennellement, si le parti revenait au pouvoir, d'abroger la loi Fillon. Pendant la période des élections régionales et départementales, les trois courants travaillèrent à ce que le parti obtiennent le maximum de voix sur une orientation, qui, il faut bien le dire, se gauchit à ce moment-là et reçut une récompense électorale. De même lors des européennes de juin 2004 : en dépit du silence fait sur la constitution de Giscard, (ou à cause de ce silence justement) le Ps obtint le score historique de 30 % des voix... François Hollande, alors, se sentait conforté, et le parti, et avec lui la gauche, se redressaient tandis que la politique agressive de Chirac-Raffarin, était de plus en plus massivement rejetée dans la rue comme dans les urnes, partout dans l'opinion.

Unité Nps, Nm, Fm pour le « non » :

Nps, Nm, Fm firent un grand meeting commun à Paris le 10 avril 2004 a la Halle Carpentier, où malgré la date (un samedi de Pâques !) 1500 militants s'enthousiasmèrent d'une unité naissante... La somme de Nps, Nm et de Fm, représentait potentiellement 40 % des voix... Puis tout se joua lorsque François Hollande choisit, fin août 2004, de voter « oui » sans condition à un texte constitutionnel qu'il avait pourtant critiqué et quasi rejeté quelques mois auparavant.

Dans le réferendum interne au Ps d'octobre à décembre, la bataille fut néanmoins difficile : la question pourtant simple, « oui » ou « non » à une constitution ultra libérale de l'Europe, était polluée par des questions internes (quel candidat, quel devenir pour la direction Hollande si le « non » l'emportait, etc...). Le referendum était une bonne manière démocratique de trancher : mais les sous-arguments tacticiens internes en faussèrent l'issue. Laurent Fabius, en prenant position pour le « non » (courageusement) obtint un effet controversé : est-ce que voter « non » était « voter Fabius » ? Des fédérations, et des sections, à cause de cela, ne votèrent pas sur le fond. On obtint un résultat insincère et dont on sait aujourd'hui qu'il heurta et fut démenti par les électeurs socialistes et le reste de la gauche.

Nps, Nm et Fm avaient mené la bataille interne en faveur du « non », dans une complète unité (meetings communs, partage des tâches, du tour de France, argumentaires identiques, etc...) mais ne tirèrent pas les mêmes conclusions du résultat interne du 1er décembre. On résumera en disant que la majorité de la direction de Nps (à l'exception de Gérard Filoche) crut que le vote du parti se reproduirait dans le pays, et qu'il fallait s'y plier, Nouveau monde démarra prudemment. Force militante s'engagea. Et Jean-Luc Mélenchon, Henri Emmanuelli engagèrent une campagne active pour le « non ». L'un disait « pour moi, c'est non », l'autre prônait un « non socialiste » en faisant le tour de France des délocalisations, le « trio » Marc Dolez-Gérard Filoche-Jacques Généreux se constitua et fit le tour des régions de France, tous parlant à des dizaines de milliers de militants socialistes, y compris dans des meetings unitaires de masse... Malgré des styles différents, les efforts s'additionnèrent et c'est sur le terrain que se conquit la victoire... en emportant la conviction de 59 % de l'électorat socialiste.

L'exigence de l'unité, effet différé du 29 mai :

Tout le monde a du le reconnaître : jamais, depuis longtemps, on n'avait senti, en France, dans la gauche, une telle poussée unitaire, dynamique, qu'au cours de ces mois de mars-avril-mai 2005. C'est cela qui permit (contre 90 % de l'establishment médiatique et politique) la fantastique victoire du « non » le 29 mai : c'était un « non » de gauche, social, pro européen, antilibéral... Il y avait, forcément, après cette victoire du « non » des obligations dans toute la gauche et parmi les socialistes : est-ce que, en dépit de leur désaccord tactique, sur la nécessité de mener campagne, les partisans socialistes du « non » allaient s'unir ?

Nps réuni le 12 juin, ne trancha pas et sembla s'orienter vers une « autonomie » entre les « oui » et les « non » qui ne pouvait, si elle persistait, que brouiller les leçons du 29 mai. Les militants du « non » socialiste, réunis le 18 juin lancèrent un « appel » sans préalable à l'unité avec Nps :

« Pour un congrès d'espérance, l'unité des différentes minorités socialistes qui ont mené le combat dès l'origine pour le NON (Nouveau Parti Socialiste, Forces Militantes, Nouveau Monde) est nécessaire et dynamisante. Pas d'exclusive, cette unité doit se construire avec tous, au-delà des diverses contributions, pour une motion commune. Le temps nous est compté et il importe de se rencontrer, d'annoncer l'objectif puis de le bâtir d'ici à la date du dépôt de la motion. Dans ce but une grande rencontre nationale sous forme d'une Université de rentrée les 9, 10 et 11 septembre sera convoquée et organisée collectivement par toutes celles et ceux qui s'engageront dans ce processus unitaire.

Unité est le maître mot : unité de la gauche, unité de tous les socialistes contre les libéraux , pour rénover le parti, le replacer au cœur du peuple de gauche. »

(cf. D&S n°125-126)

A l'appel d'Henri Emmanuelli, (Ex Nouveau monde), de Marc Dolez (ex-Force militante) de Gérard Filoche (ex-Nps) et de Jean-Pierre Masseret (ex-motion A), une première forme d'unité de ceux qui tiraient des leçons positives du 29 mai se constitua. « Alternative socialiste » était l'embryon du regroupement unitaire plus vaste, souhaité.

Nps s'interrogea tout l'été, et, par-delà les péripéties médiatiques, tint son université d'été à Fouras, clarifiant le sens de son « autonomie » en choisissant clairement « une majorité alternative ancrée à gauche ». A Fouras, Gérard Filoche, applaudi, proposa à la tribune, une motion commune de la gauche du parti afin de créer le rapport de force avant d'effectuer les alliances nécessaires pour une majorité alternative...Henri Emmanuelli, invité le jeudi soir, applaudi à son tour, fit la même proposition détaillée, au nom « d'Alternative socialiste » en affirmant qu'il était toujours possible de la mettre en œuvre :

« ....Vous souhaitez mettre en œuvre un contrat pour une majorité nouvelle. Pour notre part, nous pensons qu'une motion commune entre nos deux sensibilités qui ont travaillé ensemble pendant deux ans serait une avancée et une garantie sérieuse pour atteindre cet objectif : si nous devons contracter, pourquoi attendre.

Je sais que ce n'est pas ce que vous avez décidé, et votre choix n'hypothèque rien. Mais réfléchissez-y tout de même, je pose cette proposition sur la table. Il n'est jamais trop tard pour entamer le long mais indispensable chemin de l'unité sans laquelle la pensée, ne trouve pas l'aboutissement de l'action. »

(cf . D&S n°125-126)

Ce sont les plus unitaires qui ont fait les concessions :

Aucun argument politique sérieux ne pouvait contrer cette proposition. Hors du parti, toux ceux qui avaient mis leur volonté, leur engagement dans la victoire du non, c'est à dire la majorité de la gauche, ne pouvaient comprendre qu'à l'intérieur du parti l'unité de ceux qui voulaient l'ancrer à gauche ne se fasse pas. Puisqu'il n'y avait pas de raison politique, il n'y avait plus que des questions de personnes : restaient à lever ces craintes-là.

Réunie à Périgueux (à Boulazac) les 9-10-11 septembre, avec Henri Emmanuelli, Marc Dolez, Gérard Filoche, Jean-Pierre Masseret, prés d'un millier de militants d'Alternative socialiste renouvelèrent leur appel à l'unité tout en se préparant au combat, au cas où... Pour lever les obstacles, il fut proposé que les premiers signataires, mandataires nationaux de la motion seraient Nps, et qu'on trouverait des arrangements sur le nom du courant. Ce sont les plus unitaires qui ont fait les concessions. Cela suffit : une fois levées les questions de personnes, ne restait plus qu'un combat politique commun depuis trois ans pour tirer aussi bien les enseignements du 21 avril que du 29 mai.

La presse a, bien sûr, favorisé des commentaires individuels qui donnent l'impression de nier cette union, elle a parlé de ralliement, d'absorption, etc... C'est toujours comme cela dans une fusion, chacun donne naturellement sa version. Ce n'est pas surprenant, mais c'est sans importance, car seul le résultat compte, et c'est la dynamique qui en résulte, qui peut modifier la donne du congrès du Mans.

« Alternative socialiste » avait rédigé sa motion, courte, dense, en 20 pages, (disponible sur le site de D&S). Le projet de Nps, plus long, y fut confronté, et un travail de rapprochement des deux documents effectué avant le dépôt final du mardi 20 septembre. Il reste, bien sûr, à mêler les styles, organiser le travail collectif, fraternel, à faire le tour de France des sections et fédérations, avant le vote militant le 9 novembre.

Les lecteurs fidèles de D&S savent combien d'efforts nous avons dépensé pour arriver à ce résultat depuis trois ans. C'est un grand pas de franchi. Les jeunes ont l'occasion, là, de construire une gauche plus solide, plus large que l'était l'ex-Gauche socialiste : il y faut un refus du sectarisme, une grande pratique démocratique, une grande opiniâtreté, et une ténacité sur le programme politique de transformation sociale dont nous souhaitons que le parti tout entier se dote. Une dynamique est en marche, nous allons y mettre toute notre ardeur. Car il y a là l'occasion d'avoir une forte gauche, unie, rassemblant jeunesse et expérience, histoire et nouveauté : c'est un évènement historique dans le Parti socialiste !

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