GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Tabac et inspection du travail

Le décret du 16 novembre 2006 confie aux inspecteurs et contrôleurs du travail la compétence pour réprimer les infractions en punissant d'une contravention de 3° classe (68 eur) les personnes qui, dans l'entreprise, ne respecteraient pas l'interdiction de fumer.

Certes le tabac est dangereux pour la santé et donc pour les salariés fumeurs sur leur lieu de travail et aussi pour ceux qui le subissant passivement.

Mais c'est une première en droit du travail que de confier aux agents de l'inspection du travail de contrôler les comportements des salariés, en matière de santé publique, l'employeur n'étant plus responsable au premier chef de ses obligations sur ce terrain.

Normalement, cela relève de l'obligation de sécurité du chef d'entreprise de lutter contre tous les risques professionnels, le salarié, subordonné étant seulement responsable au titre de ses obligations nées du contrat de travail et de ses règles collectives.

C'est une petite révolution de l'ordre public social, où, de facto, le comportement défaillant de l'individu salarié vient contrebalancer, atténuer, voire se substituer à la responsabilité, l'obligation de sécurité de l'employeur.

Selon la circulaire du ministère : « un salarié fumeur génère des frais supplémentaires de l'ordre de 2500 à 4000 euros par an, dus notamment à une dégradation plus rapide du matériel, une augmentation des accidents du travail. Par ailleurs un salarié fumeur est moins souvent en arrêt maladie qu'un fumeur (différentiel de 23 %) ».

Cette même circulaire indique que le fumeur est plus apte a développer un cancer professionnel. De là à ce que la reconnaissance de l'origine professionnelle de certains cancers soit davantage contestée il n'y a qu'un pas : ce fut déjà le cas, rappelons-le pour des cancers liés à l'amiante, les lobbies de l'époque n'hésitant pas à les attribuer à la consommation tabagique.

Cela peut placer les agents de l'inspection dans la position de sanctionner le salarié défaillant faute de quoi certains pourraient avoir la bonne idée de rendre l'inspection et l'agent individuellement du risque auquel il est exposé du fait de son inaction...

Qu'en est il de la convention n°81 de l'Oit qui laisse l'inspection du travail maîtresse des suites qu'elle entend en opportunité donner a ses constats ?

La mission de l'inspection n'est pas de sanctionner des conduites addictives en surveillant et punissant les salariés, mais de traiter des conditions de travail qui, se dégradant, poussent de plus en plus de salariés à prendre des « substituts » pour « tenir » et garder leur emploi...

Il n'y a pas égalité dans l'entreprise entre les responsabilités de l'employeur et celles du salarié... on ne va pas substituer l'ordre public social, les obligations des employeurs en matière de santé, de sécurité, par une police individuelle des comportements des salariés...

La production, pour la première fois, par le ministère, d'un « carnet à souche » en vue de la verbalisation rapide des salariés (ce qui n'avait jamais été fait pour aucune autre infraction patronale, souvent plus grave...) choque les agents de l'inspection qui voient insensiblement leur mission se transformer. Cela n'a jamais été fait pour l'alcool, l'employeur devant assurer discipline et sécurité. Cela n'a jamais été fait pour les obligations d'affichage, en matière de sécurité, de non port de chaussure de sécurité, de casque, d'équipements de protection individuelles, de droit syndical, ou du personnel d'obligation d'égalité hommes femmes, etc...

La Cgt-Sete, a publié un communiqué sur cette question, ici largement résumé, et appelle les confédérations syndicales à réagir.

A suivre

Gérard Filoche, 1er février.

Attention : du 5 au 2 mars à Périgueux, procès du premier meurtre en 114 ans d'histoire de deux agents de l'inspection du travail...

Claude Duviau, le meurtrier des deux inspecteurs du travail Sylvie Trémouille et Daniel Buffière, abattus le 2 septembre 2004 à Saussignac en Dordogne sera jugé.

Tous les syndicats de l'inspection du travail semblent s'orienter, enfin, vers un appel à une présence massive, nationale, à partir du lundi 5 mars à Périgueux.

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