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«Salariés, si vous saviez...» Dix idées reçues sur le travail en France

« Le droit du licenciement doit être assoupli », « les 35 heures n’ont pas profité aux salariés »,

« les charges sociales sont trop lourdes », « les fonctionnaires sont des privilégiés », « à terme, on ne

pourra plus financer les retraites », etc. Telles sont quelques-unes des idées reçues qui dominent

le débat public sur le travail en France.

En dix réponses critiques, chiffres à l’appui, Gérard Filoche bat ici en brèche ces préjugés distillés

par la vulgate néolibérale pour tenter de liquider un siècle de conquêtes sociales et justifier une vaste

offensive contre les droits de la majorité écrasante – plus de 90 % – de la population active :

les salariés.

Le salariat représente une puissance sociale dont il n’a pas conscience, face à une organisation

patronale qui s’efforce par tous les moyens de le diviser pour faire régner l’ordre du marché.

Pourtant – les exemples récents des grèves de 1995 et de la mobilisation contre le contrat première

embauche en 2006 l’ont bien montré –, c’est en s’unifiant autour de la défense du Code du travail,

des salaires, des horaires et des statuts que l’on pourra agir sur les conditions de l’emploi et

la redistribution des richesses.


Gérard Filoche, inspecteur du travail depuis 1985, est militant syndical et politique, socialiste. Il a notamment

publié Pour en finir avec le chômage de masse (La Découverte), Carnets d’un inspecteur du travail (Ramsay),

La vie, la santé, l’amour sont précaires. Pourquoi le travail ne le serait-il pas ? (Jean-Claude Gawsevitch).

Il est rédacteur en chef de la revue Démocratie et Socialisme.

Collection : Sur le vif – 128 pages – 10 €


Dans Viva magazine :

Balayez vos idées reçues sur le travail

par Anne Marie Boulet le 28 février 2008 (16:58) dans la catégorie Culture

«Salariés, si vous saviez…» par Gérard Filoche

Editions La Découverte, Collection «Sur le vif» 134 pages. Prix: 10 euros.

En ces temps de «Travaillez plus pour gagner plus», de renégociation du contrat de travail et de la notion de pénibilité du travail, de remise en cause de la durée légale du temps de travail de 35 heures, pour être capables de tête froide garder face aux sirènes de l’ultralibéralisme, ce petit ouvrage est une vraie bouée de sauvetage, un bol d’air frais dans une ambiance générale plutôt fétide.

C’est qu’à mener tambours battants refonte sur refonte dans le domaine social, à vouloir tout «moderniser» et «lifter» comme s’il s’agissait simplement de rendre plus présentable une vieille courtisane, on se laisserait presque aller à douter de quelques fondamentaux. Ce sont ces fondamentaux que Gérard Filoche, inspecteur du travail, militant syndical et socialiste, s’évertue en termes et exemples très concrets à faire rejaillir pour (re)donner au débat actuel sur le travail et le salariat une profondeur que nos gouvernants s’échinent à vouloir camoufler.

Le salariat, plus vivace que jamais

Avec 22,2 millions de personnes sur quelque 25 millions en population active occupée (chiffres 2005), le salariat en France ne cesse d’augmenter. Et ce, malgré toutes les attaques qu’il connaît ces dernières années. Preuve que les droits des travailleurs progressent malgré tout. Une tendance qui se confirme également au niveau planétaire.

La fin du salariat -en fait souhaitée par le patronat- n’est donc pas pour demain. Mais, force unique s’il était uni, ce salariat n’a pas conscience de ce qu’il représente. Sa vraie dualité aujourd’hui, ne repose pas dans une pseudo opposition entre salariat du privé et du public mais entre emplois stables et emplois précaires.

Un salarié profite toujours d’une baisse de la durée légale du travail

«Qu’il en soit conscient ou non, (…) cela tire la durée réelle de son travail vers le bas». Gérard Filoche milite pour une durée hebdomadaire de travail à 35 heures, c’est clair. Revenant sur l’histoire récente de la France, il rappelle: «La France est le pays d’avant-garde qui a démontré à trois reprises, en 1936, 1982 et 2000-2002, que l’on pouvait baisser la durée légale du travail à 40, 39 puis 35 heures tout en augmentant à la fois la productivité et les salaires.» Une durée légale fixe le seuil de référence salariale: «Un temps partiel, aujourd’hui commence à 34 heures et une heure supplémentaire à 36 heures de travail hebdomadaire. Et fait entrevoir, a contrario, les méfaits d’une durée de travail sans seuil légal généralisé, «à la carte».

Rappelant le vieil adage «le temps c’est de l’argent», il nous remet en mémoire que «plus les employeurs peuvent allonger le temps de travail sans le payer correctement, plus la plus-value qu’ils en retirent est importante.» Les patrons ne font jamais de cadeau.

Sur l’inventaire de l’application des 35 heures, si l’auteur reconnaît bien les limites d’application dès la conception du projet, il ne pose en revanche pas trop la question « jusqu’où diminuer l’horaire hebdomadaire tout en continuant d’accroître la productivité ? » Le supportable n’est pas nécessairement lié qu’au temps de travail mais ce dernier peut y contribuer. Les nombreux cas de souffrance au travail (Tms entre autres), voire de suicide au travail (un par jour en France) rappellent les dégâts d’une productivité trop poussée, niant les relations humaines.

Pour Gérard Filoche, « le salariat n’a pas souffert de trop de 35 heures mais de pas assez » Il préconise de rapprocher le plus possible la durée effective de travail de la durée légale de travail. L’inspecteur du travail note: «La durée maximale de travail est restée fixée à 48 heures hebdomadaires: c’est elle qu’il faut baisser proportionnellement, de 48 à 44 heures, de façon à limiter le nombre d’heures supplémentaires.»

Des reculs fondamentaux sont aussi soulignés par l’auteur. Notamment, dans le nouveau Code du travail. Et, en particulier, en ce qui concerne l’hygiène et la sécurité. Dans le chapitre «Principes généraux de la prévention» apparaissent deux sous-chapitres, l’un sur les obligations de l’employeur, l’autre sur celles du salarié. Ce dernier article, entièrement nouveau, renverse complètement la logique qui, depuis la fin du XIXe siècle, avait posé le principe de la responsabilité de l’employeur et son obligation de garantir l’intégrité physique -et mentale- du salarié. Pour aller plus loin, que peut-il advenir alors, dans les années à venir, de la faute inexcusable de l’employeur? Elle risque, dans pas mal de cas, d’être très complexe à faire prononcer.

Beaucoup d’autres questions sur le travail sont abordées: liberté de licencier, sécurité professionnelle, financement des retraites, droit du travail prétendument trop contraignant. Autant de questions sur lesquelles il est bon de pouvoir se forger ses opinions en évitant de sombrer dans les pièges plus ou moins gros que l’on nous tend. Un livre salutaire non seulement aux militants syndicaux mais à tout salarié désireux de ne pas avaler trop de couleuvres.

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