RGPP : une réforme à combattre
La «nouvelle» réforme de l’État, lancée et pilotée par le Président de la République, s’appuie essentiellement sur la RGPP (révision générale des politiques publiques).
Cette réforme s’inspire des exemples étrangers de réforme de l’État (ex. : Canada, Nouvelle Zélande, Suède, royaume Uni, USA, Allemagne, Italie, Islande, Australie, Danemark, Pays Bas,…), de l’administration et de la gestion publique.La RGPP :
considérations générales
Les raisons avancées pour ce type de réformes :
La problématique générale :
Les principaux axes :
Des évolutions des structures administratives :
Une séparation du «politique» et de «l’administratif». Dans le système néolibéral, les citoyens doivent avoir la liberté de choisir le prestataire du service (public, privé, associatif) pour répondre à leurs besoins dans le cadre du marché.
L’objectif recherché est d’avoir :
La RGPP en France
La RGPP en France a été lancée par le Conseil des ministres du 20 juin 2007.
Toutes les politiques publiques sont visées par cette réforme.
La méthode utilisée est celle des audits avec une grille d’analyse en 7 questions.
Ces audits concernent les 14 domaines d’intervention de l’État, 6 grandes politiques d’intervention (emploi et formation professionnelle, développement des entreprises, ville et logement, famille, assurance maladie, politique de solidarité et de lutte contre la pauvreté).
Tout cela est complété par 4 chantiers interministériels (la GRH, l’organisation de l’administration territoriale, les relations entre l’État et les collectivités locales, la simplification des procédures internes).
Le pilotage est assuré par un Conseil de la modernisation des politiques publiques, présidé par Sarkozy, en personne et le suivi par un Comité de suivi de la RGPP, présidé par le Secrétaire général de la présidence de la République et le directeur de Cabinet du Premier ministre.
Le Président de la République rendra ses conclusions en mai 2008 et la réforme s’appliquera sur 2009-2011.
Dans son discours du 19 septembre 2007, à Nantes, Sarkozy a présenté son « pacte service public 2012 » (réforme de la GRH):
Dans ce discours, le Président de la République a oublié quelques sujets : la revalorisation du point d’indice, base du traitement des fonctionnaires, la revalorisation des grilles indiciaires servant à définir le salaire, le rattrapage du pouvoir d’achat,…
Les premières mesures annoncées le 12 décembre 2007
Le Président de la République a annoncé une première série de 96 mesures :
RGPP: des éléments d’analyse
La RGPP version Sarkozy relève d’une stratégie bien réfléchie, d’un choix politique.
Dans notre analyse, il convient de prendre en compte :
La RGPP ne marque pas la fin ou le retrait de l’État mais un autre rôle de celui-ci, renforçant ses prérogatives sur la base du «sécuritaire» et au service du marché. Cette réforme s’articule sur la nette distinction du « politique » et de « l’administratif ». Le politique est reconcentré avec un omni-président et sa garde rapprochée, 15 ministères, quelques grandes directions d’administration au niveau central et un renforcement de l’échelon régional au niveau local.
« L’administratif », au sens de la mise en œuvre des politiques publiques, doit être réalisé par le mieux placé sur le marché (agences, entreprises privées, associations). Ainsi l’échelon départemental se réduit fortement avec un regroupement en 5 ou 6 directions qui pourraient être directement rattachées à la préfecture.
Sur le statut de la fonction publique, l’objectif est similaire à celui sur le code du travail avec notamment réduction du périmètre d’application du statut de la fonction publique de l’État, nouvelle GRH, avec une lourde réforme ayant pour axes majeurs la gestion personnalisée (mobilité, parcours professionnel, mérite, flexibilité,…) et la performance.
Sarkozy entend gérer la France comme une entreprise avec lui pour « grand » patron, des ministres aux ordres (le système d’évaluation de leur action n’est pas anecdotique) et des services « publics » (?) au service de sa politique. Il recentre l’État sur son « cœur de métier » et externalise le reste, avec une organisation de type privée « flux tendu ».
Plus fondamentalement, la réforme de l’État initiée par Sarkozy est un éléments important de sa « politique de civilisation». Au-delà de la prétention verbale, il s’agit d’inscrire notre pays dans la logique néoliberale de guerre économique mondiale. Son projet de société vise à la transformation du « modèle » social et économique français, pour le plus grand profit des patrons et des plus riches, sous couvert de plus de liberté pour chaque individu.
Cette compétition généralisée où chaque collègue de travail, chaque voisin est un «ennemi» lamine la cohésion sociale, les garanties collectives (statut, code du travail, sécurité sociale, régime de retraite, règles sur le temps de travail), sous l’argument de plus de liberté, pour laisser la place à des contrats individuels, de gré à gré, avec une rémunération basée sur la performance.
Cependant, les néolibéraux ont besoin d’un État puissant pour imposer un ordre conforme à leurs intérêts. Dans cette concurrence, y compris entre État, il faut abaisser le coût du travail, réduire les cotisations sociales, les impôts pour résister à la concurrence (Sarkozy, VRP à l’étranger pour les grandes entreprises), pour attirer les capitaux et les emplois qualifiés (cf. « l’immigration choisie ») et reporter les dépenses pour des biens publics sur les salariés.
Les dépenses publiques restantes sont réorienter vers le sécuritaire (ordre intérieur et extérieur, protection des biens et de la propriété, du marché,…), l’essentiel de la production des biens publics relève alors du marché. Nous franchissons un seuil dans la privatisation de l’État.
Dans cette logique de concurrence, nous arrivons très rapidement à une déstructuration de la société, des individus et à une pseudo démocratie.
La RGPP : une réforme
qu’il faut combattre
Si cette analyse est partagée, nous ne pouvons pas composer sur une telle réforme.
Nous ne pouvons que la combattre.
Nous avons des atouts dont le sentiment «antilibéralisme» majoritaire des citoyens (cf. enquête Ipsos réalisée auprès de 22 000 citoyens engagés dans 22 pays). Les citoyens sont très attachés au service public en France. Ils commencent à mesurer concrètement les effets du «sarkozisme».
Cependant, nous avons aussi, de toute évidence, des retards à combler en terme de projet politique partagé sur le rôle et la place de l’État, des collectivités territoriales et donc sur les services publics, sur la démocratie,… pour une transformation sociale de la société.
Nous devons mener cette bataille d’opposition à la RGPP, en nous appuyant sur les grands principes du service public, d’un État au service de tous, porteur des valeurs d’une société de progrès humain permettant l’épanouissement individuel dans le cadre de relations sociales «saines», de cohésion sociale, de développement véritablement durable, équilibré et cohérent des territoires… ; en partant du vécu de tous les citoyens et dans une démarche démocratique.
Le Parti socialiste doit prendre très clairement position contre cette réforme de l’État et ouvrir de vraies perspectives alternatives.
Didier Lassauzay