GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Actions & Campagnes politiques

Résistance en Creuse désertifiée : le 5 mars à Guéret, debout !

Interview de Philippe Breuil, conseiller général socialiste du canton de La Courtine.

Il est un des 263 élu-e-s qui avaient remis leur démission au préfet le 23 octobre 2004 pour protester contre la fermeture de services publics en Creuse, lors de l'assemblée générale départementale de l'association des maires de France. La presse nationale avait fortement médiatisé cet événement et couvert la manifestation du 13 novembre 2004.

Reconnu comme le principal "porte-parole " des élu-e-s démissionnaires, Philippe Breuil a depuis été réélu, seul candidat d'une cantonale partielle où la droite locale emmenée par le député Ump (franchement réactionnaire) Jean Auclair n'a pas réussi à trouver un candidat à lui opposer.

D&S :Quel bilan tires-tu du mouvement de démission des élu-e-s ?

Philippe Breuil : Je suis partagé, on a obtenu un gel de la fermeture des trésoreries menacées et donc la mobilisation paye. Cela dit en réfléchissant sur la façon dont nous avons mené le mouvement, je mesure que nous n'avons pas totalement réussi à le propager à tous lés élu-e-s du département au-delà des cinq cantons mobilisés. Notre spontanéité a été une force mais l'expérience que j'en retire, alimentée par les exemples des mouvements du Larzac ou plus récemment pour sauver l'Hôpital de St-Affrique dans l'Aveyron, est qu'il faut un réseau et des appuis à l'image du " collectif creusois de défense et de développement des services publics " qui regroupe 21 organisations politiques, syndicales et associatives. On a quand même redonné un peu d'oxygène aux luttes locales et j'espère nationales grâce à la médiatisation. On a aussi vaincu une forme de fatalisme local.

D&S : Tu as été réélu...

Ph.B : Pour moi en démissionnant j'ai voulu représenter la population. Pour un élu j'estime que c'est un acte fort. Je me suis logiquement représenté pour demander que les citoyens et citoyennes légitiment notre colère et notre réaction face au gouvernement et aux pouvoirs publics qui nous méprisent en tant qu'élus locaux. Il y a deux choses à noter qui me font plaisir. La première c'est que la droite, n'a pas trouvé de candidat dans le canton qui veuille aller contre ce mouvement ni juger jouable de nous en parachuter un. Le deuxième qui est encore plus important c'est que 54 % des inscrits sont venus voter. En effet le piège aurait été l'abstention massive qui caractérise ce genre de partielle. Le même jour, l'élection à plusieurs candidats qui visait à remplacer Philippe de Villiers au Conseil général de Vendée n'a enregistré qu'une participation de 37 % de la liste électorale. Notre mouvement s'est ainsi révélé en phase avec la population.

D&S : Comment juges-tu l'attitude de l'Etat et de ses représentants ?

Philippe Breuil : Nous les élu-e-s de ces cinq cantons, avions eu la visite du préfet, sans qu'il soit question de fermetures et nous les avons appris par la presse 48h après, nous n'avons pas supporté. Pour Edf, les bureaux de poste, rebelote. Mépris et désinformation sont les caractéristiques de la " sourdingue attitude " du gouvernement. Les mêmes causes vont produire les mêmes effets. Ici nous ne voulons pas des " maisons " de services publics. On veut de vrais services publics et les moyens nécessaires. A titre d'illustration, dans mon canton de La Courtine, France Télécom n'a pas encore totalement relevé les lignes téléphoniques endommagées par la tempête de 1999 quand Edf avait tout remis d'aplomb en quelques semaines.

D&S : comment qualifier la relation entre le collectif creusois de défense des services publics et l'action des élu-e-s ?

Ph. B : Une belle complémentaire, le collectif assure depuis trois ans le travail de fond, notre mouvement de protestation lui a donné une grande bouffée d'oxygène. Il est reparti de plus belle en organisant la manifestation du 13 novembre qui nous a assuré le soutien populaire et en appelant à cette rencontre nationale des collectifs de défense et de développement des services publics suivie d'une manifestation nationale le samedi 05 mars à Guéret. Nous sommes en pleine démocratie participative.

D&S : Qu'attends-tu du 05 mars ?

Ph. Breuil : Une grosse mobilisation nationale. Ce serait une belle pierre à l'édifice des développements ruraux et urbains. Pour les services publics : ville et campagne même combat.

D&S : Quelle exigence as-tu vis à vis du projet des socialistes ?

Ph. Breuil : La gauche et la droite ont des valeurs différentes. Il nous faudra nous différencier clairement de l'action de la droite au pouvoir sur les services publics, l'égalité des territoires. Aujourd'hui les valeurs marchandes l'emportent sur l'humain. J'attends de la gauche au pouvoir qu'elle revienne sur ces mesures que nous combattons. Les services publics ont prouvé leur efficacité. Il ne faut seulement les défendre mais aussi les promouvoir et les développer. Pour cela il nous faudra une volonté politique forte.

Interview réalisée par David Gipoulou (correspondant D&S en Creuse)


Appel à la

manifestation

du 5 mars

" En Creuse comme ailleurs défendons les services publics " Vers la " nationalisation " du mouvement creusois - manifestation nationale de défense et de développement des services publics à Guéret le 05 mars 2005.

Loin d'entretenir une mentalité de village gaulois isolé, ou de nombril du monde, les membres du " collectif de défense et de développement des services publics creusois " ont complètement conscience que leur lutte et leurs objectifs sont à l'unisson de dizaines de collectifs du même type, souvent locaux, en France. Pourtant c'est en Creuse que les médias ont récemment porté leur attention et ouvert une fenêtre médiatique pour souligner la démission spectaculaire de 263 élu-e-s creusois, dans cinq cantons le 23 octobre dernier. La présence au sein du collectif de 21 organisations politiques, syndicales et associatives (Attac 23, Association de Défense et de Développement des Services Publics de Saint-Vaury, de Combraille, Comité pour le maintien de la Gare de Saint-Sébastien, Fcpe, Fgr, Ldh Limousin, Unrpa, Cfdt, Cgt, Confédération Paysanne, Modef, Fsu, G10 Solidaires, Unsa-Education, Lcr, les Verts, Prs, Pcf, Ps, Mjs Limousin.) n'y est sans doute pas étrangère. Cette médiatisation qu'ici tout le monde savait éphémère a fait germer l'idée d'ajouter une pierre à l'édifice de la prise de conscience générale du besoin de la gestion publique ou collective du bien commun.

Le phénomène n'est pas neuf en Creuse, car voilà prés de trois ans que sont nés à l'initiative du conseil général des " états généraux des services publics ". Une coordination a vivoté un temps, avant qu'Attac 23 ne relance le processus il y a un an et demi, en associant les dimensions syndicales et politiques à diverses associations d'usagers défendant qui leur école, leur bureau de poste, autres ou tout cela à la fois. Une première manifestation le 04 février 2004 avait réuni 700 à 800 personnes à Guéret à la surprise de beaucoup de pronostiqueurs (la plupart des manifs ici enregistrant des participations de 150 à 500 personnes.) Poursuivant son travail de fond dans un contexte de morosité sociale, le collectif s'est trouvé dopé par la Fronde des élus (cf. interview).

Pour Bernard Defaix (président d'Attac 23) le porte-parole du collectif, " en même temps que le collectif retrouvait de la vigueur, il nous est apparu la complémentarité des deux actions. Les élus ont apporté l'oxygène et nous les braises. La force de cette alliance, qui peut s'exprimer différemment ailleurs (en Charente les élus adhèrent au collectif départemental), nous a permis d'ouvrir la perspective d'une rencontre nationale des collectifs à Guéret. Nous savons modestement que nous ne pourrions en faire plus avec efficacité sur un plan national. Nous faisons le pari de mettre l'énergie et la fenêtre médiatique qui en a découlé au service de la création d'autres collectifs et d'une coordination nationale de ceux-ci. Il nous est d'une certaine manière indispensable de " nationaliser le mouvement " pour une pleine prise de conscience par les citoyens et citoyennes. Conserver l'alliage à trois dimensions que nous connaissons (politique, associatif et syndical) nous semble indispensable à sa pérennité".

Bernard Defaix apprécie les prises de position de Gérard Filoche, qu'il avait rencontré l'année dernière à Guéret sur la réforme du code du travail. Connaissant D&S et son objectif d'ancrer le PS à Gauche, il a tenu à ajouter qu'il " attendait du Parti Socialiste (dont il n'est pas membre) qu'il prenne en compte la poussée anti libérale qui grandit dans ce pays. Avoir un projet à gauche serait notamment défendre l'idée que la société doit comporter un secteur public économiquement puissant pour contribuer au partage des richesses et socialement déterminant pour tirer les droits des salarié-e-s vers le haut ".

David GIPOULOU


Le 5 mars dans le détail :

  • De 10 h 30 à 14 h :
  • Rencontre et échanges entre les collectifs : propositions, objectifs, convergences

  • 14 h 30 :
  • MANIFESTATION NATIONALE

  • 17 h 30 :
  • Table ronde et forum avec la participation de responsables politiques, syndicaux et associatifs sur le thème "Le bien public, la justice sociale et la démocratie : champ d'intervention, rôle et missions des services publics ".

    Contactez le collectif : mailto:collectif.creuse@wanadoo.fr

    Consultez le site internet : http://www.gueret-5mars2005.net/

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