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Recentrer les banques sur le financement de l'économie

Depuis la libéralisation des marchés de capitaux, l'activité traditionnelle des banques a été profondément modifiée. Le nouveau modèle construit depuis le début des années 90 en a fait des acteurs directs des marchés financiers.

La crise financière qui s'est installée depuis 2007 a largement mis à jour cette réalité. Pour mettre au pas la finance, cet ennemi qu'a pointé François Hollande dès le lancement de sa campagne, il faut réorienter l'activité bancaire.

Réorienter l'épargne

Alors que les ressources des banques étaient constituées pour l'essentiel des comptes à vue et de l'épargne réglementée, elle a été peu à peu dirigée vers les marchés financiers. L'assurance-vie en est un des exemples les plus emblématiques. Elle pèse 1360 milliards alors que les encours du livret A sont 6 fois mois importants à un peu plus de 220 milliards.

Mobiliser l'épargne pour la relance et pour le financement de l'économie, exige de rapidement doubler les plafonds du Livret A comme du LDD transformé en livret-épargne industrie. Cela permettrait d'engager un mouvement de bascule de près de 20% des encours de l'assurance-vie vers l'épargne liquide réglementée. Ce serait un vrai signe de réorientation de l'épargne.

Les banques s'y opposent sous des prétextes divers après avoir exigé la banalisation du livret A et obtenu que 35% des dépôts restent dans leurs caisses. Ils ne sont pas à une contradiction près.

Avec le doublement du plafond du livret A, il faut augmenter le taux de centralisation à la Caisse des Dépôts et baisser la commission versée aux banques. Il y aura davantage de fonds pour le logement social et étudiant avec des prêts à la construction moins coûteux. Il y aura davantage de fonds pour les PME et les dépôts bancaires ne seront pas moindres en épargne liquide.

Distribuer plus et mieux le crédit

Il faut des ressources énormes pour financer la relance, satisfaire les besoins sociaux, engager la ré-industrialisation et la transition écologique. Il s'agit d'investissements de long terme. C'est l'inverse du court-termisme demandé par les actionnaires. Ces investissements doivent reposer tout autant sur les ressources constitués par l'épargne disponible mais aussi par de la création monétaire.

La distribution du crédit engendre de la création monétaire. Et la monnaie est un bien public. C'est ce qui fonde la nécessité d'une réglementation publique de l'activité bancaire. Comme l'a annoncé François Hollande il faut une nouvelle loi bancaire. Celle-ci doit permettre de développer une politique sélective des taux, avec des taux bonifiés lorsque les investissements créent de l'activité, de l'emploi, de la recherche et du développement. C'est un des enjeux pour le développement des PME. Tout autant que la politique fiscale qui doit être adaptée aux TPE, PME ou grandes entreprises, il faut suivre la même cohérence pour une politique de taux des crédits. Rien ne serait pire, en pleine crise, que de maintenir des taux forts pour les PME aux activités plus risquées que les entreprises de taille internationale réputées plus rentables.

Une loi bancaire qui protège l'activité bancaire contre les activités spéculatives

La séparation des banques entre les activités de détail et de financement de l'économie réelle et les activités spéculatives (dérivés, marchés de gré à gré, titrisations ...) est nécessaire. Si les banques sont trop grosses pour faire faillite, elles sont aussi trop grosses pour être sauvées. Faire peser sur le résultat de banques de détail des milliards de produits toxiques acquis sur les marchés et devenus invendables est inadmissible. La loi bancaire doit clarifier cette question. Il ne s'agit pas de choisir entre le modèle anglais ou américain mais d'adapter notre législation à la réalité du secteur bancaire français sous peine de graves difficultés.

Il faut mettre un terme à la prédation d'activités toxiques sur une activité bancaire traditionnelle. La création de BPCE, regroupant Caisses d’Epargne, Banques Populaires, Natixis … pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy est le type même du contre exemple. Le retour à la spécialisation de certains réseaux bancaires doit faire partie, au même titre que la structuration du secteur et sa réglementation, d'un chantier à ouvrir auquel associer les salariés et leurs organisations syndicales.

Une Banque Publique d'Investissement (BPI) moteur de la réorientation

La constitution d’une Banque publique d’Investissement proposée par François Hollande dans la campagne doit être le moteur d’un assainissement et d’une réorientation de l’activité bancaire.

Son périmètre comme ses missions doivent faire l'objet d'un débat public avec tous les acteurs concernés. La régionalisation de ce pôle public bancaire doit faire l'objet d'une gouvernance associant les élus des collectivités concernées comme les représentants des salariés et des citoyens.

Pour réellement peser, il faut que la BPI puisse avoir un rôle réel d'impulsion. Alors que sur les 2000 milliards d'encours de crédits, un peu plus de 850 milliards sont des crédits aux entreprises, il est nécessaire que la part relevant de la banque publique puisse être suffisante pour entraîner des dynamiques vertueuses avec le secteur bancaire coopératif et mutualiste qu'il faut revitaliser autour de ses valeurs de base et avec le secteur privé.

Jean-Claude Branchereau

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