GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Pour l’autodétermination des peuples du Kosovo!

La déclaration d’indépendance du Kosovo, ce 17 février 2008, repose une question qui soulève des passions mais qui, pourtant, appelle une réponse démocratique simple: le droit des peuples à l’autodétermination. Celui-ci permet de choisir entre l’indépendance et l’intégration dans un Etat, qui exercerait la souveraineté populaire sur un territoire plus vaste et composite, en passant par différentes formes d’autonomie au sein d’une confédération ou d’un Etat fédéral.

Pour un référendum

d’autodétermination

L’exercice de ce droit à l’autodétermination exige un débat public conclu par un référendum, au même titre que tout débat constitutionnel. La présente déclaration d’indépendance ne résulte pas d’un tel processus démocratique: elle fut prononcée par le parlement de Pristina alors que le pays subit l’occupation militaire de l’Otan. Ces circonstances sont porteuses de mauvaises nouvelles, déjà annoncées et menaçantes pour l’avenir. Il n’y a pas que Sarkozy qui a peur des référendums.

Il est pourtant certain que l’organisation d’un tel référendum aurait abouti à une majorité écrasante en faveur de l’indépendance du Kosovo. Alors… la forme de la décision serait-elle si importante? Non, mais l’organisation du référendum aurait confirmé l’hétérogénéité, dans ses frontières actuelles, de la région appelée Kosovo. En la rendant visible, elle aurait appelé un traitement différencié de la région kosovare où les albanophones sont majoritaires et de la région de Mitrovica où les Serbes sont majoritaires.

La souveraineté populaire demande

de respecter ces majorités territoriales

Les frontières existantes, entre territoires, ne découlent d’aucune transcendance, d’aucun dogme, d’aucune nature pré-établie. Qu’elles soient un héritage historique n’est pas un critère démocratique. Elles sont une construction humaine: elles ont souvent été tracées par la force, elles se trouvent parfois dépassées par l’évolution sociologique. Les frontières historiques, illégitimes ou périmées, ne doivent pas être imposées aux humains actuels. C’est le choix des habitants légitimes du pays qui doit imposer les frontières.

Les guerres qui viennent de ravager l’ex-Yougoslavie et qui, menaçant le Kosovo, servent de prétexte à l’occupation militaire, résultent du mépris de cette logique démocratique. C’est pour des motivations géostratégiques que les USA et l’Allemagne ont soutenu les dirigeants nationalistes croates et bosniaques et soutiennent maintenant l’indépendance du Kosovo, alors que la Russie a toujours soutenu l’ultra-nationalisme serbe. Les deux camps sont donc restés attachés aux frontières antérieures des Républiques yougoslaves et ont ainsi cultivé les nationalismes les plus violents.

Résoudre la question yougoslave c’est, d’abord, résoudre la question serbe

Le nationalisme serbe fut la conjonction de deux phénomènes. D’une part, la révolte contre le rejet du droit à l’autodétermination pour des territoires à majorité serbe que les indépendances de la Croatie et de la Bosnie séparaient, de force, de la Serbie: les majorités territoriales serbes ont été bafouées. D’autre part, l’impérialisme serbe qui, au lieu de revendiquer le rattachement à la Serbie des territoires à majorité serbe (la Krajina et le nord de la Bosnie – la République Serbska), s’est opposé à l’indépendance de la Croatie et de la Bosnie.

Il est remarquable que l’indépendance de la Slovénie et celle du Monténégro n’aient provoqué aucune guerre avec les Serbes: aucune région de ces deux pays n’était peuplée d’une majorité serbe. Ces deux indépendances furent acceptées par tous.

Des référendums pour résoudre

les questions serbes et kosovares

Droit à l’indépendance du Kosovo! Droit de la région de Mitrovica du Kosovo et de la République Serbska de Bosnie à être rattachées à la Serbie! Droit du Kosovo occidental (encore administré par la Serbie) à être rattaché au Kosovo indépendant!

Les adversaires du droit des peuples à l’autodétermination cachent leurs motivations sous un motif qui se prétend le plus noble: la défense de l’Etat fédéral yougoslave (mais sous domination serbe!). Jean-Pierre Chevènement explique que l’indépendance du Kosovo est une «faute contre l’Histoire» (avec un H majuscule): il s’oppose à «créer un Etat là où il n’y en eût jamais un». Mais alors, il n’aurait pas fallu en créer en Slovénie et il ne faudra pas en créer au Kurdistan!

Pourtant, quand les tensions empêchent la cohabitation, ne vaut-il mieux pas se séparer pour apprendre à vivre en voisins et permettre ainsi aux générations futures de tenter une vraie cohabitation sur de nouvelles bases?

A-t-on besoin de pompiers incendiaires?

Il est vrai que l’indépendance du Kosovo ne suffit pas pour faire respecter les droits démocratiques, notamment les droits sociaux. La situation économique très préoccupante: laminé par la politique néolibérale imposée par la tutelle européenne, le pays est pillé par les mafias et leurs trafics commerciaux, l’industrie minière a été privatisée et le chômage atteint 50% des actifs. Le Kosovo est officiellement indépendant, mais il reste militairement occupé. Il est soumis à la tutelle d’un «représentant spécial» de l’Union européenne qui a compétence pour abroger des décisions ou des lois adoptées par les autorités du Kosovo et pour sanctionner ou révoquer des agents publics.

Quand l’incendie couve, on a besoin de pompiers. Mais au Kosovo, le corps des pompiers c’est l’Otan, c’est-à-dire l’organisateur de l’échec de la conférence de Rambouillet… puisque Bush voulait une intervention militaire. L’organisateur, aussi, des bombardements sur la Serbie… qui ont provoqué les représailles serbes contre les Kosovars…

L’Otan doit quitter le Kosovo pour permettre l’organisation, sous contrôle international, de référendums d’autodétermination, pour que Mitrovica ne devienne pas Srebrenica.

Pierre Ruscassie

Document PDF à télécharger
L’article en PDF

Inscrivez-vous à l'infolettre de GDS




La revue papier

Les Vidéos

En voir plus…