GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Plus de 60 % pour le gouvernement d'Evo Morales !

Dans les années 1980, l’Amérique

latine était la vitrine figée de la

grande surface ultra-libérale.

Mais l’histoire a horreur de l’immobilité

et les peuples latino-américains se sont

réveillés. Cette « irruption violente des

masses dans le domaine où se règlent

leurs propres destinées », si elle est générale

dans la région, s’incarne avant tout

dans le processus démocratique qui

déferle en Bolivie depuis 2003.

Ce petit pays andin est depuis lors le

théâtre d’un affrontement social majeur

qui peut faire basculer, à l’échelle régionale

comme au niveau mondial, le rapport

de force politique du côté du travail

et des salariés. C’est lors de la dernière

année du XXe siècle que la situation économique

de la Bolivie a radicalement

évolué, avec la découverte du gigantesque

gisement gazier de Tarija.

Elle donne le signal au réveil de la combativité

ouvrière et permet aux masses de

se lancer hardiment sur les voies de la

contestation du libéralisme. Leur mot

d’ordre est simple : la manne financière

assurée par l’extraction du gaz naturel

doit profiter à tous.

Depuis 2000, il n’y a pas eu une année

sans de grandes manifestations contre le

pouvoir. En 5 ans, les travailleurs boliviens

ont réussi à acculer deux présidents

à la démission et ont forcé le troisième à

appeler à des élections anticipées en

2005, qui ont vu la victoire d’un dirigeant

indigène et syndicaliste peu connu jusque

là : Evo Morales. Ceux qui crient à la personnalisation

du pouvoir et au bonapartisme

en Bolivie oublient que Morales ne

serait rien sans les masses qui l’ont porté

au pouvoir. Il n’a leur confiance que

parce qu’il incarne leurs aspirations

confuses au mieux-vivre et surtout leur

refus de revenir à la situation antérieure.

Nul doute que ce chef prétendument charismatique

perdrait son aura en un jour,

s’il s’engageait sur la voie des concessions

avec l’ordre ancien…

L’action gouvernementale de Morales et

de son parti, le MAS, est donc déterminée

par cette seule exigence : satisfaire

les aspirations légitimes de la majorité du

peuple bolivien. La nationalisaton des

hydrocarbures, garantissant à l’Etat 82 %

des recettes gazières, permet depuis de

financer des plans de lutte contre la pauvreté

qui sont à la hauteur de l’urgence

sociale.

La satisfaction des besoins populaires

devait également être la clef de voûte de

la réforme institutionnelle et de la reconnaissance

du fait indigène. Mais, face à la

popularité du président des travailleurs,

l’opposition de droite a concentré ces

forces sur ce débat et espère pouvoir profiter

de l’irrésolution des secteurs modérés

du MAS. Cette opposition officielle et

parlementaire, visant à séparer les provinces

riches de l’Est du centre andin,

indigène et populaire, a de fait obtenu du

président Morales l’organisation d’un

référendum sur l’autonomie provinciale,

le 2 juillet 2006. La droite a largement

perdu au niveau national, ce qui prouve

que l’oligarchie est ultra minoritaire,

mais la vérité sociale est au niveau local.

Les provinces andines autour de La Paz,

fidèles au MAS, ont voté contre toute

dérive autonomiste, tandis que les

régions riches de l’Est se sont prononcées

pour, ce qui prouve la fracture socio-géographique

de ce pays. Cette division

patente du pays a mis à l’ordre du jour

dans les rangs de l’opposition la question

de sa radicalisation. Les succès politiques

de Morales ont en effet obligé la réaction

à s’appuyer plus directement sur l’appareil

répressif d’Etat. Depuis son arrivée

au pouvoir, Morales a hésité à lutter frontalement

contre ce vestige de l’ordre

ancien que les masses boliviennes veulent

mettre à bas.

Morales n’a pas épuré l’appareil d’Etat et

a laissé la police, l’administration, la justice

et les médias aux mains des oligarques

par peur de passer pour trop

radical.

C’est pourtant la démocratie elle-même

qui exigeait ce coup de balai qui n’a pas

effrayé en leur temps les Gambetta et

autre Ferry, bien décidés à mettre à la

porte le personnel publique monarchiste !

Les préfets des provinces de Santa Cruz

ou de Pando, bien que considérés par tous

comme des valets des oligarques, n’ont

pas été remplacé par des fonctionnaires

loyaux à Morales et au mouvement

social.

Face aux velléités sécessionnistes des

provinces orientales, qui ont commencé à

organiser des référendums illégaux et des

lock-out, Morales a remis son mandat en

jeu le 10 août 2008. Il l’a emporté avec

plus de 60 % des voix. C’est véritablement

depuis cette date que la réaction a

fini sa mue en opposition terroriste. Dès

le mois de septembre, les attaques contre

les locaux syndicaux et contre la presse

de gauche se sont multipliées et ont été

systématiquement couvertes par les préfets

réactionnaires.

En septembre dernier, les affrontements

de Cobija, qui ont débouché sur l’assassinat

de 16 militants paysans, ont constitué

le couronnement de l’activité des bandes

d’extrême droite. Face à ce danger de

plus en plus éminent, Morales est au pied

du mur. Il n’y a pas de conciliation possible

avec les oligarques qui sont maintenant

décidés à recourir au coup d’Etat et

à l’assassinat. Il faut approfondir le processus

révolutionnaire. Les masses, bien

décidées à se défendre, ont montré la voie

à Morales en participant à la mi-octobre à

une grande marche vers La Paz. De

même, les ouvriers des quartiers pauvres

de Santa Cruz s’organisent pour boucler

la ville qui constitue le QG de la réaction.

Le MAS doit passer le guet au plus vite,

car le temps presse.

Jean-François Claudon

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