GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Pendant la campagne, c'est passé inaperçu au Vénézuela

Il y a des pays comme ça où les patrons n'hésitent pas. On ne peut pas dire que le Vénézuela était un pays en révolution. Hugo Chavez était le président élu. Pas mal élu comme Chirac : non, très bien élu, et plusieurs fois. Il l'avait été comme président puis il avait consulté le peuple pour changer la constitution, et il avait obtenu 80 % des voix, puis il avait, selon la nouvelle constitution fait élire une assemblée nationale : la majorité avait été écrasante. Il avait ainsi, c'est vrai, changé "l'establishment" comme dirait Le Pen. Toute la classe politique a été "virée" : démocratiquement, sans rien pouvoir dire. Le peuple l'avait rêvé, Hugo Chavez l'a fait. Mais le libéralisme mondial n'aime pas ce genre d'exemple.

Non pas que Hugo Chavez soit un révolutionnaire. Au départ, c'était un général putschiste au programme incertain et qui avait échoué. Mais il s'était converti à la démocratie et n'avait plus rien fait depuis de longues années sans s'appuyer sur le suffrage universel. Mais grâce à ce choix, il a reçu l'appui populaire qui lui manquait. Et il a, comme d'autres avant lui, mené une politique populiste et populaire : il a contribué à la redistribution des richesses, il a favorisé les plus pauvres, il a mis en place un régime luttant contre la corruption.

Les USA n'ont pas vu d'un bon oeil, qu'Hugo Chavez se rapproche alors de Fidel Castro, renoue des échanges économiques avec Cuba, rencontre Saddam Hussein et le colonel Khadafi, se prononce "contre l'impérialisme" et reprenne toutes les traditions des libérateurs latino-américains de Bolivar au commandant Marcos.

Toujours est-il que les USA se contentaient d'intrigue et de lutte sourde... tant qu'Hugo Chavez ne s'était pas avisé de mettre le pétrole sous contrôle public. Le pétrole c'est la ressource essentielle au Vénézuéla, toute son économie en dépend. Mais cela a aussi des conséquences sur le cours du baril mondial. Aussi lorsque le gouvernement vénézuélien a tenté de faire barrage aux menées des gestionnaires libéraux, capitalistes, proaméricains du pétrole, les USA ont commencé à comploter plus activement : ils ont essayé de susciter des mouvements des "couches moyennes", des grèves des syndicats, des soulèvements des... cadres !

Il ne s'agissait pas des couches populaires mais des anciens appareils des partis dominants qui avaient mis le Vénézuéla en coupe réglée pendant des décennies et qui cherchaient leur revanche. Pourtant ce fut présenté dans la presse mondiale comme un affaiblissement du régime, comme un signe d'effondrement d'un ex-putschiste irresponsable.

Nos journaux, comme Le Monde et Libération, furent des agents incroyablement cyniques de cette présentation mensongère. La France en campagne électorale avait trop à faire et était trop mal informée pour s'en émouvoir : mais quelques manifestations de quelques ménagères bourgeoises furent présentées comme des démonstrations populaires hostiles au régime de Chavez.

Le patronat directement :

Appuyé sur des secteurs minoritaires de l'armée, le patronat pétrolier, celui proche de Bush et de leurs homologues texans, prépara donc et mis en oeuvre un coup d'état. Un certain Carmona, un confrère du baron Ernest-Antoine Seillière réussit à faire arrêter le président légalement élu et prit le pouvoir. Il annonça la dissolution de l'assemblée régulièrement élue. La presse mondiale et française fit mine de ne pas s'étonner, de considérer cela comme légitime. Nos journalistes "démocrates" ne firent aucun éditorial pour condamner cette infraction aux droits de l'homme, à la constitution, c'était "normal" pour eux, que les pétroliers se révoltent : de quoi se mêlait l'état vénézuélien en voulant faire profiter le peuple des royalties de l'or noir ?

Hélas, pour les libéraux et aveugles démocrates du monde entier, le peuple ne l'entendit pas ainsi, il se mobilisa pour de bon, fit grève et déferla en manifestations réellement de masse, au point de rendre dérisoire le nouveau pouvoir du Medef local et de Carmona. L'armée fit machine arrière, prit peur, et libéra Hugo Chavez qui revint triomphalement. La presse mondiale fut stupéfaite de ce retour : comment, les USA ne savaient pas appuyer un putsch jusqu'au bout ? Comment, le pétrole peut donc être soumis à des règles publiques ? Le Monde osa tranquillement reproduire les propos d'un militaire qui confessait que leur seul tort avait été "de ne pas exécuter Chavez pendant qu'ils l'avaient entre leurs mains" (sic). Toujours est-il que le président élu fut ramené au pouvoir par des centaines de milliers de pauvres qui ne croyaient qu'en lui.

Stupéfaction : le patron des patrons vénézuéliens n'avait pas été capable d'aller jusqu'au bout, il avait échoué malgré l'appui trop visible des USA. Quel évènement ! la presse mondiale a vite fait de ne plus en parler et de ne surtout pas en tirer les leçons. Peu d'éditorialistes réfléchiront sur le monde totalitaire de Bush, peu d'indignation parmi nos philosophes sur cette tentative criminelle ! Bush combat le terrorisme mais a tenté de s'en servir impunément à Caracas : cette fois cela a raté, mais il y a un fort risque que ce ne soit qu'une répétition.

Hugo Chavez revenu au pouvoir légal qui est le sien, a quand même été obligé, depuis, de faire des concessions aux rois du pétrole. La population vénézuelienne n'a qu'à bien se défendre à l'avenir : les défenseurs du pétrole libre, les mondialisateurs totalitaires recommencent tous les trois ou six mois leur tentative avortée en profitant de n'avoir pas été réprimés ! Car Hugo Chavez n'a fusillé ni emprisonné personne, les putschistes ont été libérés ! Mais jusqu'à présent leurs plus grosses de leurs mobilisations de riches ont été plus faibles que les plus grosses des mobilisations de pauvres : cela a suffi pour imposer un compromis somme toute modeste : Hugo Chavez resterait au pouvoir... jusqu'aux prochaines élections. Vous vous rendez compte ; les pétroliers, le patronat, Bush, obligés d'attendre un scrutin régulier pour « vider » un élu populaire !

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