GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Pas d'issue sans unité de toute la gauche !

Le congrès de Reims réuni en

novembre 2008 était une promesse.

Mais celle-ci n’a pas encore été

tenue, son devenir est encore devant

nous. Depuis plus de 30 ans, les militants

socialistes se vivent comme les héritiers

d’Epinay, du congrès de 1971 qui avait

ouvert la voie à l’Union de la Gauche et

à son programme commun de gouvernement.

Les figures de référence, qui les

ont marquées depuis 40 ans, sont

François Mitterrand, sur une longue

durée, et Lionel Jospin, pendant sept ans.

L’un comme artisan de l’Union de la

Gauche, renouant avec une stratégie

oubliée, l’autre comme tête de la Gauche

plurielle, duplicat affaibli de la première.

La Gauche plurielle

rate la marche

D’ailleurs, de 1997 à 2002, le gouvernement

de la Gauche plurielle aurait pu être

mis à profit pour constituer une nouvelle

union de la gauche autour d’un nouveau

programme commun. Il aurait pu se

transformer et, d’une juxtaposition d’accords

bilatéraux avec le PS, devenir un

accord multilatéral issu de nouvelles

«Assises de la transformation sociale».

Mais l’équipe autour de Jospin n’a pas

voulu le faire. Pourtant, la « génération

Mitterrand», adossée au congrès

d’Epinay, avait vécu 12 années fastes

(1971-1983). Il est vrai que, depuis le

plan Delors, parenthèse ouverte en 1983

qui ne se refermait pas, nombre de dirigeants

avaient troqué leur attachement

aux valeurs de gauche, dont la poursuite

était trop exigeante, pour des plans de

carrière à rebondissements. En 1993, la

défaite subie la poussait vers la retraite et

appelait de nouvelles équipes à la tête de

la gauche.

L’échec du 21 avril 2002

reste insurmonté

Ces nouveaux dirigeants, qui s’étaient

formés auprès de Mitterrand, mais durant

sa seconde période alors que la division

de la gauche se poursuivait, n’avaient pas

été poussés, ressourcés, par un événement

politique aussi fort que Mai 68.

Cette équipe nouvelle saluait Epinay,

mais elle se révélait incapable de renouer

avec son souffle.

Certes le gouvernement Jospin était le

plus à gauche d’Europe. Certes il a fait

avancer les 35 h et reculer le chômage.

Mais autour de Jospin l’occasion n’a pas

été saisie de la possibilité d’une renaissance

de la gauche autour d’une nouvelle

union de la gauche. Ils ont été en deçà

des attentes populaires et ont tristement

perdu en 2002. Ce sont pourtant les

mêmes qui dirigent encore le PS de 2002

à 2007. Dépourvus de projet, ils ne peuvent

éviter que la crise éclate après la

défaite à la présidentielle. Au congrès de

Reims, la direction sortante, pour la première

fois ne désigne pas la suivante. La

majorité autour d’Aubry a besoin de la

gauche du parti pour exister. Mais elle ne

tranche pas, elle gère prudemment, les

équilibres, un peu comme Hollande avec

une légère teinture plus à gauche. ça ne

suffit pas à remonter la pente. Si cela

continue, nous allons «toucher le fond».

Attendre de toucher le fond, en espérant

un sursaut, ne sert à rien : au lieu de

bénéficier d’un rebond, nous commencerions

à creuser…

Le fond, la SFIO

l’avait touché en 1969

À cette élection présidentielle, Gaston

Deferre rassemblait 5 % des suffrages

exprimés. Duclos, pour le PCF, obtenait

21 %. Pour le PSU, Rocard réalisait 3 %

et, pour la Ligue communiste, Krivine

1 %. Total : 30 % pour la gauche qui était

absente du second tour. C’était le résultat

de 30 ans d’application de la stratégie de

« troisième force » par laquelle les socialistes

prenaient part à la stratégie de

«guerre froide» qui interdisait toute

alliance avec les Partis communistes en

prétendant que, selon la formule de Guy

Mollet, « ils n’étaient pas à gauche, mais

à l’Est ». Cette division de la gauche, tout

comme celle que le PCF organisa de

1977 à 1994 (date où Marchais fut remplacé

par Robert Hue), était associée à

des alliances « de troisième force » avec

la droite radicale ou démocrate-chrétienne.

Elle conduisit la SFIO à soutenir la

guerre coloniale d’Algérie et la constitution

gaulliste. Et à empêcher la gauche

(SFIO-PCF-PSU) de devenir majoritaire.

De 1947 à 1971, la SFIO et la gauche

connurent 24 années de déclin.

La régénérescence

de la gauche

La « génération Mollet » qui dirigeait la

SFIO a donc connu une dégénérescence

continue qui a conduit aux 5 % de

1969. C’est l’adoption, au congrès

d’Epinay, de la stratégie d’unité de la

gauche qui, avec l’accord du PCF, permit

de mobiliser tous les électeurs de gauche

et d’en gagner de nouveaux. De 30 % en

1969, la gauche passa à 48 % aux législatives

de 1973 et Mitterrand obtint

49,6 % à la présidentielle de 1974. La

SFIO était passée à côté de la grève générale

de Mai 68 sans lui proposer de

débouché politique, sans exiger la dissolution

de l’Assemblée, laissant de Gaulle

proposer le premier une solution démocratique

à la crise politique en convoquant

des législatives anticipées.

Le PCF cherchait à cacher le caractère

politique que la grève générale donnait à

la crise sociale et au lieu d’exiger la dissolution

de l’Assemblée, s’efforçait de

faire arrêter la grève, entreprise par entreprise.

Ce sont pourtant ces deux partis

qui bénéficièrent le plus de l’apport de la

jeunesse, génération militante qui, 20 ans

plus tard, serait appelée à prendre la suite

de celle qui, en 1972, était à la tête des

deux partis et s’engageait avec

Mitterrand et Marchais. L’Union de la

Gauche était le premier débouché politique

différé, déformé, pas encore gouvernemental,

de la poussée sociale et

politique de Mai 68.

Ses deux principaux partis lui doivent

leur renouvellement. L’extrême gauche,

qui refuse d’y adhérer, lui doit d’entrer

en crise : les trotskistes de régresser et les

maoïstes de disparaître.

L’urgence d’une nouvelle unité

de la gauche

Avec l’épuisement de la génération

Mitterrand et la fin des campagnes de

division de la gauche conduites par le

PCF, après la défaite électorale de 1993,

la gauche pouvait saisir l’occasion pour

reconstruire son unité. Une expérimentation

en ce sens eut lieu en 1994 avec les

« Assises de la transformation sociale ».

Une forme édulcorée fut réalisée de 1997

à 2002 avec la Gauche plurielle. Mais la

volonté politique manqua à la direction

du PS et que le reste de la gauche était en

plein bouleversement. Si cette unité avait

été engagée, la dérive droitière de la

génération Jospin aurait été contrée, les

scissions de Chevènement et de

Mélenchon n’aurait pas eu lieu. C’est

dans cette voie que toute la gauche doit

maintenant s’engager pour ne pas toucher

le fond, remobiliser son électorat et

offrir une solution politique démocratique

à la crise sociale et économique que

nous traversons.

Reims en novembre 2008

était une promesse…

Il s’est joué sur l’alternative entre la stratégie

d’Epinay et celle d’alliance avec le

Modem. La chute à 29 % de la motion

présentée par la candidate choisie à 60 %

deux ans auparavant, n’est que très partiellement

due à la dégradation de son

image médiatique puisque dans le scrutin

uninominal et apolitique qui permet d’attribuer

le premier secrétariat du PS,

Ségolène Royal a frôlé les 50 %. Ce

résultat montre l’attente qui existe au

sein du PS pour renouer avec l’unité de la

gauche. Mais cette attente risque de nouveau

d’être déçue. L’alliance générale,

réalisée hors congrès, fin janvier, avec

l’entrée des proches de Ségolène Royal

au secrétariat national du PS peut signifier

que l’espoir de renouer avec l’unité

de la gauche ne sera pas satisfait de sitôt.

La prise de position de François

Hollande en faveur de discussions avec

Bayrou, montre que la direction du PS

n’a pas de boussole. Elle est seulement

retenue par l’opposition que rencontre

une alliance avec le Modem chez les

militants socialistes.

Choisir entre l’unité

qui régénère et mobilise,

et la division qui sectarise

et affaiblit

Deux tentations coexistent chez les militants

et électeurs de gauche qui doutent.

Les électeurs socialistes tentés de

voter pour le Front de gauche ou le NPA

parce qu’ils commencent à douter du PS

vont, à l’approche du 7 juin, se poser la

question essentielle « battre la droite ou

la laisser passer ? ». La réponse s’impose:

battre la droite. Mais les électeurs de

gauche très remontés contre la politique

des dirigeants socialistes et décidés à

voter Front de gauche ou NPA se poseront

une question semblable : « sanctionner

le PS ou battre la droite ? ».

La réponse s’impose encore : sanctionner

le PS serait faire le jeu de ceux qui veulent

l’alliance avec le Modem et non pas

de la gauche du Parti. « Témoigner ou

peser ? », telle est la question. Il existe

une seule solution qui permet de peser

pour battre, à la fois, toutes les droites et

toutes les politiques libérales : l’union de

la gauche autour d’un programme discuté

dans des « Assises populaires ».

C’est ce que nous défendons au sein du

PS, pour défendre et faire fructifier les

promesses du congrès de Reims. Nous

aurons plus de facilités pour atteindre cet

objectif si le PS maintient un bon score le

7 juin. Ce n’est pas seulement un vote

utile, mais un vote efficace pour l’avenir.

L’addition des voix de gauche PSFG-

NPA-LO-Verts doit dépasser celle

des voix de droite UMP-Modem.

Et le PS s’il dépasse l’UMP sera encore

plus clairement placé devant ses responsabilités.

Pierre Ruscassie

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