GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

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Menaces sur le livret A - Menaces sur le logement social

Une nouvelles fois, la Commission de la Concurrence à Bruxelles est saisie d'une demande de banalisation du livret A par les banques commerciales, le Crédit Agricole, les Banques Populaires. Le gouvernement français fait mine de défendre cette spécificité alors même qu'il a largement contribué à libéraliser le secteur bancaire et à affaiblir les outils financiers publics ou semi-publics échappant à la loi de la concurrence « libre et non faussée ».

Les banques veulent obtenir la fin du monopole de la distribution du livret A. La création de la Banque Postale, l'évolution des Caisses d'Epargne, avec la perspective d'une extension de leurs compétences à l'ensemble des activités bancaires, servent de prétexte pour relancer le débat sur le livret A.

En fait, la banalisation de la distribution du livret A pourrait se traduire à très court terme par sa disparition pure et simple.

Ils veulent libéraliser tout le secteur de l'épargne...

Les banques plaident qu'elles pourraient largement organiser la collecte de l'épargne via le livret A. Mais la course à la rentabilité à court terme de leurs capitaux produirait, en réalité, un transfert de l'épargne du livret A vers d'autres formes d'épargne. La « décollecte » s'accélèrerait menaçant la mobilisation de fonds pour le logement social. Les petits épargnants se trouveraient menacés avec la généralisation de la logique des « comptes non rentables ».

Les banques peuvent déjà distribuer certains produits d'épargne réglementée. Le CODEVI, les CEL et PEL n'ont été que des produits d'appel, leur permettant de drainer l'épargne des particuliers qu'elles avaient longtemps délaissé. Ces produits ont simplement servi d'appât pour développer l'épargne financière, assurer la fidélité de la clientèle, sans générer de moyens supplémentaires au service de l'intérêt général. Le CODEVI - créé pour le financement des PME - est de ce point de vue un exemple révélateur ! Il n'a pas résolu les questions de financement des PME auquel sa création était destinée.

Les banques AFB, le CA et les BP sont parmi les premières banques de réseaux. Elles n'ont pas eu besoin hier du livret A pour acquérir la place qu'elles occupent dans le paysage bancaire français. Elles n'en ont pas plus besoin demain.

Ce qui est en jeu dans cette bataille, c'est en réalité la libéralisation totale du marché de l'épargne et du crédit.

Les fonds mobilisés par la Caisse des Dépôts et Consignations, en premier lieu la collecte du livret A pour financer le logement social, échappent à la logique pure du marché. Les banques veulent en finir avec cet accroc à la concurrence « libre et non faussée ».

...et en finir avec les missions de service public

Si elles l'emportaient, les missions de service public, d'intérêt général disparaîtraient. Faute de pouvoir recourir à l'épargne populaire, les politiques de construction de logements sociaux dépendraient soit de l'impôt, soit de l'emprunt. Ceci aurait un effet immédiat sur le renchérissement des coûts compte tenu des taux des emprunts qui seraient pratiqués.

Il n'est qu'à regarder les programmes immobiliers que financent aujourd'hui les banques via leurs filiales spécialisées. Ce sont des programmes de standing dans le cadre d'un marché de l'immobilier hautement spéculatif.

Au total, ce serait la mise en cause de la construction de centaines de milliers de logements sociaux en France.

Par ricochet, c'est l'ensemble de l'épargne réglementée, plus couramment appelée en France «épargne populaire » qui est visée (épargne logement, livret jeune, livret d'épargne populaire et le livret bleu du Crédit Mutuel).

Aujourd'hui, les Caisses d'Epargne sont dotées de missions d'intérêt général de par la loi (voir pavé ci-contre). Déjà malmenées, elles seraient, de facto, remises en cause.

Pour un pôle financier public

Compte tenu des enjeux, des risques pour l'ensemble de l'épargne réglementée, une véritable consultation de l'ensemble des acteurs concernés est nécessaire : les bénéficiaires de cette collecte, les collectivités locales, les petites et moyennes entreprises, les salariés de ces secteurs.

Les organisations syndicales de la profession, l'intersyndicale du secteur financier semi-public demandent ce large débat.

Il s'agit d'une question de société capitale en France mais aussi sur le type d'Europe qui se construit.

Il faut empêcher ce mauvais coup, défendre le modèle des missions d'intérêt général. La mobilisation du plus grand nombre est nécessaire dès aujourd'hui.

Mais il faut aussi améliorer le fonctionnement et l'utilisation de l'épargne réglementée, débattre de son développement.

C'est le sens à donner à la constitution d'un pôle financier public qui pourrait englober les Caisses d'Epargne, la Banque postale et la Caisse des Dépôts et Consignations.

Cette proposition des socialistes devrait permettre de financer des activités jugées d'importance stratégique pour l'avenir économique et la cohésion sociale de notre pays (crédits à taux préférentiels en fonction de la nature des activités industrielles, prise de participations dans les entreprises et les secteurs ayant fait l'objet de choix politiques de l'Etat, investissements sociaux ...).

L'époque où l'Etat ne pouvait rien doit être révolue. Il ne « pourra pas tout » mais il doit se donner les moyens d'agir de façon volontariste et efficace dans l'intérêt de la République et de ses citoyens.

Redéfinir la place du secteur bancaire et financier

Sur le champ bancaire et financier, c'est aussi conforter la place du secteur mutualiste attaqué de toutes parts par les intégristes de la « société anonyme » ou de la « société européenne » tant en France qu'en Europe.

C'est aussi mettre en débat le rôle du secteur bancaire dans sa totalité qui n'est pas un secteur comme les autres et qui doit être non seulement encadré, régulé mais aussi avoir la charge d'assumer des missions de service public à commencer par un droit réel au compte et des services bancaires de base gratuits alors que l'exclusion bancaire gagne du terrain.

L'appel à l'épargne disponible, via des circuits spécifiques pour financer des objets économiques et sociaux d'intérêts collectifs est là aussi une question à ouvrir en France et en Europe.

Les résultats financiers de ce secteur qui compte de gros acteurs du CAC 40 permettent de poser ces questions et d'inverser largement les tendances à l'œuvre aujourd'hui.

Jean-Claude Branchereau et Jean-Marie Marquaille

Caisses d'Epargne - Livret A

Danger imminent sur les missions d'intérêt général

Après 150 ans de liens originaux au service des missions d'intérêt général, la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) est sortie du capital des Caisses d'Epargne.

Les Caisses d'Epargne ne sont pas une banque comme les autres. Le statut du groupe coopératif voté par le Parlement en 1999 liste les missions d'intérêt général : solidarité et lutte contre l'exclusion, développement de la prévoyance pour satisfaire les besoins collectifs et familiaux, protection de l'épargne populaire, financement du logement social (livret A), amélioration du développement économique local et régional.

Une partie du résultat doit être consacrée à financer des Projets d'Economie Locale et Sociale (Pels).

Les dirigeants qui souhaitaient transformer les Caisses d'Epargne en société anonyme font tout pour contourner « les contraintes que la loi nous impose » selon son Président.

Ainsi l'enveloppe pour financer les Pels a été divisé par trois au regard de ce que prévoit la loi.

Ces derniers mois un projet de cotation en bourse était en préparation puis ce fut l'annonce de la création d'une banque d'investissement commune avec le groupe Banques Populaires en fusionnant Natexis et Ixis. Le nouvel ensemble dénommé Natixis qui se veut un acteur majeur sur les « marchés » financiers ponctionnera une partie des résultats des Banques Populaires et des Caisses d'Epargne pour assurer sa rentabilité.

La CDC - présente à 37% dans le capital des Caisses d'Epargne - a dénoncé le projet très éloigné des clientèles des deux groupes reposant sur les petites entreprises et les particuliers alors qu'une banque de financement travaille en général pour les grandes entreprises. Mais plutôt que de se battre en utilisant son droit de veto pour contrer le projet ou en faisant de NATIXIS un outil financier au service du secteur public et coopératif, la CDC a décidé de sortir du capital des Caisses d'Epargne.

La saisine de la Commission européenne (par les Banques Populaires notamment) contre le monopole de distribution du Livret A vient couronner le tout.

Il est nécessaire de revenir sur ces décisions afin que l'Etat dispose d'un outil au service des missions d'intérêt général.


Appel à soutien public et signature

POUR L'AVENIR DU LOGEMENT SOCIAL,

ET LUTTER CONTRE L'EXCLUSION BANCAIRE

IL FAUT SAUVEGARDER LE LIVRET A.

Le gouvernement vient d'annoncer le relèvement du taux du livret A à 2,75 % à compter du 1er août. Cette mesure technique, consécutive à la remontée de l'inflation observée ces derniers mois, ne doit pas masquer les très graves menaces qui pèsent à court terme sur ce produit d'épargne populaire détenu par plus de 45 millions de titulaires.

En effet, le 7 juin dernier, la Commission européenne a ouvert une procédure d'infraction pour distorsion de concurrence mettant en cause principalement le fait que seules la Banque Postale et les Caisses d'Epargne bénéficient de la distribution de ce produit d'épargne défiscalisée. Cette enquête est à mettre en relation avec plaintes déposées par 4 grandes banques françaises privées et mutualistes (Crédit Agricole , BNP, Société Générale, Banque Populaire) pour « abus de position dominante, aide d'Etat, atteinte à la liberté d'Etablissement des banques européennes ». Ces arguments se nourrissent du fait que à la fois la Poste, avec la création de la Banque Postale, société commerciale depuis le 1er janvier 2006 et les Caisses d'Epargne avec leur projet de fusion et d'introduction en bourse avec les Banques populaires (NatIxis), connaîtraient un mouvement de banalisation et de privatisation de leur structure, contradictoire avec le bénéfice durable d'un tel monopole de distribution.

Compte tenu des enjeux considérables de cohésion sociale, nous ne pouvons laisser le Livret A risquer de basculer vers la banalisation et la privatisation :

  • En près de 200 ans d'existence, le livret A a acquis un crédit et une confiance considérables auprès de la population, qui font que près de 80 % en est titulaire.
  • La centralisation et la gestion par la Caisse des dépôts de l'épargne collectée sur ce livret A ont permis le financement de 80 % des 4,2 millions de logements sociaux que compte notre pays à partir des prêts de long terme consentis (sans marge bénéficiaire et sans sélection) par la CDC sur cet encours, aux organismes HLM.
  • Au-delà du financement des besoins d'utilité publique et sociale de notre pays (logements sociaux, écoles, voiries et transports publics), le livret constitue le seul produit efficace de lutte contre l'exclusion bancaire des populations démunies : plus de 50 % des livrets A ont un encours inférieur à 150 euros à La Poste et 75 euros pour 1 livret sur 3 aux Caisses d'Epargne. C'est le plus souvent à partir du seul livret A de la Poste et des Caisses d'Epargne, qui est ouvert à tous, gratuitement et sans conditions, que les bénéficiaires des minima sociaux peuvent réaliser leurs opérations bancaires de base (retrait-dépôt, émission de chèques de banque gratuits).
  • Le livret A contribue à la mission de cohésion sociale et d'aménagement du territoire de La Poste, c'est ainsi que fut toujours justifiée la commission légèrement supérieure à celle des Caisses d'Epargne (1,3% contre 1%) que lui verse la Caisse des Dépôts et Consignations sur la collecte réalisée.
  • Il ne faut pas être grand clerc pour prévoir que si la distribution du Livret A était ouverte à l'ensemble du réseau bancaire :

  • Le livret A deviendrait un très bon produit d'appel pour les banques commerciales françaises et étrangères (il n'y pas d'autre produit réunissant plus de 45 millions de titulaires) permettant un recyclage de l'épargne accumulée vers des produits financiers banalisés (type épargne retraite, SICAV, assurance vie, actions...).
  • Ainsi, l'encours de l'épargne centralisée par la CDC diminuerait très rapidement limitant toute capacité de financement de logements sociaux...y compris des objectifs fixés par le plan BORLOO. L'objectif final poursuivi par les banques pourrait alors être atteint : la banalisation complète du financement du logement social par d'autres instruments que le Livret A.
  • Quant aux « petits livrets » dont l'encours est inférieur à 150 euros, il est peu probable qu'ils intéressent les banques privées qui laisseront le soin à la Poste de continuer à les gérer. La Banque Postale, établissement banalisé et tourné vers les clientèles à fort potentiel aura beau jeu de mettre sa survie dans la balance et de remettre en question l'accueil des clientèles défavorisées. La banalisation du Livret A ne serait pas non plus sans effets sur l'équilibre économique des Caisses d'Epargne.
  • Enfin les réseaux distributeurs seraient directement menacés plus particulièrement dans les zones rurales et les quartiers dits sensibles désertés par la profession bancaire.
  • Face à ces menaces, les pouvoirs publics (gouvernement et parlement) doivent réagir et réaffirmer officiellement à la Commission européenne, aux banques concurrentes ainsi que qu'à la Poste et aux Caisses d'Epargne, leur attachement au dispositif public actuel de collecte de l'épargne populaire sur livret A. Dispositif qui unit dans une logique d'intérêt général de lutte contre l'exclusion bancaire, l'aménagement du territoire et de financement d'intérêt public, l'Etablissement Public CDC, les Caisses d'Epargne et la Poste, qui doivent continuer de constituer le socle du pôle public financier.

    Aujourd'hui le contenu de la procédure d'infraction engagée par la Commission Européenne est tenu secret entre le gouvernement français et ses deux réseaux distributeurs, nous exigeons la transparence la plus totale sur un sujet qui intéresse la collectivité nationale et qui est au cœur du pacte social républicain.

    Appel de l'Intersyndicale du secteur semi-public

    économique et financier :

    CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS (CFDT, CGT, CFE/CGC, FO, UAI/UNSA), CAISSES D'EPARGNE (CFDT, CGT, SUD), LA POSTE (FEDERATION SUD PTT), IXIS (CGT) - CAISSE NATIONALE DE PREVOYANCE (CGT), BANQUE PALATINE (CGT), CREDIT FONCIER (CFDT, CFE/CGC, CGT, FO, SUD), NATEXIS BANQUES POPULAIRES (CGT), BANQUE DE FRANCE (CFDT, CGT, FO, SIC, SNABF SOLIDAIRES), INSTITUTS D'EMISSION DES DEPARTEMENTS D'OUTRE-MER ET DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER (CGT)AGENCE FRANCAISE DE DEVELOPPEMENT (CFDT, CGT), OSEO (CGT) UBIFRANCE (CGT)

    Si vous souhaitez soutenir cet appel,

    que vous soyez élu du personnel,

    responsable politique, syndical, associatif

    ou simple particulier,

    merci de nous faire parvenir votre soutien

    à l'adresse suivante :

    inter.semipublic@laposte.net

    en précisant vos nom, prénom, qualité,

    adresse courrier et téléphone

    ou en écrivant par courrier à :

  • Intersyndicale du secteur semi-public économique et financier, Loïc DAGUZAN - CCE Banque de France
  • 23-25 rue Radziwill - Code courrier : 69-1635 -

    75049 PARIS CEDEX 01

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