GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Les 35 h, c'est pas fini...

Le gouvernement Raffarin par décrets et par la loi, donne de plus en plus de coups contre la durée légale du travail à 35 h - en déconnectant les aides massives aux entreprises de la mise en oeuvre réduction du temps de travail ce qui permet aux entreprises de rester à 39 heures ou d'y revenir tout en continuant à encaisser des

exonérations à hauteur de 20 milliards d'euros (c'est à dire 6 % de la masse salariale

nationale, une paille!!!).

- en augmentant le contingent d'heures supplémentaires à 220 h, (227 en réalité avec la suppression d'un jour férié, ce qui revient à faire travailler certains salariés 14 mois en 11, en admettant qu'ils prennent quand même un mois de congé ; ce qui revient aussi à diminuer la majoration des heures supplémentaires qui, jusque là, était au moins de 125 % à 150 % au delà de 130 h).

  • en diminuant les majorations des heures supplémentaires à 10 % dans la majorité des cas,
  • en supprimant les repos compensateurs (déjà superbement ignorés sur les feuilles de paie par les employeurs alors qu'ils sont dûs dés la 42° heure) et les jours dits de «Rtt »
  • en permettant aussi le « rachat » du compte-épargne-temps (à taux horaire constant, sans majoration, ce qui est une maniére de faire faire des heures supplémentaires « gratuites »...)
  • en permettant sur la base du "volontariat" de travailler couramment jusqu'aux limites européennes (durée maxima actuellement limitée à 48 heures hebdo, même si elle est remise en cause, elle-aussi, vers 65 h par l'extension du systéme « d'opt out » britannique, voire 78 h en décomptant les astreintes, ce que réclame la France)
  • en étendant le forfait-jours aux itinérants non cadres (ce qui remet en cause, à la fois, les durées maxima quotidiennes - limitées à dix heures ).
  • en déduisant les temps de transport inclus et nécessaires au travail du temps de travail effectif (ce qui est odieux pour des centaines de milliers de salariés, de toutes branches, obligés de se déplacer sur directive de leur employeur) même pas au niveau du groupe : des salariés qui ont peur d'être virés ne sont guére armés pour faire décompter et payer chacune de leurs heures de travail...)
  • en rendant les contrôles plus difficiles (suppression des registres inspections du travail qui facilitaient pourtant contrôles et mises en demeure de l'inspection, modification des bulletins de paie rendus opaques sous prétexte de « simplification», délais de prescription plus courts pour les délits patronaux -proposition de loi Villain supprimant la prescription trentenaire - modification des régles comptables Ifrs, afin d'isoler, au plan comptable, les établissements les uns par rapport aux autres dans un même groupe et de justifier plus aisément les plans « sociaux »).
  • en supprimant l'obligation d'établir un calendrier lorsqu'il y a annualisation de la durée du travail (le salarié est encore plus soumis aux aléas de la production).
  • Peu à peu, le gouvernement fait passer les 64 mesures du rapport de Virville, les 44 exigences du Medef, celles de diférentes sectes patronales ultra libérales (Afep, Ethic...). Il a le culot de présenter cela comme une « libération » du travail, comme un « volontariat » alors que tout salarié est « subordonné » et que ses horaires dépendent uniquement du bon vouloir de l'employeur.

    Déjà, trés peu de salariés ont 35 h hebdomdaire comme durée réelle : la majorité travaille plus prés de 40 h, de 45h, quand ce n'est pas 50 ou 60 h : 56 h pendant 12 semaines dans l'agriculture, dérogations à 60 h dans la haute-couture, 750 000 salariés de la restauration font des journées de 15 h et des semaines de 50 h... 750 000 chauffeurs font jusqu'à 56 h également, dans le bâtiment, 1 100 000 salariés sont prés de 45 ou 50 h, etc... Des millions de salariés des entreprises de moins de 20 sont restés aux 39 h payées 39 h 24 minutes... En fait, des millions de salariés n'ont jamais vu les 35 h réelles. Les heures supplémentaires ont augmenté de facto en nombre, en restant en majorité impayées, source énorme de fraude et de travail dissimulé.

    Même insuffisamment appliquées, en l'an 2000, la marche vers les 35 h avait crée 350 000 emplois. Maintenant, on recule : ce gouvernement fabrique le chômage délibérément comme instrument de pression contre les revendications salariales légitimes.

    En fait, à leur façon, Chirac et Raffarin font ce qu'a fait Pétain dans sa loi du 28 août 1942 : il n'avait pas touché aux 40 h légales, mais il avait augmenté la durée maxima à 52 h et déduit les temps de casse croute, d'habillage, de pause, du temps de travail effectif. Il n'avait pas osé remettre en cause la conquête des gréves de 1936, mais il avait vidé les 40 h de leur contenu réel. Quand Chirac dit « les 35 h c'est un acquis social » et les vide de leur contenu, il fait exactement pareil. Mais Pétain, c'était le fascisme et la guerre alors qu'en 2005, la France en paix n'a jamais été aussi riche, aussi productive, aussi capable de redistribuer les richesses créées si ses décideurs le voulaient.

    Raffarin prétend agir pour un « contrat 2005 » « au nom de l'emploi » alors qu'il détruit justement des emplois !

    L'augmentation du temps de travail a pour résultat une nouvelle augmentation du chômage. Les premiers à retomber dans le chômage total seraient les intérimaires. Pourquoi embaucher, même temporairement, si on peut faire accomplir des heures supplémentaires, mal ou pas payées, quand on veut ?

    Le baron Sellières peut se réjouir en quitant la tête du Medef : il a presque gagné la guerre qu'il avait déclaré en 1997 à Lionel Jospin et qu'il a pu mener à bien après le 21 avril 2002. Il n'aura pas obtenu de supprimer la durée légale, mais une forte augmentation de la productivité, des forfaits, de la flexibilité, le tassement des salaires, 20 milliards d'exonérations de cotisations sociales par an, la hausse du chômage permettant de terroriser les travailleurs. Sans compter le discrédit de l'idée de la réduction du temps de travail et des partis de gauche.

    On compte dans notre pays 3 millions de chômeurs officiels, 1 million de chômeurs non inscrits, 1,6 millions travailleurs en Cdd ou en intérim, plus de 2 millions de salariés à temps partiel non choisi. Au total 7 à 8 millions de personnes souffrent de l'absence d'emploi ou du sous-emploi. Près d'une personne sur trois.

    Comment des dirigeants peuvent-ils oser faire la leçon, dire à ceux qui ont un emploi à temps plein qu'il faut travailler davantage pour accroître la richesse produite quand tant de personnes voudraient bien travailler à temps plein toute l'année ?!. Comment osent-ils faire miroiter un supplément de gain à des travailleurs, quand leurs parents, amis ou voisins sont réduits au Rmi, Rma, à la soupe populaire ou à 600 euros par mois pour cause de temps partiel ou d'emploi précaire ?

    Une nouvelle réduction du temps de travail par la loi est incontournable

    Parti socialiste et Parti communiste, Verts s'engagent dans la préparation de leurs programmes. Ce n'est pas parce que la précédente tentative de reduire le temps de travail est mise en cause qu'il faut renoncer ; bien au contraire il faut persister, mais cette fois en étant précis sur les contenus, en écartant tout ce qui empêche la sécurisation de l'emploi pour tous et en se dotant des moyens financiers et des pouvoirs pour atteindre cet objectif .

    Gérard Filoche, Sylvian Chicote

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