Le troisième paquet de libéralisation de l’énergie à été adopté à Strasbourg
Les directives de libéralisation ont organisé le secteur de l’énergie selon
le principe de « séparation fonctionnelle » entre la production et la gestion
du réseau de distribution et de transport.
Cette politique a pour but de démanteler les monopoles publics pour ouvrir
ces marchés juteux aux capitaux privés, avec pour conséquence, à terme, la
constitution de monopoles privés.
La conséquence, en France, en est la privatisation d’EDF et la fusion GDFSuez.
Mais la Commission de Bruxelles en veut plus et plus vite. Elle
demande donc la séparation totale entre production et réseau. En effet, elle
estime que la séparation des fonctions n’est pas suffisante et donne trop
d’avantages concurrentiels aux opérateurs historiques qu’elle veut pousser
au démantèlement pour accélérer leur recherche de capitaux privés, et réaliser
ainsi leur privatisation totale. C’est ce que la Commission appelle supprimer
le favoritisme envers les entreprises non séparées au détriment du
consommateur final et salariés des entreprises concurrentes. Quand on sait
que plus le poids des actionnaires sera grand, plus la quantité des dividendes
versés sera importante et plus les prix seront lourds, on peut apprécier
le souci manifesté à l’égard du consommateur final et des salariés…
À l’intention du Parlement européen, la Commission sait qu’elle doit radicaliser
sa proposition pour que les négociations sur le texte aboutissent au
compromis qu’elle souhaite et pour que ce « recul » autorise beaucoup de
députés de la gauche à voter le texte final. Avec cette petite tactique habituelle,
le résultat obtenu est soutenu par la gauche. En outre, dans le cas où
cette directive est adoptée avec des voix de la gauche à proximité des prochaines
élections, tous ceux qui l’ont approuvée s’abstiendront de la dénoncer
durant la campagne électorale. Celle-ci se déroulera alors de façon très
consensuelle et ennuyeuse, ce qui favorisera la droite en l’absence des propositions
attendues par les salariés et capables de les mobiliser.
Cette tactique classique des libéraux a connu une grande réussite le 24 mars
2009 puisqu’une large majorité a approuvé le « compromis » négocié avec
une très forte majorité des députés du Parti socialiste européen (PSE).
Le texte adopté mentionne toujours la voie de la dissociation totale entre
production et réseau mais les Etats pourront lui préférer d’autres options,
l’indépendance du gestionnaire de réseau de distribution ou celle du réseau
de transport. Selon l’une quelconque de ces trois options, au moins une partie
du réseau disposera d’une indépendance totale à l’égard de la production.
C’est déjà ça de gagné pour les investisseurs.
Comment la direction du PS justifie-t-elle ce vote ? Par une argumentation
qui ne prétend pas à la cohérence : « Les libéraux nous proposent d’accentuer
la destruction des services publics nationaux, c’est inadmissible. Mais
nous avons négocié et ils nous ont proposé un compromis que nous avons
accepté. En effet, si ça empire, ça aurait pu être pire encore».
Pour se faire rouler ainsi dans la farine, il faut avoir perdu beaucoup de
convictions. Ceux qui se révèlent ainsi usés portent tort à toute la gauche
car, lors des élections européennes du 7 juin, il faut que les listes du PS
soient devant celles de l’UMP si nous voulons empêcher Sarkozy de relever
la tête, alors qu’il est en difficulté face à un mouvement social très
mobilisé qui doit pouvoir utiliser cette échéance pour sanctionner la droite
au pouvoir. Que ceux qui ne savent pas s’opposer au libéralisme cèdent la
place à des militants qui ont des convictions et du courage pour les
défendre.
Félicitons ceux qui ont refusé de voter « pour », Henri Weber qui n’a pas
participé au vote, Benoît Hamon et Harlem Désir qui se sont abstenu et, surtout,
Marie-Noëlle Lienemann et Anne Ferreira qui ont voté « contre ».
Au lieu d’une libéralisation aggravée de l’alimentation en énergie, le droit
d’accès de tous à l’électricité et au gaz domestiques exigent l’édification
d’un service public européen de l’énergie, similaires aux services publics
nationaux de GDF et EDF, que les libéraux s’acharnent à détruire.
En premier lieu, GDF et EDF doivent être nationalisés et doivent abandonner
le politique impérialiste d’achat de firmes étrangères et de placements
spéculatifs.
Pierre Ruscassie