GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Le revenu universel d’existence

Cet argumentaire de notre camarade Pierre Ruscassie, concernant le revenu universel d’existence (RUE), est paru dans la revue Démocratie&Socialisme n°235 de mai 2016.

Pour permettre à chaque personne de subvenir à ses besoins vitaux élémentaires, quels que soient ses revenus, celles qui disposent d’un revenu trop faible devraient avoir droit à une aide de l’État. Cette aide est alors un revenu complémentaire qui peut garantir à la personne le revenu considéré comme minimum, auquel tout le monde a droit. C’est une forme de redistribution des richesses qui bénéficie à la catégorie la plus pauvre de la population, mais qu’il ne faut pas confondre avec le service de protection sociale qui constitue un système d’assurance financé par cotisations.

Il existe en France toute une panoplie d’aides sociales : ASS, AAH, APL, RSA, diverses allocations… Il est tentant d’étendre ce revenu complémentaire à toute la population et de le transformer en un revenu de base attribué sans condition. À lui seul, il attribuerait à la personne le revenu considéré comme minimum et remplacerait la panoplie d’allocations diverses. Les autres revenus (du travail, de placement…) viendraient en plus.

Serait ainsi établi un « revenu universel d’existence » (RUE) qui permettrait de survivre tout en étant au chômage, bien qu’en vivant dans l’austérité. Selon ceux qui prétendent que reste chômeur qui le veut bien, il n’y aurait plus de raison de déplorer le manque d’emplois. C’est pourquoi l’instauration du RUE est surtout souhaitée par ceux qui considèrent que ce volant de chômage est nécessaire pour maintenir à la baisse le coût de la force de travail ! C’était l’opinion des principaux partisans du néolibéralisme, qui refusaient la réduction du temps de travail, en premier lieu Milton Friedmann et Friedrich von Hayek. C’est, par exemple, le cas de Christine Boutin et d’Alain Madelin. Mais son instauration est aussi attendue par les sceptiques qui ne croient plus qu’on puisse réduire le chômage de masse installé depuis plus de trente ans. C’est pourquoi le RUE a trouvé des partisans à gauche : c’était le cas d’André Gorz.

Si on voulait lui donner un montant vraiment suffisant pour subvenir aux besoins vitaux, le RUE présenterait le risque de couper la société en deux parties à la coexistence conflictuelle : d’un côté les assistés, bénéficiaires du seul RUE, et de l’autre les actifs, bénéficiaires du RUE et d’un revenu d’activité. Mais ce dernier serait forcément peu élevé car victime d’un prélèvement important pour financer un RUE distribué à tout le monde. Le revenu du travail serait peu attractif. C’est pourquoi le caractère universel du RUE le contraindrait à être d’un faible montant, très insuffisant pour répondre aux besoins vitaux. À productivité égale, moins il y a de travailleurs, moins de richesse est produite, puisque seul le travail est productif. Et moins de richesse est alors redistribuée.

Des revenus complémentaires ont été expérimentés dans divers pays. Mais, sauf en Alaska, ils n’ont pas le caractère universel d’un RUE, ils sont versés sous conditions et concernent un public restreint, comme toutes les allocations spécifiques. En Alaska, le RUE est très faible (moins de 200 euros par mois) et n’est pas disponible immédiatement ; c’est une épargne forcée qui ne peut pas assurer l’existence de son bénéficiaire.

Il s’avère qu’il faut choisir entre le caractère universel de ce revenu et la satisfaction des besoins vitaux. C’est pourquoi, pour en finir avec la misère, il n’y a pas d’autre solution que d’en finir avec le chômage de masse.

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