GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Le projet de la droite pour l'école

La convention nationale de l'UMP sur l'école a décliné les axes présents et à venir de la politique libérale sur l'école. N Sarkozy y a présenté son programme de dérégulation et de remise en cause du service public d'éducation avec le soutien affirmé de G de Robien. Il n'y aura sur le sujet pas de « rupture » mais une accentuation des choix actuels. Ils sont déjà une véritable remise en cause libérale.

Sus aux « pédagos »

Les « experts pédagogues » ( Le Bris, Belosta...) promoteurs des théories les plus conservatrices sur l'école, très présents dans le débat sur la lecture, ont développé les axes d'une politique éducative globalement régressive, qui renonce à éduquer, s'attaque à la démocratisation scolaire, vise au développement de « l'entre soi », à la ghettoïsation scolaire et à la ségrégation sociale, légitimée par les aptitudes individuelles : socle commun réduit à des savoirs « fonctionnels » déconnectés de la culture qui leur donnent sens ; appel à l'ordre, réduit à la présence policière dans les écoles, alors que le manque de CPE, d'infirmières scolaires, d'assistantes sociales, de conseillers d'orientation, d'enseignants, sont criants dans tous les établissements. « Chacun son travail » a dit de Robien, niant ainsi l'efficacité de la mobilisation des équipes et renvoyant chaque enseignant dans sa classe avec, en prime, la culture du résultat, la rémunération idoine, et l'attaque contre les statuts visant à l'individualisation. La LOLF sera d'une aide précieuse dans ce mécanisme de déréglementation et permettra de la présenter comme un processus neutre visant à une meilleure efficacité de l'institution. Qualité, culture du résultat et démarche managériale sont à l'ordre du jour.

Les attaques de la droite contre le « pédagogisme » n'ont rien de républicain. On peut débattre des dérapages du « constructivisme » des « pédagogies nouvelles », de leurs effets sur les inégalités scolaires, de la nécessité de partir de la définition des savoirs qu'il s'agit de transmettre à tous les élèves, et de mettre en œuvre des pédagogies explicites. La didactique n'en reste pas moins incontournable à toute démarche de démocratisation. Pour la droite, il s'agit de renvoyer la responsabilité des difficultés sur les enseignants eux-mêmes, en remettant en cause leur professionnalisme. Le débat sur la lecture montre qu'il y a une volonté du ministre de manipuler l'angoisse des familles, d'éluder la question sociale en rejetant les difficultés sur des questions de méthodes et d'incompétence des pédagogues. Dans une situation de crise, cela peut fonctionner, particulièrement si les réponses ne sont à la hauteur de l'attaque et de l'enjeu.

Démocratisation scolaire ou ségrégation libérale, voilà l'enjeu. Droite ou gauche. Cela montre la responsabilité du PS dans la définition de son projet. Il ne peut y avoir d'alternance, il faut une alternative. Sarkozy est explicite. Ses axes sont clairs, l'autonomie et la liberté. En langage libéral, cela veut dire des politiques précises :

Il ne faut plus aider les territoires, il faut aider les personnes.

L'échec scolaire est une affaire d'individu. Les difficultés scolaires sont un facteur de relégation sociale. Sarkozy prône alors le rétablissement de l'égalité des chances et de l'ascenseur social. Chacun doit pouvoir, formellement, avoir sa chance dans la jungle libérale. Que les meilleurs gagnent, et tant pis, si ce sont toujours les mêmes. L'autonomie des établissements, « facteur clé de la réussite » doit permettre une offre scolaire variée et mieux adaptée aux élèves ( 20% du budget contre 3% actuellement). Il s'agit de permettre la suppression de la carte scolaire, afin, évidemment, de donner la liberté de choix aux familles. Il faut supprimer les ZEP et ouvrir de nouveaux établissements privés sous contrat dans les quartiers. Les dérapages de De Robien sur l'école privée n'en étaient pas. Il y a une volonté d'amplifier la concurrence et la marchandisation de l'école sur le modèle du privé.

Il faut adapter l'école "aux besoins de notre temps"

Pour le lissage et la bonne présentation du discours, on rajoute le développement du sport à l'école, l'intégration les enfants handicapés dans les classes, l'objectif que tous les élèves deviennent bilingues. Il s'agit surtout de mettre les établissements en concurrence. L'expérience de Paris, où la carte scolaire a été assouplie, en supprimant de fait les secteurs, n'a fait que confirmer et renforcer les phénomènes de concurrence entre établissements, avec la promotion des uns et la marginalisation, des autres. Et ceux qui en profitent sont toujours les mêmes, ceux qui savent et peuvent s'y retrouver. La difficulté avec les grands nombres c'est qu'ils finissent toujours par démontrer que les individus sont le produit de déterminations multiples et que les différenciations sociales sont très prégnantes !

La politique préconisée par Sarkozy est dans la continuité de celle menée par Villepin/De Robien. Il s'agit d'une politique qui a et aura pour effet d'augmenter la ségrégation sociale, qui change de cap par rapport au projet historique de massification et de démocratisation scolaire. Elle vise à s'inscrire dans les « besoins de notre temps », ceux de « l'économie du savoir », de la « société de la connaissance » et de la mondialisation libérale, en bref à s'inscrire dans la marchandisation de l'école et la naturalisation des inégalités par l'égalité des chances et les différences d'aptitudes !

Philippe Verdier

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