GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

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La réforme des lycées fait bouger les lignes chez les lycéens

Devenue organisation largement majoritaire des lycéens dans les années 2000, l'UNL traverse une mauvaise passe, avec une scission qui a engendré la naissance d'une nouvelle organisation d'une part, et le retour sur le devant de la scène de la doyenne FIDL, perdue de vue depuis plusieurs années. La question de la réforme des lycées, et, partant, d'une certaine vision de l'indépendance syndicale structure ces clivages nouveaux.

L'Union Nationale Lycéenne (UNL) est née en 1994 dans un contexte marqué d'une part par le retour de la droite au pouvoir, mais aussi dans la suite d'une série de mouvements lycéens d'ampleur, mené essentiellement par la FIDL, et notamment celui de 1990 qui avait abouti à la création d'instances représentatives des lycéens (CVL) et à leur entrée des au Conseil supérieur de l'éducation (CSE). Sa création est alors liée à une volonté d'une partie des lycéens de disposer d'une organisation qui soit moins marquée à gauche que la FIDL, dont les cadres sont alors proches de la Gauche Socialiste. De fait, l'UNL va bénéficier de soutiens, à sa création, dans les courants situés à l'aile droite du PS et du MJS.

Pour autant, l'UNL ne reste pas, dans les années 2000, qu'une officine de ces courants politiques. Elle conquiert progressivement le terrain que la FIDL, minée par un affaiblissement numérique de ses cadres d'une part, et par les effets de l'explosion de la GS d'autre part, n'arrive plus à occuper. De ce fait, l'UNL acquiert un véritable statut de syndicat lycéen, une orientation syndicale propre, et une assise qui en fait de loin la première organisation de ce type, devenue même hégémonique au niveau national dans la représentation des lycéens. Tissant des liens avec les syndicats enseignants, elle semble capable de mener des actions et joue encore un rôle important dans les mobilisations de l'automne 2008 contre le projet Darcos de réforme des lycées.

Problèmes internes et positionnement vague

Dans ce contexte relativement tranquille, nul ne s'attendait à ce qu'un véritable séisme secoue l'UNL à l'automne dernier. A l'occasion d'un Conseil national chargé d'élire un nouveau président, l'organisation lycéenne se déchire, provoquant le départ de plusieurs responsables nationaux et locaux. Ce qui pouvait apparaître, a priori, comme un simple incident de parcours se transforme en scission prenant d'autant plus d'importance que la direction de l'UNL s'enferme dans une stratégie de déni. Les démissionnaires se rassemblent rapidement et créent une nouvelle organisation, dénommée Syndicat Général des Lycéens (SGL) qui cherche rapidement une reconnaissance par le biais de contacts avec les syndicats enseignants.

Loin de n'être qu'un problème d'appareil, ce remue-ménage recouvre aussi une difficulté de positionnement de l'UNL sur la réforme des lycées. Tiraillée entre, d'une part, ses liens historiques avec des courants bien représentés au sein des syndicats enseignants SGEN-CFDT et SE-UNSA (minoritaires dans le second degré), qui soutiennent la réforme, et d'autre part sa volonté de s'opposer à la politique de la droite, ce syndicat ne parvient pas à définir une ligne politique claire sur la question, conduisant à des votes en abstention lors de l'examen des textes au Conseil supérieur de l'éducation.

Le retour de la FIDL

Profitant de ce flou, la Fédération Indépendante et Démocratique Lycéenne (FIDL) refait depuis surface en affichant une opposition totale et frontale avec la réforme, et appelant les lycéens à l'action dès le 15 décembre. La fédération, née en 1987 dans la foulée de la mobilisation contre la Loi Devaquet, retrouve ainsi un discours audible et se sort d'un enfermement qui l'avait placée dans un tête-à-tête quasi exclusif avec la CGT, très marginale dans l'éducation nationale, puisqu'elle n'y a de forces réelles que dans l'enseignement professionnel.

Le SGL, pour sa part, après une période d'hésitation, choisit aussi son camp. Affichant qu'il trouve certes des « points positifs » dans la réforme, il multiplie les demandes de contact avec la FSU, principale opposante à la réforme au travers de son syndicat du second degré, le SNES. Cette implication lui permet, en l'état actuel, de développer une stratégie d'implantation assez offensive, et ce d'autant plus qu'il argumente sur le thème de l'indépendance syndicale, mettant en avant l'intervention de courants du MJS dans les problèmes internes de l'UNL.

S'il ne faut pas surestimer la représentativité réelle des organisations lycéennes, il ne faut pas non plu prendre à la légère les évolutions de ces derniers mois. Le retour de la FIDL et l'émergence possible du SGL sur la base d'un rejet de la réforme risquent de mettre en sérieuse difficulté l'UNL, et de voir se reposer la question de l'autonomie et de l'indépendance du syndicalisme lycéen... qui n'avaient pas vraiment été posée depuis l'échec des CAL en 1969.

Daniel MARCEAU

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