La Guadeloupe nous montre la voie !
Quelques jours après la grève réussie
du 29 janvier et peu après la curée
politico-médiatique qui a entouré le
mouvement des cheminots de Saint-
Lazare, dont « les médias français se
sont fait l’écho avec beaucoup d’insistance
[...], il est étrange de constater le
silence relatif qui entoure la grève
générale en Guadeloupe »... Alors tout
a commencé le 20 janvier, ils ont été
très peu à rendre compte de ce mouvement
unitaire alors même qu’il s’approfondissait
de jour en jour. Parallèle
à la mobilisation métropolitaine il a
pourtant l'avantage d'être revendicatif
et illimité dans le temps, et il est
conscient que, face à ce gouvernement
de guerre sociale, seul un rapport
de force durable peut faire
pencher la balance du côté des salariés.
Le mouvement de grève a été lancé
dès le 20 janvier par des organisations
syndicales qui n'ont pas attendu le feu
vert de leurs directions nationales, vu
l'ampleur du malaise local. Les
Antilles françaises subissent en effet de
plein fouet le phénomène de “vie
chère”, ce mal endémique que toutes
les composantes de l'opposition
reconnaissent comme l'ennemi public
n° 1. Ainsi, s'est créé le collectif
“Lyannaj Kont Pwofitasyon” (rassemblement
contre les profiteurs), qui
regroupe aux côtés des confédérations
syndicales, les puissants syndicats
indépendantistes guadeloupéens, les
partis de gauche et des mouvements
culturels créoles à l'influence grandissante.
La plateforme du collectif unitaire
tient en 4 pages et, parmi les 126
propositions faites, celle qui exige
d'augmenter le SMIC et les minima
sociaux de 200 euros, est sans conteste
la plus emblématique, tant le problème
de la précarité se pose dans les
départements antillais. Ce mouvement
est devenu historique, car la mobilisation
a atteint 100 000 manifestants sur
une population de 450 000 : piquets
de grève, blocage de l'île réalisé sans
aucune violence (ce que même les
observateurs “respectables” sont obligée
de reconnaître), démonstrations
populaires qui ont atteint 60 000 travailleurs
dés le 30 janvier (à titre de
comparaison, Pointe-à-Pitre ne dépasse
guère les 20 000 habitants) et
contrôle démocratique des salariés,
puisque les négociations avec les pouvoirs
publics sont retransmis en direct
à la télévision... La mobilisation des
Guadeloupéens est un mouvement
majoritaire, démocratique, responsable,
bref, tout ce que la presse aux
ordres exècre. Pas étonnant que le
silence radio soit de mise !
La revendication qui fait fuir le secrétaire
d'Etat à l'Outre Mer et fait frémir
le gouvernement c’est « 200 euros
pour tout le monde, tout de suite,
maintenant » ! Pourquoi Yves Jégo se
serait envolé en vitesse, une fois prévenu
de cet accord conclu entre le
collectif unitaire et le patronat de l'île,
si ce n'est parce qu'il en avait peur ? Le
séjour opportun du larbin de Sarkozy à
la Réunion n'a abusé personne. Cette
pitoyable diversion avait simplement
pour but de faire pourrir le mouvement
qui secoue les Antilles. Car 200
euros à Pointe-à-Pitre aujourd'hui, ce
n'est pas seulement cela. C'est 200
euros demain en Martinique ! Après-demain,
c'est 200 euros chez les
ouvriers de Renault et chez ceux de
Gandrange ! C'est cette contagion qui
fout la frousse aux puissants de ce
monde. Ils le savent : leurs pères l'ont
déjà vu en 1936, et le souvenir de ce
“virus” qui ravagea la France en ce
beau mois de mai 1968 les réveille
encore la nuit...
En soutien à la grève générale guadeloupéenne,
un appel martiniquais a
déjà suscité une manifestation massive,
qui s'est tenue à Fort-de-France le
2 février dernier. « 200 euros pour tous
les salariés, c'est le mot d'ordre unifiant
», le sésame à même de mobiliser
définitivement notre camp social. Les
sarkozistes cherchent encore à nous
vendre jusqu'à plus soif leur “relance
par l'investissement”, alors que la plupart
de ces projets étaient déjà dans
les cartons depuis des mois. Nous,
nous défendons la seule relance possible,
la relance par la hausse du pouvoir
d'achat, car la consommation des
salariés est la seule stimulation, dans
un monde où celle des rentiers est
insuffisante et où l'endettement des
ménages est devenu une fable pour
enfants.
Il est de notre responsabilité à tous de
diffuser ce mot d'ordre, de défendre
cette revendication qui donne
confiance à notre classe et affaiblit le
camp d'en face, comme les “8 heures”
l'ont fait il y a un siècle.
Mais les lendemains qui chantent ne
sont pas forcément assurés. Plusieurs
appels antillais dénoncent à juste titre
l'arrivée dans l'île de 4000 militaires/
gendarmes/CRS, armés jusqu'aux
dents. Des chars d'assauts, des
minutions, des cercueils en plastique,
des vivres ont également été acheminés
en même temps que ces forces de
répression”. Depuis le départ de Jégo,
le préfet a quitté la table des négociations,
en menaçant les dirigeants du
mouvement...
Il faut soutenir la grève générale
antillaise, car elle peut nous montrer la
voie ! La seule solution est de prendre
les devants afin que la revendication
des 200 euros fasse tâche d'huile.
D'ailleurs, qu'ils osent toucher à un
cheveu de nos camarades, et ce sera
l'explosion générale !
Jean-François Claudon 13/02/09