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La France, économiquement désirable

Les statistiques officielles contredisent bien des discours. Car le thème de la baisse d'attractivité était devenu récurrent dans le débat politique français.

Le débat sur le manque d'attractivité de la France, cheval de bataille de la majorité, du Premier ministre et du président de la République, pourrait bien tourner court. Car, quoi qu'en dise le Medef, il semble bien que l'Hexagone ait les qualités requises pour attirer les investissements étrangers. Mardi, le ministère de l'Economie et des Finances et la Banque de France ont publié conjointement les statistiques de la balance des paiements en 2002. On y apprend que, l'année dernière, les investissements directs étrangers en France (qui mesurent, en gros, les prises de participations et les rachats dans des entreprises françaises, et les créations d'entreprises par des étrangers) s'élèvent à 49,8 milliards d'euros. C'est certes moins qu'en 2001 (58,8 milliards), mais cela demeure une fort bonne performance, dans la moyenne des cinq dernières années, les meilleures que la France ait jamais connues. Hier, Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l'Assemblée, jubilait : «Une nouvelle fois, monsieur Raffarin est pris en flagrant délit de maquillage des chiffres et de la réalité. Il ternit l'image de la France dans le monde en alimentant l'idée d'un pays déclinant au plan économique.»

Sagesse. De fait, la France reste dans le trio de tête des pays d'accueil des investisseurs, derrière les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Fin janvier, la Banque de France avait d'ailleurs dressé une véritable ode au dynamisme du site France : «L'économie française a atteint au cours de ces dernières années un excellent niveau de compétitivité» vis-à-vis de tous ses partenaires, qu'ils se trouvent à l'intérieur ou à l'extérieur de l'Union européenne. La Banque de France attribue cette réussite à la sagesse, depuis quinze ans, des salaires et des prix.

Les statistiques officielles contre disent bien des discours. Car le thème de la baisse d'attractivité était devenu récurrent dans le débat politique français. Mardi matin, le président du Medef, Ernest-Antoine Seillière, avait tenté d'expliquer ainsi la baisse de la croissance, et les plans sociaux : «Les entrepreneurs sont motivés, mais la compétitivité et l'attractivité de notre pays ne sont pas fortes et, de ce fait, il existe des tendances à la recherche du moin dre coût, avec des implantations à l'extérieur, dans les services comme dans le secteur manufacturier.» Sans doute se sentait-il conforté par des déclarations récentes au plus haut niveau de l'Etat : lors du Conseil des ministres du 12 février, le président de la République avait engagé le gouvernement à «mettre fin au recul, constaté depuis quel ques années, de la capacité de la France à attirer les capitaux étrangers et à garder les salariés les plus qualifiés». Le Premier ministre, le lendemain, y revenait dans Paris Match : «Nous payons le déclin de l'attractivité de la France.» Dû, évidemment, à la politique de la majorité précédente. Seul Francis Mer semblait garder un regard lucide : le ministre de l'Economie avait qualifié de «bidon» une étude du forum de Davos, publiée en novembre, plaçant la France au 30e rang mondial. Une contre-performance abondamment commentée par la majorité UMP.

Handicap. Le Premier ministre, il est vrai, suit ce thème depuis plusieurs mois. Dès l'automne 2002, il demandait au Conseil économique et social (CES) de l'éclairer sur ce sujet. Ce qui a donné lieu à une belle empoignade, les patrons voulant à toute force faire reconnaître les lois sociales, et notamment les 35 heures, comme un handicap de la France dans la compétition mondiale. Finalement, le CES a accouché, fin janvier, d'un avis presque vide, recommandant au gouvernement de «diminuer les lourdeurs administratives». Plus récemment, la majorité s'est emparée du sujet pour justifier, à l'occasion du débat sur la loi Dutreil, les exonérations de l'ISF pour les sommes investies dans les entreprises. A trop en faire, le gouvernement pourrait s'attirer des coups de bâton. L'arroseur arrosé, en somme.

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