GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

La bataille politique derrière les jeux de personnes au PS

Il est dorénavant probable qu’il n’y aura pas de majorité avant le congrès du PS. Est-ce une si mauvaise nouvelle ? non, pas forcément si cela signifie que la ligne mi chèvre mi chou antérieure ne peut plus être reconduite. Une conduite au centre qui ne tranche sur aucune des questions sociales centrales est devenue paralysante. Aussi peut-on regarder derrière les « blocs » qui se constituent, se font et se défont, les principales questions politiques en jeu.

C’est un peu comme la dérive des continents, il y a des glissements de plaques tectoniques, des rapprochements, des distanciations significatives.

Au moins sur les questions centrales qui nous semblent le plus lourdes de conséquences, on peut y voir clair. Si on admet que la pression sociale travaille les fondations de ce parti, que le sarkozysme est rejeté en profondeur, et que cela a des effets souterrains encore non visibles.

Une grande ile qui dérive :

C’est la future motion de Ségolène Royal : si jusqu’au bout, elle résiste a toute alliance, elle glissera sur le côté, un peu hors la vie du parti, de ses racines, de son histoire, elle aura une certaine forme d’étrangeté plus que de nouveauté, elle incarne une campagne droitière qui n’a pas permis et ne permettra pas de gagner à l’avenir. Tous les messages envoyés sur les questions sociales fondamentales (salaires, 35 h, retraites, fiscalité…) sont négatifs. Elle veut conquérir par la force la direction mais elle ne pourra le faire et tant mieux, ce parti est en difficulté mais pas au point de perdre tout sens collectif et de se faire hara-kiri. Il y a un siècle d’histoire qui ne peut être balayé par « aimez-vous les uns les autres » ni par le renoncement explicite aux 35 h, aux 1500 euros, et la soumission à la retraite par point du Medef. Plus l’alliance quasi suicidaire avec Bayrou.

Cela devrait tellement apparaître qu’il se peut que l’intéressée s’en rende compte et fasse finalement un compromis de dernière minute.

Un grand bloc central :

C’est ce qui motive toujours François Hollande qui veut le construire au moins avec Bertrand Delanoé et avec Jean-Marc Ayrault. C’est recréer une « stabilité » sans trop trancher dans le vif, assurer de l’autorité et marcher au millimètre. C’est un appel à la défense et à la restauration de l’autorité de l’appareil central. Mais le maire de Paris, après son fiasco « socialiste et libéral » est-il le mieux placé ? Certes, il ne veut d’alliance avec le Modem, mais le contenu social de son discours est bien faible et ne tranche guère avec le passé. Julien Dray juge que ce bloc central est un peu court et ne sera pas « suffisant » si Ségolène Royal ne s’y rallie pas, mais pour la place du chef, il est certain que Bertrand Delanoë n’est pas prêt de la lui laisser, ce qui ferme bien des portes au « bloc central ». Tant que la nécessité ne s’impose pas… Mais ils vont sentir la nécessité de « gauchir » s’ils veulent capter les voix des militants, et peut-être de s’allier plutôt que de tout perdre séparément. Si le bloc central « s’élargit » pour capter à tout prix une majorité, il en paiera le prix en retour de confusion, et de non-dits.

Les reconstructeurs sont tirés par les deux bouts :

C’était un grand pari que de vouloir tenter, contre le duel médiatique Ségolène-Delanöe, de créer un « grand ensemble, » allant des amis de DSK à ceux de Laurent Fabius, sachant qu’aucun des deux n’était en situation actuelle d’être présidentiable mais aucun n’y renonçait pour l’avenir.

Donc le poids de leurs proches était décisif dans l’organigramme des reconstructeurs en attente de la phase suivante.

L’image pratique, unitaire, sage, qu’ils ont tenté de se donner contre le présidentialisme immédiat, en défense du parti collectif, masque qu’il n’y a pas de « fond ». Car quels points communs entre les strauss-kahniens et les fabiusiens ? sur l’Europe, sur l’union de la gauche, sur le programme social, autant certes qu’entre CFDT et CGT…mais autant de différences aussi ! Du coup, ils ont mis de part et d’autre, en sourdine, le fond pour privilégier le flou, il y a du magma dans cette plaque tectonique ! Ne cherchez pas de réponse sur le partage des richesses, elles ne figurent pas dans leurs textes.

Avant l’été, Pierre Moscovici tirait à fond sur la droite, recherchant l’accord avec « Ligne claire » un texte droitier - justement pas clair- des grands barons comme Collomb, Guerini, Valls. Ce faisant, croyant bien défendre DSK, Moscovici commit la faute d’exiger la mise à l’écart des fabiusiens en termes violents : « pas de passagers clandestins, un accord à deux avec Martine Aubry, pas un accord à trois ni a deux et demi ». Cette exclusive lui aura été fatale car son « ami » Cambadélis lui, a compris bien qu’il fallait viser plus large et non pas refermer le jeu pour parvenir à contrer les vedettes Royal-Delanoé. Exit brutalement Moscovici, et recentrage léger à gauche avec Martine Aubry si elle acceptait de tenir ce rôle central et ingrat de première secrétaire. Elle accepte. Montebourg, noyé dans tout cela, après avoir appelé Moscovici à Frangy le lâche à La Rochelle, pour lui, la tactique devient labyrinthe. Le contenu politique est indécis. Le but à peine caché est que l’équilibre des forces pour 2011 ne soit pas tranché entre les deux hommes.

Laurent Fabius pour confirmer la mise à l’écart de Moscovici, adoube Martine Aubry, et la rétablit dans un centre à mi-chemin entre, à droite les strauss-kahniens, et à gauche les fabiusiens. Nous voilà avec un autre « bloc central » n°2, une autre plaque tectonique qui essaie d’occuper le même terrain que celle de Delanöe-Hollande.

Le coté droit se détache ou s’attache ?

Moscovici, looser, dégagé brutalement par les amis de Cambadélis qui l’avaient pourtant mis en selle, a essayé de reconstituer un bout de continent avec Valls, Collomb, Guérini. On leur souhaite du plaisir, car ils sont autant marqués à droite que le fut Bockel dans le passé. Ils essaient de revenir dans le bloc central n°2, des mains leur sont tendues pour renforcer le côté droit de celui-ci, mais il y a des rancœurs et des aigreurs apparues en cours de route. Leur retour est devenu plus difficile après l’installation des fabiusiens dans ce cercle. En tout cas, Moscovici ne peut prétendre le diriger. Le centre du bloc n° 2 est moins accueillant après la Rochelle qu’avant. Il s’est déplacé légèrement au centre gauche.

Reste le côté gauche :

Disons le, des dizaines de milliers de militants sont choqués, ulcérés par ces manœuvres trop visibles de glissement de ces « continents ».

Si la gauche de ce parti, depuis l’été, avait su se regrouper et s’organiser, publiquement et avec force, (entre Benoit Hamon, Marie Noëlle Lienemann, Jean Luc Mélenchon, Marc Dolez et nous - pour aller vite et en personnalisant un peu trop facilement) elle aurait tout de suite pesé davantage sur les opérations. Car nous sommes certains qu’une gauche sociale et combative, pèse de 15 à 25 % des voix, surtout si elle s’organise bien et si son texte est bon. Nous avons essayé, par des rencontres les 2 juillet, avec Benoit et Marie Noëlle, le 25 juillet avec Jean-Luc Mélenchon, de faciliter le processus.

Mais même de façon chaotique il semble qu’il se dessine. Un accord à deux, à trois, à cinq, sans préjugé ni exclusive, ferait un nouveau bloc tirant à gauche l’ensemble des continents ce qui aurait pour effet que le bloc central le plus important dans le futur vote des militants, en aurait absolument besoin au congrès pour disposer d’une majorité.

Ce serait ainsi que la gauche socialiste pourrait commencer à se faire entendre, obtenir du poids, et devenir indispensable de la nouvelle majorité. Rédiger une motion de gauche, construire une cohésion, un travail en commun collectif et loyal autour, est donc, selon nous, la première nécessité. Nous en avons discuté positivement avec Benoit Hamon à La Rochelle, et espérons concrétiser tout cela tous ensemble le plus tôt possible.

Ce serait cela la vraie nouveauté du congrès de Reims, c’est qu’il y ait une gauche socialiste et qu’aucune majorité ne puisse faire sans elle !

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