GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Intervention de Gérard Filoche sur le projet socialiste


Discours de Gerard Filoche au conseil national... par PartiSocialiste

Nous devons nous féliciter d’avoir un projet qui rassemble tous les socialistes. Car, sans l’unité des socialistes et de toute la gauche, rien de grand ne s’est jamais fait et ne se fera jamais dans ce pays.

C’est un projet « socialiste ».

C’est un projet de « changement ».

Et il y en a tellement besoin après cinq ans de misère sarkozyste, que les salariés et les électeurs de gauche y trouveront des raisons d’espoir.

Sarkozy c’est le pire que nous ayons eu à subir dans les décennies récentes. Le plus anti-social des présidents. Une catastrophe. Je ne dis pas, moi, « qu’il n'a pas tenu ses promesses », il les a hélas toutes tenues, c’est un intégriste néolibéral, thatchérien, reaganien, et il a fait tous les ravages qu’il avait annoncés. Plus même, puisqu’il a pillé les retraites qu’il avait promis de ne pas toucher et qu’il a privatisé EDF qu’il avait juré de ne pas privatiser. Il s’agit de reconstruire.

Et quand on lit le texte du projet socialiste, on sait qu’on rompt avec le sarkozysme et qu’on revient dans le bon sens.

C’est important pour les salariés que nous disions que nous allons abroger la loi 2010 sur les retraites et que nous allons revenir à l’âge légal de 60 ans. C’est décisif.

Les électeurs n’aiment pas les grandes phrases, ils ont raison, ils cherchent à juger sur des actes, des chiffres, du concret.

Il y a eu 8 millions de manifestants et 75 % de l’opinion pour cela. Nous sommes attendu là-dessus. C’est le test.

Bien sûr, je sais qu’il y a discussion sur le nombre d’annuités de cotisations. Mais nous disons que nous verrons avec les partenaires sociaux, donc les syndicats. Nous devons les entendre. Je suggère que nous partions, comme le disait Michel Sapin ce matin, du « réel ». Il n'a pas dit du réalisme, mais du « réel » en soulignant le mot. Le « réel » en matière d’annuités de cotisations, c’est que Balladur, Fillon et Sarkozy en dix-sept ans, nous ont fait passer de 37,5 annuités à 42 annuités pour avoir une retraite à taux plein. Mais le « réel », dans la vie « réelle », c’est que, en France, les salariés cotisent en moyenne 36,5 annuités. Cela n’a pas augmenté depuis 17 ans, cela a baissé. Et entre 36,5 annuités et 42 annuités l’écart est de 6 ans. Ils disent « cotisez 42 », et « en pratique on cotise 36,5 ». Ils font sauter les gens à la perche sans perche.

Le seul résultat est une baisse massive du niveau des retraites. On ne peut avoir un tel écart.

D’autant que le maintien des plus vieux au travail, ça ne marche pas. Non seulement ça ne marche pas, mais ça recule : l'an écoulé, il y a eu 21,5 % d'augmentation du chômage chez les plus vieux. Alors je suggère de nous en tenir prudemment à la vie réelle et pas aux objectifs abstraits, inatteignables et non atteints que la loi prétend fixer : je ne suis pas pour qu’on chasse les gens du travail à 53, 54, 55 ans, s'ils sont en compétence et peuvent travailler sans pénibilité. Dans le bâtiment, je précise que je suis pour la retraite à 55 ans, mais là où c’est possible, au lieu d’être licenciés avant l’âge, les salariés doivent pouvoir continuer, et si la moyenne réelle passe à 37, puis à 38, puis à 39, puis à 40 annuités prenons-la pour référence, mais la moyenne réelle, pas la moyenne abstraite et fausse !

A propos du chômage : on a 5 millions de chômeurs, 5 millions le record absolu. Sarkozy est allé chercher le chômage et la misère avec les dents. Le projet socialiste propose 300 000 emplois jeunes dont 100 000 la première année. C’est bien. Mais il reste combien de chômeurs ? 4,7 millions. Or, ce n’est pas la croissance qui réglera le problème. Je suis d’accord avec Pierre-Alain Muet : ce n’est pas la croissance qui crée l’emploi c’est l’emploi qui crée la croissance. L’emploi, ça se crée, ça se commande : le droit DU travail crée du droit AU travail.

Impossible de réduire le chômage de masse sans réduire le temps de travail. C’est la deuxième raison pour laquelle, les salariés (en France, ils sont 93 % de la population active) vont apprécier notre projet : nous proposons d’abroger l’essentiel du mal sarkozyste, la loi TEPA, les heures supplémentaires (4,4 milliards) payées par l’Etat aux patrons, qui font travailler deux fois plus ceux qui ont un boulot à la place de ceux qui n’en ont pas. Dans la vie réelle, la durée du travail, réelle est de 41 h : il faut rapprocher cette durée réelle du travail de la durée légale de 35 h. C’est ce que le projet socialiste propose : avec des heures supplémentaires rendues plus coûteuses que l’embauche, avec un repos hebdomadaire (je propose deux jours consécutifs dont le dimanche), abaisser la durée maximale du travail, l’encadrer, la contrôler, c’est créer de l’emploi. Il y a probablement un milliard d’heures supplémentaires dissimulées, pas comptabilisées, pas payées, pas majorées, et c’est l’équivalent de 600 000 emplois à temps plein. Il y a de la marge ! Il y a de quoi faire !

Les salaires, c’est le gros morceau. Il est insupportable que le salaire médian soit de 1500 euros. 50 % de salariés en dessous ! et 8 millions en dessous du seuil de pauvreté, de 900 euros. Le Smic est scandaleusement bloqué depuis 5 ans. Alors que l’inflation est de retour, que tout augmente, transports, gaz, électricité, assurances, tout… Il faut dire à quel niveau de rattrapage on se place. Pour cela je suggère d’écouter les syndicats et le plus important d’entre eux qui défend le Smic à 1600 euros. En 2007 nous défendions 1500 euros, cinq ans après cela semble raisonnable de dire 1600. Par la loi, il faut aligner les minima des conventions collectives sur le Smic. Car, dans le projet socialiste, on dit qu’il faut que les entreprises et salariés s’entendent, oui, mais les patrons ne le veulent pas, ils ne négocient pas, donc il faudra intervenir. Surtout s’il y a une « conférence annuelle sur les salaires ». Car elle existe déjà : chaque année il y en a une, c’est prévu, avant c’était en juin maintenant c’est en décembre avant la fixation du Smic. Mais le Medef ne lâche rien. Il y a les conventions collectives, grilles de salaires, de métiers, de carrière, il faut que l’Etat soit volontaire, car sinon rien ne changera : l’extension des conventions collectives relève de l’Etat, c’est un moyen puissant de pression pour la hausse des salaires.

Dans les salaires il y a l’égalité salariale hommes-femmes : les femmes gagnent en moyenne 27 % de moins que les hommes. Évidemment instaurer l’égalité, c’est une hausse moyenne de 27 % pour une travailleuse sur deux salariés. « A travail égal, salaire égal » est dans les textes depuis trente ans. Les patrons ne le veulent pas et ça ne se fait pas parce qu’il n’y a pas de sanction à la clef.

Je ne crois pas à l’efficacité de la menace de la suppression des exonérations de cotisations sociales. Ça vise qui ? Les petites entreprises aidées de 1 à 1, 3 ou 1,6 fois le Smic ?

Il y a surtout 1000 entreprises de plus de 1000 salariés qui emploient 3,5 millions de salariés et qui produisent 48 % du produit intérieur brut. C’est là qu’il y a les disparités salariales les plus fortes hommes / femmes. D’ailleurs il n’y a que 7 % de cadres supérieurs qui sont des femmes. Je suggère de regarder ce que la droite a fait avec les plus vieux en 2009 : elle a menacé de taxer ces 1000 entreprises de 1 % de la masse salariale si elles ne signaient pas des accords pour le maintien des plus vieux dans l’emploi. C’était en 2009 et la date limite était le 1er janvier 2010 : sous cette menace, elles ont toutes signé, des accords creux et qu’elles n’ont pas respecté, mais elles ont signé. La mesure est plus facile à faire et à contrôler pour obtenir l’égalité salariale entre sexes : si avant le 1er janvier 2013, par exemple, elles n’ont pas instauré cette égalité-la, disons qu’elles seront taxées de 1 ou 2 % de leur masse salariale par an ! Vous verrez qu’elles vont le faire ! Et ça se diffusera dans le million de petites entreprises de moins de 10 qui font travailler elles aussi 3,5 millions de salariés, Commençons par le haut, l’ordre public social se diffusera par le bas…

Les salariés seront aussi contents qu’on défende un salaire maximal. Cela les rassurera sur le partage des richesses que nous voulons faire dans la vie réelle. Pas plus de 20 fois le Smic dans le secteur public. En fait cela devrait être partout. J’avais dit une fois ça à la chaîne parlementaire : alors le patron et l’UMP qui étaient en face de moi se sont écriés : « - Mais c’est Pol Pot ! » J’ai dit « - Non, c’est Roosevelt » car c’est Roosevelt qui a fait cela en 1942, pas de salaires supérieurs à 20 fois le Smic, et au-dessus il a fait une tranche d’impôt qui a raflé tout à hauteur de 88 %. L’UMP et le patron ont réfléchit et m’ont dit : « – Oui, mais c’était une économie de guerre… » J’ai répondu : « – Mais vous dites tous les jours qu’on est en guerre économique ! ».

La précarité : notre projet propose de taxer le travail précaire. Oui. Mais prenons l’exemple de Renault Douai qui faisait travailler 4500 salariés dont 2000 intérimaires. Est-ce un mode de gestion du personnel acceptable ? Leur supprimer les exonérations n’est pas convaincant. Ils y gagnent, avec le système d’intérim au détriment de tous leurs salariés. Le droit du travail doit l’interdire, si on veut de l’emploi ferme en CDI. On ferait mieux de dire qu’il y a un quota de 5 % de précaires (CDD, intérim), pour remplacement de salariés absents ou surcroît exceptionnel de travail. 5 % (sauf dérogation préalable exceptionnelle) et ainsi on prohibe la généralisation du refus des CDI.

De façon générale, il faut savoir qu’on est dans un pays où la chef du patronat, Laurence Parisot, c’est elle qui dirige avec Sarkozy, dit « la liberté de penser s’arrête là où commence le code du travail ». C’est elle qui a fait remplacer une partie du droit collectif du licenciement par la « séparabilité », celle qui a produit la « rupture conventionnelle » soit 250 000 licenciements non motivés par an, de gré à gré, le plus grand plan pas social de ce pays : 500 000 ruptures de contrats depuis deux ans… C’est bien que notre projet veuille contrôler les licenciements indus et boursiers. Il faut abroger et reconstruire le code du travail, c’est un droit intime, quotidien, décisif pour 18,3 millions de salariés du privé. Mais aussi pour les 5 millions de salariés du public qui souffrent pareillement de la mise à mal de leur statut, par un démantèlement équivalent appelé RGPP, les sarkozystes ont fait des ravages depuis 5 ans, ils ont passé le code du travail à l’acide des exigences du Medef, il faut le reconstruire, un vrai code du travail protecteur !

Gérard Filoche

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