GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Actions & Campagnes politiques

Inacceptable !

En annonçant publiquement, au sortir d'une réunion de discussions avec le Gouvernement, son soutien au plan Fillon, la Confédération a commis une triple faute :

  • elle a déserté le terrain de l'action pour nos revendications alors que l'ampleur de la mobilisation du 13 mai montrait que le rapport de forces pouvait aller plus loin ;
  • elle a rompu le front intersyndical en négociant seule dès l'après-midi du 15 mai, alors que la veille elle partageait le point de vue de tous les syndicats jugeant les propositions gouvernementales loin du compte ;
  • elle juge positif un compromis très éloigné des revendications qui sont les nôtres, et qui avaient été largement reprises dans la plate-forme unitaire du 6 janvier ;
  • et ceci sans avoir cherché à réunir les conditions permettant un débat dans la CFDT sur les acquis de la mobilisation, les perspectives et la conduite à tenir.

    Le relevé de décisions gouvernemental ne clôt pas le processus, pas plus que l'approbation du Secrétaire Général de la CFDT. La loi peut être modifiée jusqu'à son adoption, un relevé de décisions n'a même pas la force d'un accord collectif. Le combat continue pour assurer à nos retraites et celles de nos enfants un avenir solidaire.

    La logique du projet n'a pas changé dans la journée du 15 mai : faute de financements supplémentaires, il est difficile d'assurer à davantage de retraités un niveau de retraites convenable. Des avancées sont à mettre au crédit de la mobilisation (et non de la négociation seule), mais on est loin du compte. On reste dans un système majoritairement basé sur la répartition, mais la porte est ouverte plus grande à l'individualisation des retraites et à la capitalisation. La dynamique de la réforme enclenche l'augmentation de la durée de cotisation pour tous au-delà de 41 ans, tandis que la plupart des garanties obtenues se limitent à 2008. Ce sont les salariés qui font les frais de la réforme, les autres revenus ne sont pas touchés. On ne peut pas parler de compromis équilibré.

    Les principales dispositions

    1/ Minimum contributif :

  • l'objectif était : 100 % du SMIC, garanti dans la durée ;
  • l'objectif inscrit dans le projet de loi est qu'après une carrière complète (soit 40 ans jusqu'en 2008) au SMIC, aucune retraite nette ne soit inférieure à 85 % du SMIC net au moment de la liquidation (en intégrant les complémentaires) ; il sera réexaminé dans 5 ans en tenant compte des perspectives financières des régimes ;
  • pour atteindre cet objectif, le minimum contributif sera revalorisé, pour 40 années cotisées, de 3 % au 1/1/2004, au 1/1/2006 et au 1/1/2008 ;
  • actuellement, il suffit d'avoir cotisé 37,5 ans pour que le minimum contributif s'applique et la pension correspondant à une carrière au SMIC est d'environ 82 % du SMIC ; la baisse consécutive aux mesures Balladur est seulement stoppée, en contrepartie de l'allongement de la durée cotisée pour l'obtenir ;
  • la garantie ne vaut que jusqu'en 2008 ; lorsque la durée de cotisation passera à 41 ans, puis davantage, le minimum contributif ne s'appliquera-t-il qu'à partir de cette durée ? quel en sera le montant ?
  • l'indexation de la pension sur les prix risque de faire baisser ce rapport après la liquidation ;
  • la modification par rapport au projet refusé le 15 mai au matin ne porte que sur le calendrier de relèvement du minimum contributif ;
  • 2/ Nombre d'annuités nécessaires pour le taux plein :

  • l'objectif était : en aucun cas plus de 40 ans (dans le cadre de la possibilité de partir à 60 ans avec le taux plein);
  • le projet de loi prévoit dans son article 5 qu'à partir de 2009, il faudra pour avoir le taux plein cotiser un trimestre de plus par an jusqu'à 41 ans en 2012 (cette durée s'entend tous régimes confondus) ;
  • le principe inscrit dans la loi est de maintenir constant le rapport durée d'assurance/ durée moyenne de retraite, donc de tenir compte de l'augmentation de l'espérance de vie pour fixer la durée de cotisation ; ce principe implique que vers 2020, il faudra avoir cotisé 42 ans pour bénéficier du taux plein ;
  • cette durée est à rapprocher des carrières réelles, de l'ordre de 37,5 ans en moyenne aujourd'hui, sensiblement moins pour les femmes ;
  • 3/ Age :

  • l'objectif était : possibilité de départ dès 40 ans cotisés ;
  • l'âge minimum reste fixé à 60 ans ; il pourrait être abaissé sous condition d'âge de début d'activité (16 ans ou moins) et de nombre d'annuités validées dans tous les régimes (42 ans avec une limite pour les périodes non cotisées) ;
  • | Age de début | Age de départ minimum | Durée validée exigée | Dont durée cotisée |

    | 14 ou 15 ans | 56 ou 57 ans | 42 ans | 42 ans |

    | 14 ou 15 ans | 58 ans | 42 ans | 42 ans |

    | 16 ans | 59 ans | 42 ans | 40 ans |

  • un groupe de travail sur le même thème sera mis en place dans la Fonction Publique ;
  • le dispositif sera revu en 2008 ;
  • cette disposition pour être applicable concrètement suppose un accord patronat/syndicats prévoyant la même clause dans les régimes complémentaires ;
  • une des principales modifications par rapport au projet refusé le 15 mai est la prise en compte des salariés ayant commencé à travailler à 16 ans sans condition de pénibilité et avec un âge de départ qui peut être inférieur à 58 ans ;
  • il y a 800 000 salariés environ qui ont commencé à travailler avant 18 ans et ont cotisé au moins 40 ans ; avec les conditions mises, 300 000 d'entre eux environ devraient être concernés ;
  • compte-tenu de la scolarité obligatoire jusqu'à 16 ans et des difficultés des jeunes ayant de faibles qualifications à trouver un emploi, la condition d'âge assortie d'une condition de durée de cotisation à 42 ans aboutit à un dispositif qui risque d'être en extinction rapide ;
  • 4/ Financement

  • l'objectif CFDT était une augmentation des financement pour garantir l'avenir, pour partie via la cotisation (part patronale et salarié), pour partie via la CSG (qui concerne tous les revenus), pour partie via la solidarité nationale ;
  • dans le projet actuel, à compter du 1/1/2006, la cotisation vieillesse du régime général serait majorée de 0,2 % ; il s'agirait apparemment de redéploiement de cotisations existantes ;
  • le financement sera revu tous les 5 ans en commençant en 2008 par réexaminer les prélèvements obligatoires pouvant être affectés aux retraites (cotisation, CSG…) ;
  • les mécanismes de compensation démographique entre régimes seront réexaminés en concertation avec les partenaires sociaux ; par ailleurs, l'objectif de suppression de la surcompensation est posé ;
  • les revenus autres que les salaires ne contribueront pas au financement des retraites avant au moins 2008 ; baser la recherche de financements sur le redéploiement de cotisations risque de déboucher sur une crise du financement de l'UNEDIC vu l'explosion du chômage, à moins que ça ne soit un élément du plan de refonte de l'assurance-maladie, avec transfert d'une partie des dépenses à la charge des mutuelles ou des individus ;
  • le Gouvernement se refuse à envisager l'augmentation nécessaire des financements pour la retraite, il renvoie la question à plus tard ;
  • l'alimentation du fonds de réserve repose toujours sur des recettes aléatoires (excédents du Fonds de Solidarité Vieillesse, produit des privatisations, …) et non pérennes ;
  • 5/ Calcul de la pension

  • objectif : la possibilité d'avoir le taux plein à 60 ans ; revenir à la prise en compte des 10 meilleures années ; arrêter la dégradation du niveau des pensions programmée dans la réforme Balladur ;
  • le coefficient de minoration des pensions en cas de nombre d'annuités validées dans tous les régimes inférieur à la durée nécessaire pour le taux plein devrait être abaissé à partir de 2004 pour atteindre progressivement 5 % en 2013 ; mais la proratisation est durcie : la durée de référence est portée progressivement de 150 à 160 trimestres au 1/1/2008 ;
  • à partir du 1/1/2004, au-delà de 160 annuités validées, chaque trimestre cotisé après 60 ans donnera lieu à majoration de la pension de 0,75 % ; une disposition similaire sera introduite pour les fonctionnaires ;
  • la surcote ne joue qu'après 60 ans ; pour une année de cotisation en plus ou en moins, la surcote est moins importante que la décote ; est-ce que c'est ça la retraite choisie ?
  • le calcul du salaire de référence est actuellement fait sur la moyenne des 20 meilleures années ; le passage aux 25 meilleures années d'ici 2008 n'est pas remis en cause ; au total, les pensions du plus grand nombre devraient continuer à baisser ;

    6/ Indexation des pensions :

  • l'objectif était : retour à l'indexation sur les salaires, ou en tous cas possibilité pour les retraités de profiter des fruits de la croissance ;
  • la référence pour l'évolution des pensions sera celle des prix ; tous les 3 ans, une négociation avec les partenaires sociaux aura lieu, tenant compte de la santé financière des régimes et de la croissance économique ; sur le même principe, des modalités particulières de discussion seront mises en place dans la Fonction Publique ;
  • le refus de revenir à l'indexation sur les salaires, plus avantageuse sur longue période, et qui existe actuellement dans le public et était en vigueur dans le privé jusqu'en 1993, est confirmé ;
  • la négociation triennale peut permettre d'obtenir des « coups de pouce », mais le mécanisme reste moins favorable que celui qui existe pour le SMIC ; la transposition à la Fonction Publique ne semble pas inclure ce point (mais la transposition aux retraités des évolutions de carrière des actifs est bien supprimée) ;
  • 7/ Pénibilité :

  • la loi incitera les partenaires sociaux à conclure dans les 3 ans une négociation sur la définition et la prise en compte de la pénibilité ; dans la Fonction Publique, le Gouvernement engagera un réexamen de la situation des emplois correspondant à des métiers pénibles ;
  • l'incitation n'est pas suffisante ; rien n'est prévu en cas d'échec des négociations ;
  • dans la Fonction Publique, la notion d'emploi (et non de corps) correspondant à des métiers pénibles apparaît ; le maintien du service actif pour ceux qui en bénéficiaient auparavant est-il toujours prévu ?
  • le Gouvernement négociera-t-il dans la Fonction publique ?
  • 8/ Champ d'application :

  • le relevé de décisions ne mentionne, en ce qui concerne les salariés, que le régime général des salariés du privé et celui des fonctionnaires ;
  • on ne peut pas en déduire que les régimes spéciaux ne sont pas concernés ; rien de ce genre ne figure dans le projet de loi lui-même ;
  • par contre, l'objectif de suppression de la surcompensation d'ici 2008 est dans le texte ;
  • la généralisation de dispositions telles que l'allongement de la durée de cotisation à 42 ans et la décote (qui, en diminuant la pension en fonction des annuités manquantes contraint les salariés à travailler plus longtemps ou à partir avec une retraite fortement amputée) est inscrite dans la logique du projet de loi ; cela pèsera forcément dans les négociations des régimes spéciaux d'entreprise, ou les régimes professionnels spécifiques comme le CFA des conducteurs routiers, puisque, pour que les droits existent, il faut qu'ils soient financés ; le besoin de financements spécifiques correspondant à l'écart avec les prestations du régime général va forcément augmenter ;
  • avec la suppression de la surcompensation, comment assurer l'équilibre général des régimes qui en bénéficient de manière importante, comme celui de la SNCF ou celui de la RATP : qui va prendre le relais ? si elle n'est pas supprimée, la réforme du régime des fonctionnaires va de toutes façons modifier l'équilibre des transferts internes entre régimes spéciaux ;
  • 9/ Fonctionnaires :

  • l'allongement de la durée de cotisation et l'instauration d'une décote modifient les conséquences concrètes du choix de l'âge de départ ; l'âge auquel la décote cesse de produire effet est remonté progressivement à 61 ans en 2004, 62 ans en 2008, 63 ans en 2012, à 64 ans en 2016 et 65 ans en 2020 (respectivement 56, 57, 58, 59 et 60 ans pour les agents bénéficiant du service actif) ;
  • chaque trimestre validé correspond à un pourcentage appliqué au traitement indiciaire de référence (1,875 % pour 4 trimestres), avec un maximum de 75 % (éventuellement majoré de 5 % en cas de bonifications pour enfants, campagnes militaires etc…) ; ce pourcentage est appliqué au traitement indiciaire correspondant au dernier indice, à condition qu'il ait été détenu pendant au moins 6 mois ;
  • si le total des annuités validées dans le régime des fonctionnaires (en comptant le temps partiel comme du temps complet) et de celles validées dans un autre régime de base est inférieur au nombre requis pour le taux plein (160 en 2008), application d'un coefficient de minoration de la pension, dans la limite de 20 trimestres ; ce coefficient s'annule à 65 ans ; cette mesure s'appliquerait progressivement, jusqu'à un taux de minoration de1,25 % par trimestre en 2012;
  • pour les polypensionnés, les meilleures années seront prises en compte au prorata de la durée d'assurance dans chaque régime (donc moins de 25 ans dans le régime général)
  • le minimum de pension est porté à l'INM 227 (993 euros) 1er janvier 2004, mais pour 40 annuités ; sa valeur après minoration sera, pour une durée de 30 ans de service, équivalente au minimum actuel, soit l'INM 216 (944 euros) ;
  • un régime complémentaire obligatoire garanti par l'Etat et géré de manière paritaire sera créé ; il prendra en compte les primes dans la limite de 20 % du traitement indiciaire ; les cotisations (5 % employeur, 5 % salarié) sont assises sur les éléments de rémunération de toute nature (donc y compris par exemple les heures supplémentaires) ; il s'agit d'un régime par points, par répartition, « provisionné » ; cela signifie qu'il ne servira des retraites complémentaires d'un montant significatif qu'au bout d'une certain temps (au moins 10 ans) ;
  • la cessation progressive d'activité reste possible, mais dans des conditions beaucoup moins attractives ;
  • les régimes des fonctionnaires des collectivités locales, des hôpitaux et des ouvriers d'Etat ne peuvent prévoir des avantages supérieurs à celui des fonctionnaires d'Etat ;
  • cotisations : aucune augmentation n'est prévue d'ici 2008 hormis celle liée à la mise en place d'une complémentaire ;
  • 10/ Préretraites :

  • les préretraites progressives sont supprimées
  • une cotisation employeur spécifique sur les préretraites ou cessations anticipées d'activité quelle qu'en soit la forme (égale à la somme des cotisations plafonnées aux régimes de base et complémentaire obligatoire, soit 23,85 % au lieu de 8,4 %) sera mise ne place ; l'exonération ne serait possible que sous certaines conditions d'âge et de pénibilité de l'activité des bénéficiaires fixées par décret ;
  • l'allongement de la durée d'activité est-il compatible avec l'intensification du travail ?
  • 11/ Epargne-retraite :

  • un système d'épargne-retraite à adhésion individuelle ou collective avec sortie en rente à l'âge normal de départ en retraite (au lieu d'une durée fixe de 10 ans ou 12 ans dans les dispositifs classiques) est prévu ; les placements doivent être diversifiés ; les plans d'épargne salariales peuvent être convertis en plan d'épargne-retraite ;
  • les sommes versées par les employeurs sont nettes de cotisations sociales sous un plafond ; les cotisations versées par le salarié sont déductibles du revenu imposable dans la limite d'un plafond ;
  • ce ne sont rien d'autre que des fonds de pension encouragés par l'Etat ; baisse des impôts, cotisations déductibles, les bénéficiaires sont toujours les mêmes
  • en fait de retraite choisie, c'est plutôt d'individualisation poussée, donc d'inégalités, qu'il s'agit ;
  • 12/ Autres dispositions :

  • à partir de 2004, des trimestres supplémentaires pourront être rachetés dans la limite de douze trimestres et dans des conditions actuariellement neutres ; a priori, cela concerne les années d'études, et les trimestres manquants lorsqu'un salarié n'a pas validé 4 trimestres dans une année ;
  • racheter signifie payer à la fois la part salarié et la part patronale de cotisation : le rachat d'une année coûte au minimum 1000 à 2000 euros ; actuariellement neutre signifie que la cotisation est majorée de 6 % environ par année de décalage ;
  • il deviendra possible de cotiser davantage pour valider des périodes de temps partiel (ou de cessation progressive d'activité) ;
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