GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Féminisme

Femmes et municipales

Deux militantes socialistes observent dans leur ville respective comment la prise en compte

de la question des inégalités entre les femmes

et les hommes intervient dans la campagne

pour les municipales.

Pas de quoi pavoiser, cette intervention est quasi nulle! Ou alors, elle s’affiche sous forme d’inventaire à la Prévert, de déclarations de principe, quelques mesures dispersées dans un programme, comme pour dire : « Voyez, on y a pensé ! ».

On cherche la cohérence, la politique volontariste affirmée.

Et pourtant, l’immense majorité des candidats et candidates déclare, souvent de bonne foi, attacher une importance toute particulière à cette question et veiller à promouvoir l’égalité entre les sexes. Mais ceci étant posé, on a l’impression qu’ils et elles peinent à aller plus loin, et que, en dehors des places en crèches, cette question ne trouve pas sa place. Les discussions arrivent très vite sur le terrain des aménagements personnels et des négociations individuelles au détriment de l’analyse des rapports sociaux et de la manière de les faire évoluer.

Par exemple, on entend ici ou là un candidat socialiste « Ah mais moi ma femme, elle a choisi de s’occuper des enfants » - pas de réflexion sur le choix contraint- pas de réflexion sur le fait qu’encore aujourd’hui c’est sur les femmes et sur les femmes uniquement que pèse la gestion de la petite enfance- pas d’utilisation de la boîte à outil républicaine car la réflexion ne se situe pas au niveau de l’individu femmes mais au niveau de la cellule familiale ancestrale où effectivement l’homme rapporte de l’argent au foyer et la femme « choisit » de s’occuper des jeunes enfants. Le candidat oublie que la république ne reconnaît que l’individu quand il parle des femmes. Dans le modèle « ma femme a choisi de s’occuper des enfants » la femme est mise en situation de dépendance économique comme le sont les enfants. A ceci prêt que ses enfants resteront ses enfants, sa femme… en cas de divorce par exemple ira grossir les rangs des travailleuses pauvres. En effet, les femmes massivement présentes dans le salariat, condition essentielle de leur indépendance sont toujours massivement en bas de l’échelle - La carrière des hommes est stimulée par l’arrivée du premier enfant, celle des femmes est bloquée; 87% des smicards sont des smicardes; la moyenne de pension de retraite pour une femme 842 euros pour un homme 1450 euros (source INSEE).

Lisez les programmes

Avec un peu de chance, vous trouverez quelques « toutes et tous », un peu isolés dans des textes qui ne parlent que de citoyens, d’électeurs et autres habitants. Ces textes s’adressent à des individus, indépendamment de leur sexe. Or des problématiques, et non des moindres, sont spécifiques aux femmes. La notion d’individu non sexué, qui occulte les différences, n’est alors pas pertinente. C’est bien ce qui a présidé à l’adoption de la loi sur la parité où pour désexuer le politique (masculin) il a fallu sexuer l’individu.

Des idées

Prenons la question des clubs sportifs pour les jeunes. Tous sont mixtes sur le papier mais dans les faits, ce sont essentiellement des garçons qui font du foot ou du rugby et les filles de la natation synchronisée ou de la danse. Les municipalités subventionnent une partie de ces clubs dont les adhérents, toutes disciplines confondues, sont en majorité des garçons. On connaît par ailleurs l’importance de ces activités pour la socialisation des jeunes. Pourquoi ne pas poser la question du rôle de ces clubs à majorité masculine ou féminine dans la reproduction des inégalités entre les sexes? Comment répartir équitablement l’argent dévolu aux sports pour qu’il profite aux deux sexes et à l’égalité entre eux ? Faut-il jumeler foot et natation synchronisée? Comment inciter les clubs à favoriser la parité? Faut-il conditionner les subventions à la mixité des activités? Voilà des questions qui méritent d’être débattues et sur lesquelles les municipalités peuvent intervenir.

Les jeunes de 0 à 20 ans

Les assistantes maternelles, ATSEM, animatrices-teurs de CLAE sont des personnels municipaux qui ont droit à une formation continue. Il faut que des modules obligatoires sur l’égalité filles/garçons soient inscrit dans les plans de formation.

Promouvoir au niveau d’une municipalité les études scientifiques des filles qui malgré leurs excellents résultats s’orientent vers des filières souvent bouchées ou/et dévalorisées peut aussi être une politique municipale par le biais d’une bourse aux jeunes filles qui veulent suivre des études scientifiques.

Ce sont les mairies qui passent les marchés avec les éditeurs scolaires qu’elles impulsent une vigilance particulière sur la suppression des stéréotypes dans les manuels scolaires par le biais de propositions, de prix de l’égalité…

Les mairies disposent d’un budget pour les cadeaux de Noël aux élèves d’école maternelle être vigilant-e-s à ne pas offrir des dînettes aux filles et des voitures aux garçons semble une évidence.

La question du logement a elle aussi un genre et les difficultés s’accordent toujours au féminin. Une femme seule avec enfants pour les bailleurs-euses privés c’est « source de problème ». Comment prendre en compte cette question de la difficulté spécifique des femmes dans le parc privé et public.

Balayer devant sa porte. Les mairies sont des employeuses. S’assurer que les femmes ne sont pas majoritaires dans les emplois municipaux les plus dévalorisés et minoritaires dans les autres et proposer au tant que possible des validation d’acquis d’expérience.

Plus généralement, les mairies, organisatrices de réunions publiques sur des questions comme l’urbanisme ou le fonctionnement des écoles pourraient susciter des débats plus larges. On sait que l’une des causes des inégalités au travail réside dans le non partage des tâches domestiques et de la prise en charge des enfants. Pourquoi pas une campagne d’affichage sur le thème : « qui a fait la lessive aujourd’hui ? » ou « qui s’occupe du vaccin de Chloé? » Accompagné bien sûr de débats, de documentation, d’analyses. C’est du domaine privé, dira-t-on. Sauf que ce privé là est fondamental dans la répartition des rôles des femmes et des hommes dans la société et conduit tout droit aux inégalités de sexe. Ce n’est pas du ressort d’une mairie dira-t-on encore. Et les femmes seules avec enfants fragilisées par un travail précaire à temps partiel qui demandent des aides ou un logement : ce n’est pas du domaine de la mairie?

Les femmes ne sont pas une catégorie

mais la moitié de la population

C’est bien de la compétence d’une mairie de permettre aux femmes d’être actrice de leur destin et de participer pleinement à la citoyenneté.

Virginie Houadec, Josette Costes

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