GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Jeunes

Éditorial de Unité n° 10

Le language du pouvoir est délicieusement jésuitique dans cette période de défaite. Du "rééquilibrage partiel" par rapport à 2001 au message "d'impatience des français à l'égard des réformes que [nous] allons accélérer", le gouvernement nous fait passer des vessies pour des lanternes. Le message est tout autre : la droite à la lanterne ! Le nombre de maires et conseillers généraux de droite balayés dans ce grand nettoyage de printemps électoral est impressionnant mais ne doit pas nous faire oublier qu'à gauche, une sérieuse toilette est plus que nécessaire.

La question d'un retournement des alliances du PS vers le Modem est tranchée par urnes. A Marseille, l'amarage du PS avec le Modem l'a conduit à couler avec armes et bagages dans le Vieux port tandis que le refus d'une fusion de même nature à Toulouse a permis de repeindre le Capitole en rose. L'électorat de gauche se mobilise sur des programmes de gauche, et si cette vérité dérange certains de nos camarades centrophiles, elle n'en est pas moins brillament illustrée par les faits. Les résultats confirment l'analyse que nous avions des présidentielles : c'est la calamiteuse campagne de Ségolène Royal qui a poussé une partie des électeurs de gauche à se faire des frissons avec Bayrou. La voie du centre est une impasse politique, le terminus des possibles en matière de reconquêtes sociales et politiques. Le congrès du PS commence maintenant, faisons en sorte que ce soit le congrès de clarification qui nous est refusé depuis la bérézina du 21 avril 2002. A nous de poser les jalons d'un programme cohérent, qui ait la cohérence du socialisme !

La crise financière internationale créée par les "subprimes" prend la tangente de la récession mondiale. Petit récapitulatif, je résume le scénario gris-sombre développé par Philippe Dessertine, Directeur de l'Institut de Haute Finance, professeur à l'université Paris X. La croissance gargantuesque de la dette mondiale fut pendant des années compensée par la croissance des "pays émergents". S'en est ensuit une spéculation délirante sur l'immobilier, en particulier américain, où le système bancaire s'est emballé en prêtant sans limite à des millions d'acteurs insolvables (les pauvres). La bulle se crée et éclate en 2007, la purge commence. Les prix chutent, les taux montent, les mauvais payeurs vendent sans condition et contribuent à la chute des prix... les pertes sur leurs emprunts non honorés s'accumulent... Ce fatal engrenage a des retombées sur la structure bancaire dans son ensemble.

Toute l'industrie financière constituée pour gérer ces dettes gagées sur la spéculation s'effondre en quelques semaines. Les licenciements commencent et toutes les banques soit-disant non exposées (y compris françaises) prennent le boomerang en pleine poire. Les pertes commencent à être constatées, elles donnent le vertige, se chiffrant en milliers de milliards de dollars. Nous en sommes là. La publication des chiffres annuels et trimestriels (février et mars) risquent de révéler des pertes jamais enregistrées. Mais ce n'est pas tout. Le remboursement des emprunts à taux élevé a une incidence directe qui s'appelle la chute de la consommation. Elle a commencé à s'effondrer dans les pays occidentaux où la croissance en est fortement dépendante. Les crédits à la consommation ne sont plus honorés et les banques engagées sur ce secteur battent de l'aile. Quelle est la seule projection rationnelle dans un tel contexte ? La consommation s'effondre, les pays fournisseurs entrent en récession (Chine, Inde etc...). Ca va défriser par rapport à la croissance à deux chiffres enregistrée dans cette zone actuellement. Rassurons-nous, le gouvernement fait l'autruche, l'économie mondiale entre dans une spirale folle, mais tout le monde le sait, l'économie française est déconnectée du système monde.

Sur les plans politique comme économique, le gouvernement feint de ne rien voir, file dans le mur en sifflotant "tout va bien madame la Marquise". L'opposition se réjouit de pouvoir renforcer les contre pouvoirs locaux, mais ce n'est pas dans les mairies qu'on fait les lois et les grandes réformes. La conjonction d'une défaite électorale pour la majorité en place et de l'aggravation de la situation économique et sociale indique le chemin à prendre : celui de la reconstruction politique et idéologique au PS et à gauche et de la préparation de l'affrontement social. Car c'est dans la lutte que la créativité politique est la plus riche donc la plus porteuse d'alternatives.

Renaud Chenu

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