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Droit du consommateur vs. lobbies : Ils ont privatisé la couleur des salades !

Les consommateurs ont le droit de savoir ce qu’ils achètent et mangent. Fort de ce principe, l’existence du catalogue officiel des espèces et variétés végétales a de quoi rassurer. Ce catalogue répertorie les espèces et les variétés cultivées, variétés fruitières et potagères comprises, bref toutes celles dont les semences sont admises à la vente.

La France a son catalogue, comme chaque pays européen. L’agrégation des catalogues nationaux constitue le catalogue européen des espèces et variétés. Tout simplement.

Standardisation du goût

Le catalogue français ne dicte pas la conduite du jardinier amateur qui, lui, peut utiliser les semences et récolter pour sa consommation personnelle. Mais il va lui être proscrit de vendre lesdites graines, voire de les échanger, quand cet échange est assimilable à de la vente. Cette mesure réglementaire française est contestée par la Cour de justice européenne qui l’estime « disproportionnée ». C’est là tout le combat de l’association Kokopelli. Les paysans qui appartiennent à ce réseau et dont l’un des modes de travail est l’échange de semences, s’estiment lésés par de telles contraintes qui s’adaptent assurément mieux au monde agro-industriel.

En effet, si le catalogue rassure le consommateur qui sait que, achetant une salade, elle sera verte et aura un goût dont il connaît la saveur avant même de passer à table, il est aussi un espace où l’on trie ce qui est estimé bon ou non à la consommation, faisant entrer les espèces fruitières et potagères dans une standardisation exagérée. Les grands semenciers, champions de l’entrée de leurs produits dans le catalogue, nous préparent des tomates rouges, au calibre et au goût identiques ; peu importe la saison et le lieu de culture. Ce n’est plus de l’agriculture, c’est du génie biologique !

Un catalogue impartial ?

Les industries semencières privilégient les espèces et variétés stables, convenant au travail de l’agriculture intensive, là où les semences paysannes conviendraient à un travail plus en lien avec les terres exploitées, les ressources naturelles disponibles, adaptables et donc moins standardisées.

Le catalogue évalue chaque nouvelle entrée au moyen de tests dits « DHS », acronyme dont la signification est Distinction, Homogénéité et Stabilité. Ils assurent aux consommateurs que la variété est unique dans le catalogue, que tous les plants présentent les mêmes caractères et que, à chaque cycle de reproduction, la graine produira le même fruit. Or, c’est se ranger derrière les industries semencières, en laissant de côté des graines dont le propre est de maintenir une capacité d’adaptation et d’évolution, produisant des variétés peu homogènes.

Chantre d’une harmonisation excessive, le catalogue réduit le spectre des fruits et légumes cultivables pour être vendus. Il tend à faire disparaître complètement certaines espèces et variétés. Comme pour enfoncer le clou, l’inscription sur le catalogue et la reconduction annuelle de l’inscription sont payantes, limitant la possibilité de faire figurer des semences issues de sélections paysannes. Par effet de miroir, cela favorise le développement des industries semencières, ces dernières ayant les mains libres pour choisir, en notre nom, ce qui est estimé « bon » et « vendeur », et qui, de fait, peut facilement s’apparenter à ce que ces industries jugent « rentable ».

Margaux Denantes (article paru dans la revue Démocratie&Socialisme n°245 de mai 2017 )

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