Doris Lessing, Prix Nobel, une féministe ?
Certes Doris Lessing est une militante. Une militante du parti communiste anglais dans les années 50, une farouche adversaire du régime d’apartheid sud africain, une militante anti-nucléaire mais cette écrivaine qui doit son succès à ses lectrices et notamment aux féministes qui ont vu en elle une femme qui faisait avancer le combat pour l’égalité des droits est-elle une militante féministe ?
Quand on l’interroge sur The Golden Note book (1962) où l’héroïne Anna Wulf exprime son rapport aux hommes et à l’érotisme, voici ce qu’elle dit : "Cela m’a toujours irrité que ’Le Carnet d’or’ devienne la ’Bible du Women’s Lib’ parce que je n’avais pas voulu faire un essai féministe mais écrire sur les vies de plusieurs femmes. Les gens pensent toujours que c’était un manifeste politique. Absolument pas. (...) Je n’aimais pas le féminisme dans les années 60 et 70, et je ne l’aime toujours pas aujourd’hui. J’ai toujours détesté le côté antihommes de ces jeunes femmes de gauche qui haïssaient les mecs, le mariage et les enfants. C’était moche et surtout une perte de temps. On aurait dû s’y prendre autrement. Et les féministes continuent de ne rien comprendre à rien".( 2001)
L’académie suédoise considère ce roman "comme une oeuvre pionnière par le mouvement féministe naissant et appartient à la poignée de livres qui ont marqué la manière de voir des relations homme-femme du XXe siècle " Cherchons… l’erreur !
Plus récemment dans le Monde des livres (28 septembre 2007) on peut lire sous la plume de Josyane Savigneau : " Elle redit tout cela avec un oeil moqueur, et un certain sourire féroce, qu'elle garde pour réitérer ses critiques contre les féministes - ses attaques contre "ces femmes devenues horribles avec les hommes", au festival du livre d'Edimbourg en 2001, avaient déclenché des débats, abondamment relayés dans la presse britannique, européenne et américaine (Le Monde du 11 septembre 2001).
Des réactions d'autant plus violentes que dans les années 1960 et 1970, après la publication du Carnet d'or, Doris Lessing était devenue, "mais sans l'avoir jamais voulu", une icône du féminisme mondial. "Je maintiens ma position. Après avoir fait une révolution, beaucoup de femmes se sont fourvoyées, n'ont en fait rien compris. Par dogmatisme. Par absence d'analyse historique. Par renoncement à la pensée. Par manque dramatique d'humour."
C’est vrai qu’il faut beaucoup d’humour pour accepter les crimes d’honneur, les viols, les mariages forcés, les salaires minables, les retraites sous le seuil de pauvreté, les insultes sexistes
Pour le jury du prix Nobel, Martha Quest l’héroïne de la saga “Les enfants de la violence”, est " innovatrice dans sa représentation des pensées et des conditions de vie de la femme émancipée " mais la question reste entière sur l’émancipation de l’auteure envers le système de domination masculine.
Virginie Houadec
Rénovation, rénovation ... vous avez dit rénovation ?
Vendredi 12 octobre 2007, lendemain de vote dans les sections socialistes. La Dépêche du Midi publie les noms des têtes de liste désignées par le PS pour les élections municipales dans les communes de plus de 3500 habitants de l’agglomération toulousaine. Comme ça m’intéresse, je lis. Nom, prénom, commune. Dans un premier temps, je ne remarque rien. Et brusquement, une question surgit : les prénoms féminins, ça existe ? Alors je relis. Et je compte : 7 Françoise pour 37 François. Diable, je croyais la parité obligatoire. Ah mais bien sûr, c’est sur la liste complète. Pour la tête de liste, c’est une autre affaire. C’est que les choses sont sérieuses. Il s’agit de négocier les alliances, de désigner qui sera sur la liste et qui ne le sera pas, et en quelle position. Il faut une " carrure ". C’est aussi promouvoir une personnalité qui pourra ensuite prétendre à d’autres fonctions. Alors une femme, quand il y a tant d’hommes " taillés " pour ça !
Mais bon sang, quand est-ce que ces vieux réflexes vont disparaître ? La tête de liste, c’est aussi une affiche, une mise en avant, un message envoyé à celles et ceux qui vont voter. Alors là, pour la parité, c’est râpé. Une représentation respectueuse de la diversité ? Ah dans le discours, bien sûr, dans les intentions, mais oui, enfin, ne nous faîtes pas de procès d’intention ! Et dans les faits ? Ben, euh, c’était difficile, etc. etc.
Le message est immédiat : pour une place égale aux femmes et aux hommes, c’est non. Ne comptez surtout pas sur nous ! Eh bien ras-le-bol ! Allez dire après ça sur les marchés que le parti socialiste est en pleine rénovation ! C’est déprimant.
Alors, puisque les hommes sont incapables de promouvoir l’égalité, revenons aux statuts du parti. Quand inscrira-t-on la parité à toutes les instances, à tous les suffrages ? Par exemple, pour les municipales, un tandem en tête de liste, suivi si nécessaire d’un tirage au sort pour désigner la tête de liste en assurant la parité. A voir par zone géographique. Ou tout autre procédé. Si l’on veut réellement assurer cette parité, nous trouverons la technique pour le faire. Et les statuts du parti socialiste, ça ne dépend que du parti socialiste. Alors, pas de faux arguments (les gens ne sont pas prêts, ils ont d’autres priorités), mais des actes ! Une vraie rénovation, quoi !
Une adhérente de plus en plus en colère et de plus en plus pessimiste.
Josette Costes
Lectures: Howard Zinn, «En suivant Emma»
Pièce historique sur Emma Goldman, anarchiste et féministe américaine
Théâtre traduit de l'américain par Julie David.
En suivant la vie d'Emma Goldman, militante anarchiste américaine juive d'origine russe, cette pièce en deux actes revient sur plus d'un demi-siècle d'histoire sociale : grèves ouvrières, utopies collectives, émancipation des femmes, amour libre… Cette résurgence est également pour l'auteur l'occasion d'invoquer ce qui tient pour lui d'un invariant anthropologique : la résistance de l’ 'humanité à l'oppression et son goût immodéré pour la justice.
L'œuvre d'Howard Zinn est essentiellement consacrée à l'incidence des mouvements populaires sur la société américaine. En français,quatre titres sont publiés aux éditions Agone : “Une histoire populaire des Etats-Unis” (Prix des Amis du Monde diplomatique 2003) dont nous avons déjà longuement parlé dans D&S ; “Karl Marx, le retour” (théâtre). “Nous, le peuple des Etats-Unis” (essais) ; “L'Impossible neutralité ” (autobiographie).
