GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

Des milliards de cadeaux aux patrons qui refusent des contreparties ?

Étrange, toute cette discussion sur un « pacte » qui n’est pas signé comme… un pacte, et sur des … « contreparties » demandées à des patrons qui affichent leur intention de n’en pas donner… en dépit des cadeaux qu’ils ont reçus.

Car une « négociation » en droit social, en principe, c’est très codifié : les deux parties principales font leurs propositions, l’inventaire de ce qu’elles veulent, elles le font savoir, et s’il y a acceptation de « négocier », en principe, on cherche un point de rencontre à mi-chemin des propositions initiales des uns et des autres. C’est ça,« négocier » en droit du travail. Exemple : la négociation annuelle obligatoire des salaires. Ca marche ou ça ne marche pas, mais il y a une codification de la démarche.

Et l’État s’il intervient, doit lui aussi dire ce qu’il recherche : quel est son but, quels sont ses objectifs ?

On n’est pas du tout dans ce cas avec ce « pacte de responsabilité ». Unilatéralement le Président de la République fait des« offres » publiques censées répondre aux attentes suggérées du patronat. Ensuite, et ensuite seulement, il est demandé des contreparties avec dialogue social. Enfin apparaît une « grande conférence »printanière tripartite… tout cela sous menace d’un « vote de confiance »… bloqué au Parlement ?

Du coup, les syndicats ne sont pas contents : Jean Claude Mailly résume : « le président a donné les clefs du camion au patronat et nous demande de monter dans la remorque ».

Thierry Lepaon explique : « c’est la première fois qu’un Président de gauche propose de supprimer une branche entière de la sécurité sociale ».

Et le Medef refuse de quantifier « quelque contrepartie que ce soit » . Pierre Gattaz doit se souvenir de son père qui avait promis 400 000 embauches en 1986 en un an, en « échange de la suppression de l’autorisation administrative de licenciement »… Et en fait, l’année qui a suivi, il y a eu un « pic » de 400 000 licenciements de plus !

Alors, Arnaud Montebourg dit « 3 millions d’emplois », un patron aurait dit « un million d’emplois », mais il est aussitôt démenti. Laurence Parisot affirme que « toute demande de contrepartie est fallacieuse » et « exclue ». En fait, avec 100 milliards, on pourrait avoir 3 millions d’emplois à 1500 euros, ça revient à ce que l’État les paye à la place des patrons ! Se souvenir que déjà la baisse de la TVA à 5,5 % pour les restaurateurs avait coûté 3 milliards, l’équivalent de 100 000 fonctionnaires. Il n’y avait pas eu un seul emploi créé dans la restauration, mais 100 000 emplois de titulaires en moins dans la fonction publique. 3 milliards : 100 000 emplois en moins, et avec les 100 milliards réclamés par Gattaz ? Ils ne veulent rien promettre, ils vont mettre l’argent qu’on va leur donner aux Iles Caïman, pas dans l’embauche !

Depuis 25 ans, ça n’a jamais, jamais, jamais créé un emploi de baisser les cotisations sociales (ce sont bien des cotisations, hein, pas des« charges » sociales). La Cour des comptes a toujours critiqué ces« aides » aux entreprises, qui étaient sans retour.

Combien on donne exactement, d’ailleurs ? Car les chiffres ne sont pas clairs. Le Président a commencé sa conférence en parlant de 30 milliards d’allocations familiales, puis il parlé de 30 à 35 milliards. Or Jean-Louis Deroussen, le Président de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF), explique, lui, que sur ces 30 milliards, l’État en paie déjà 5 pour ses propres employés, et que les entreprises ne paient en fait que 10 milliards, car il y a déjà 20 milliards d’exonérations… de 1 à 1,6 Smic.

Ce n’est pas clair, car il y a déjà 65 milliards d’aides diverses aux entreprises. Et les 20 milliards du CICE. Et par ailleurs 50 milliards d’économies sur le quinquennat, ce n’est pas clair non plus. Qui va les payer, si en plus, il y a des dizaines de milliards d’aides pour le patronat, et qui va payer à la place des employeurs les cotisations famille ?

Ensuite, j’entends qu’il y a urgence à« négocier » à « contreparties », mais que propose l’État ? Que proposons-nous ? Combien d’emplois ? Quels emplois ? Où ?

Demande-t-on enfin un contrôle sur les licenciements, car pour l’instant les entreprises reçoivent des aides, mais licencient quand même : 1100 plans sociaux, soit 272 100 chômeurs de plus en un an !

Quels emplois ? En CDD, puisque leur nombre explose ? En temps partiel ? Les patrons ont saboté toute négociation du fameux plancher de 24 h, si bien que le gouvernement est obligé de reculer la date d’application de la loi ANI votée le 14 juin 2013… du 1er janvier au 31 juin 2014… Des CDI ? Comment on contrôle ? Quels salaires ? Dans un premier temps cela semble avoir fait partie de la « négociation », puis cela ne semble plus mentionné…QUE VOULONS-NOUS, nous, dans ce fameux« pacte » ?

Les emplois, où ? Car, c’est nouveau, l’État, ce matin, achète 14 % des parts au capital de PSA Peugeot… qui s’allie à 14 % en même temps avec Dongfeng… pour inconditionnellement « sauver » Peugeot ! Alors qu’on n’a pas sauvé Mittal ni Pétroplus ! … Mais tout ça arrive pourquoi ? Parce que PSA a donné 6 milliards à ses actionnaires, plongeant son groupe dans la difficulté. 6 milliards c’était l’équivalent des 8000 postes qu’il supprime, payés 3150 euros pendant 20 ans !

Il faudrait avoir des demandes précises de contreparties, non ? Par exemple aussi sur la régulation de la sous-traitance, cela fait longtemps que je développe là-dessus sans recevoir de réponse : que demande-t-on aux « donneurs d’ordre » ? Comment distingue-t-on les gros patrons, les 1000 entreprises de plus de 1000… du million de petits patrons qui souffrent ? Et les 350 000 travailleurs détachés ! Comment contraint-on les employeurs à y renoncer ? Comment protège-t-on les PME-TPE sous-traitantes de devoir passer des marchés léonins ?

Toutes ces questions sont sans réponse depuis les vœux et la conférence de presse du Président. Difficile de faire du soutien inconditionnel dans un tel flou ! Que doit faire le parti ? Interroger ? Et proposer ? Quoi ? On ne manque pas d’idées précises pourtant…

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