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Défendre et renforcer nos services publics

Depuis juin, les attaques contre le service public se multiplient.

Après la privatisation partielle de GDF, c'est maintenant celle d'EDF que le gouvernement de Villepin veut imposer.

Le 1er août, la SNCF annonce, sous la pression du gouvernement, la suppression massive de trains corail (voir l'article d'Eric Thouzeau dans le précédent numéro de D§S).

Le 18 juillet, c'est les autoroutes que le gouvernement décide de privatiser.

Le 19 septembre, enfin, le gouvernement annonce la privatisation de la Société Nationale Corse Méditerranée (SNCM).

Ces attaques sont inacceptables, non seulement le service public doit être défendu mais il est nécessaire de le renforcer en l'étendant à des secteurs vitaux comme celui de l'eau.

La privatisation partielle d'EDF

En 2003, 57,8 % des actifs, salariés d'EDF s'étaient prononcés contre le relevé de conclusions (Direction-syndicats) qui modifiait leur régime de retraite et autorisait ainsi la privatisation partielle de l'entreprise. Cela n'avait pas empêché les Chiraquiens de passer en force et d'imposer ses solutions tant pour le régime de retraite que pour la privatisation partielle d'EDF. Aujourd'hui, le gouvernement hésite sur les modalités de cette privatisation. D'un côté, il ne veut pas que l'on puisse l'accuser de brader l'entreprise ; de l'autre il veut que l'action EDF puisse avoir un prix suffisamment attractif pour attirer les acquéreurs malgré cette irresponsable pression sociale qui l'a amener à imposer (temporairement !) la limitation des tarifs de l'électricité.

Et la direction actuelle du Parti Socialiste ne lui apporte qu'une opposition en trompe-l'œil. Dans son discours de clôture de l'Université de La Rochelle, le 28 août 2005, François Hollande insistait lourdement sur le non sens qu'était le bradage d'EDF-GDF " conjoncturellement ", en pleine crise mondiale de l'énergie. Ce " conjoncturellement " sur lequel, oralement, devant les caméras de télévision, François Hollande avait beaucoup appuyé, n'apparaît plus dans la transcription officielle de son discours. Il est pourtant lourd de sens : le PS ne s'oppose pas par principe à la privatisation d'EDF-GDF mais uniquement " conjoncturellement ". C'est un gage donné aux libéraux. Un gage qui révèle, en outre, une vision particulièrement erronée de la crise mondiale de l'énergie. Penser, en effet, que cette dernière n'est pas structurelle mais simplement conjoncturelle, n'a qu'un rapport assez lointain avec la réalité.

Ce n'est pas " conjoncturellement " mais bien par principe que le Parti Socialiste doit refuser la privatisation d'EDF. Même si cette privatisation est partielle car l'expérience nous a appris que la direction que prenait chaque direction partielle était celle d'une privatisation totale.

La privatisation des autoroutes

Michel Rocard, en 1990, avait renoncé à mettre fin aux péages qui ne devaient, pourtant, lors de leur installation être limités dans le temps. Il transformait ainsi les usagers de la route en clients et posait le premier échelon de la privatisation des autoroutes.

Aujourd'hui, le gouvernement décide de mettre en vente les parts qu'il détient encore dans les sociétés d'autoroute et déclare engager leur privatisation totale.

Il reçoit - est-ce un hasard ? - le soutien de la nouvelle présidente du Medef, Laurence Parisot, qui n'hésite pas à montrer l'envers du décor lorsqu'elle affirme que vendre les sociétés d'autoroute à des fonds de pensions, se serait " donner l'impulsion aux fonds de pension pour qu'ils soient de vrais acteurs économiques ".

Là encore, dans son discours de La Rochelle, François hollande insistait sur l'irresponsabilité de recourir " dans ce contexte ", " aujourd'hui ", à la privatisation des autoroutes. Cette privatisation intervient, en effet, en pleine crise pétrolière et " va priver à terme l'Etat de 40 milliards d'euros pour en recevoir tout de suite 10 milliards ". Mais le refus de privatiser les autoroutes ne doit pas, lui non plus, s'appuyer sur des arguments conjoncturels. Notre refus doit s'appuyer sur l'exigence du service public dans un secteur essentiel pour les citoyens et pour l'exercice d'une liberté fondamentale, la liberté de circulation, déjà battue en brèche par l'existence des péages.

La privatisation de la SNCM

Là, de Villepin fait très fort.

Dans son plan originel, il proposait de brader la société pour 35 millions d'euros alors que les actifs de l'entreprise sont estimés à 450 ou 500 millions. Sa bonne volonté envers le secteur privé ne s'arrêtait pas là, il proposait également la suppression de 650 à 450 emplois et la prise en charge du plan social par l'Etat. Il proposait enfin que l'Etat recapitalise l'entreprise à hauteur de 115 millions d'euros. L'expression " socialiser les pertes et privatiser les bénéfices " a rarement été plus pertinente.

Le dirigeant du fonds d'investissement qui devait reprendre la totalité de la SNCM (Butler Capital Parteners) n'est autre que Walter Butler, membre (L'Humanité du 28 septembre 2005) du Conseil d'analyse économique auprès du Premier ministre. Il n'est pas difficile, dans ces conditions, de comprendre pourquoi Bernard Marty, secrétaire CGT du Comité d'entreprise, affirmait le 27 septembre : " c'est un scandale financier, une véritable escroquerie ".

La SNCM avait été mise en place en 1976 pour assurer un service public : relier la Corse au continent et ne pas pénaliser son insularité. Elle était alors dotée d'un monopole qui lui permettait d'assurer l'égalité de tous les usagers.

Sous l'habituel prétexte d'une " concurrence libre et non faussée ", la Commission européenne imposait la fin de ce monopole et en 1996, l'entreprise Corsica Ferries se mit à concurrencer la SNCM. Ses bateaux furent d'abord mis sous pavillon français puis rapidement sous pavillon italien. Ce pavillon permettait, en effet, de payer moins d'impôt et de cotisations sociales. Alors qu'elle n'avait aucune obligation de service public, cette compagnie recevait de l'Etat une aide de l'Etat de 10 millions d'euros. Rien d'étonnant donc qu'elle puisse offrir des traversées à 5 euros pour faire concurrence à une SCNM, tenue, elle, à des obligations de service public.

Et lorsque de Villepin se trouve obligé de reculer et d'affirmer que l'Etat conservera 25 % du capital, face à la mobilisation des marins, des dockers, des agents du port autonome de Marseille et du port de Bastia, la Commission européenne vole au secours de Villepin.

La comédie jouée par Jacques Barrot, l'actuel Commissaire européen aux transports et le ministre des finances français, Thierry Breton ne manquait pas de sel. Une vraie scène du café du commerce : " Retenez-moi ou je fais un malheur ! " " Retenez moi ou l'entreprise restera publique ! " La Commission a parfaitement joué son rôle dans cette comédie selon Thierry Breton (Le Monde du 30 septembre 2005) : " La commission et ses services ont fait remarquer de façon très explicite que ce dernier montant de 25 % était dans son esprit un maximum absolu et qu'en tout état de cause il devait être considéré comme étant résiduel, temporaire, limité dans le temps et ne donnant aucune droit particulier à l'Etat ".

Cela revient à dire que la Commission n'autorise l'apport d'argent public uniquement lorsqu'il s'agit d'une entreprise privée. Cela revient à dire, enfin, que l'Union européenne aurait le droit de décider du caractère privé ou public d'une entreprise. Or le traité de Rome (toujours en vigueur...) s'est justement refusé à prendre parti sur ce point. Dans son duo avec Thierry Breton, Jacques Barrot outrepasse donc largement ses prérogatives.

Nous aimerions voir la direction du Parti socialiste river son clou à ses deux comédiens. Mais lorsqu'il s'agit de l'Union européenne, la " compatibilité " du oui de gauche et de celui de droite l'en empêche sans doute. La proposition de François Hollande d'une participation de 51 % de l'Etat est inacceptable. Là encore, c'est le service public qui est en jeu et dès que les actionnaires privés mettent le pied dans une entreprise publique, c'est toute la logique de fonctionnement de cette entreprise qui est transformée de fond en comble (il suffit d'observer l'évolution de France Télécom). La voie est alors ouverte à la privatisation totale.

Jean-Jacques Chavigné


Le poids du pacte

Le pacte de stabilité signé à Amsterdam, en juin 1997, par Jacques Chirac et Lionel Jospin oblige (malgré les quelques réformes subies) à ce qu'un Etat ne supporte pas de déficit public supérieur à 3 % de son Produit intérieur brut (PIB) et que sa dette publique (le cumul de ses déficits...) ne soit pas supérieure à 60 % de ce même PIB.

Or, même si le budget 2006 ne devait pas être modifié en cours d'année, les déficits publics respecteraient les exigences du pacte en atteignant, tout juste, 3 % mais la dette publique atteindrait 66 %, bien au-delà de la limite fixée par le pacte de stabilité.

Comment de Villepin compte-t-il alors s'y prendre pour respecter le pacte de stabilité ?

Pour répondre à cette question, il faut avoir en tête que les 3 % ou les 60 % ne concernent pas seulement le déficit de l'Etat mais les déficits publics et qu'ils incluent l'assurance-maladie, l'assurance-chômage, les collectivités territoriales...

Nous avons vu (articles sur l'assurance-maladie et l'Unedic) comment l'Etat et le patronat comptent diminuer les déficits de l'assurance-maladie et de l'assurance-chômage sur le dos des malades et des chômeurs.

Pour les collectivités locales, le gouvernement de Villepin ne s'y prend pas autrement. L'Etat, en effet, a transféré toute une série de ses responsabilités sans donner aux régions, aux départements ou aux communes les moyens de faire face à ce transfert : gestion de la prestation de compensation handicap pour les départements, plafonnement de la taxe professionnelle pour les communes, bouclier fiscal pour les régions, les départements, les communes... Là encore, ce seront les bénéficiaires de la compensation handicap ou les Rmistes qui trinqueront.

JJC


Bolkestein : le retour !

En mars dernier, avant le référendum sur le projet de Constitution européenne, Chirac, de Villepin, François Hollande ou DSK avaient annoncé que la " directive Bolkestein " était définitivement enterrée, entièrement remise à plat.

D§S avait aussitôt mis en garde contre ces affirmations : " Le repli de Barroso et de Chirac est un succès mais ce n'est qu'un succès temporaire : leur repli n'est qu'un repli tactique dans l'attente de jours meilleurs. Le président de la Commission européenne a d'ailleurs aussitôt réaffirmé la nécessité de ne " pas perdre de vue (les) principaux objectifs " de cette directive. Il a aussitôt réaffirmé la pertinence du " principe du pays d'origine " qui est le principe fondamental du projet de directive puisqu'il permet aux prestataires de services de ne pas dépendre de la législation du pays destinataire mais de leur pays d'origine. " La Commission n'a aucune intention de retirer la directive sur la libéralisation des Services, dite "Bolkestein", mais est prête à travailler avec le Parlement européen et les Etats membres pour trouver des solutions à des problèmes difficiles ", a indiqué dès le 3 février la porte-parole de la Commission, Françoise Le Bail. On peut donc compter sur Barroso pour ne pas perdre de vue les " principaux objectifs " des libéraux : pour eux, la libéralisation du marché des services (70 % du PIB de l'Union) est une priorité, maintes fois réaffirmée. Ce qui aujourd'hui les fait surtout reculer, c'est le referendum français sur le projet de Constitution européenne. Ils comprennent que le mécontentement social pourrait très bien s'emparer du referendum chiraquien et, sans se tromper le moins du monde de colère, bien au contraire, dire non à la fois au libéralisme en France et en Europe. La mise en lumière de la directive Bolkestein et la mobilisation pour le retrait (et non pour la " remise à plat " !) de cette directive scélérate est donc plus que jamais nécessaire. "

Notre appel à la vigilance n'était pas son objet. La directive Bolkestein n'avait jamais été abandonnée par la Commission européenne. Elle a été débattue et fait l'objet d'amendements dans plusieurs commissions du Parlement européen. Et, comme le souligne Raoul Marc Jennar " l'heure des votes décisifs approche ". D'abord, les votes en commission sur les amendements début octobre, puis fin octobre ou mi-novembre, vote en séance pleinière sur la directive.

Le vote de cette directive serait une attaque considérable contre les salariés européens.

La mobilisation la plus large s'impose contre ce vote.

Le Parti Socialiste doit sortir de sa torpeur et alerter l'opinion contre le mauvais coup qui se prépare.

JJC

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