Débat fiscal : un enjeu fondamental pour les 22 avril et 6 mai
François Hollande a eu raison
de commencer à expliquer qu'il
fallait supprimer les baisses
d'impôt faites par la droite en
faveur des riches depuis cinq
ans. Il faut promouvoir et
populariser sans défaillance
l‘impôt républicain progressif
sur les revenus et les sociétés.
Il est fondamental qu'il y ait un
véritable débat sur les enjeux en
matière de politique fiscale.
Ceux-ci touchent aussi bien auniveau qu'à la structure des
ressources publiques nécessaires
à l'action publique. Qu'il s'agisse
du mode de financement de la
protection sociale ou de l'action
des pouvoirs publics (Etat,
collectivités locales, protection
sociale), les vrais enjeux fiscaux
sont encore largement occultés.
Il y a de l'argent en France,
beaucoup d'argent, jamais la
classe sociale dominante n'a été
aussi riche: 378 000 millionnaires
en euro (+3,5 % en 2005 par
rapport à 2004). Les entreprises
du CAC 40 ont gagné 100
milliards de bénéfices en 2006
(contre 84,3 mds en 2005, 66,4 en
2004, 57 en 2003...). Et cet
argent va bien dans les poches des
riches Français : les 500
premières fortunes ont gagné 30
milliards d'euro de plus en 2005
par rapport à 2004 soit 3 fois le «
trou » présumé de la Sécurité
sociale !
Voilà pourquoi il est vital
d'expliquer sans faiblir que les
impôts doivent progresser etr que
c'est un bien pour la collectivité.
Ecarter l'idée d'augmenter la
Tva après les élections, sociale
ou pas !
Augmenter le taux normal (voire
le taux réduit) de Tva pour le
porter à 23 voire à 25 %, et
baisser en contrepartie la part
patronale des cotisations
sociales ; telle est l'ambition de
ceux qui prônent l'instauration
d'une « Tva dite sociale » en
prenant exemple sur ce qu'a fait
l'Allemagne (qui reste cependant,
avec un taux porté de 16 % à
19 %, inférieur au taux normal
français actuel de 19,6 %). Il
s'agirait en réalité de transférer
sur les ménages environ 85
milliards d'euro nécessaires au
financement de la sécurité
sociale, ce qui ne serait pas sans
conséquences sur le pouvoir
d'achat des ménages et in fine,
sur l'activité économique.
Inverser la baisse catastrophique
de l'impôt sur le
revenu !
Il faut plus d'impôt direct et
moins d'impôt indirect, par
définition moins démocratique. Il
faut ré augmenter le du nombre
de tranches, d'impôt, ce qui
permettra de suivre plus
équitablement les salaries et
revenus sans tomber dans la
caricature (est-ce qu'il ne doit y
avoir qu'une seule barre, à 4000
euro ?) Il faut réhabiliter
l'instauration d'un impôt
progressif et pas seulement
proportionnel. Aussi faut il se
méfier de tous les projets de
fusion avec la Contribution
sociale généralisée, les cotisations
sociales, et l'impôt sur la fortune.
Les projets ne manquent pas et
ceux de Bercy ont tous une visée
négative sur la répartition des
richesses, contre le caractère
redistributif du système fiscal. En
particulier, la fusion Csg/Ir est
envisagée sous diverses formes
plus ou moins progressives y
compris dans le « Projet
socialiste ».
Il faut soigneusement conserver et
non pas annuler la séparation
entre les budgets sociaux et le
budget national : les uns sont «
pré affectés » et c'est bien ainsi,
pas l'autre.
Isf, Successions... Sarkozy ne
fait propose des cadeaux qu'aux
riches !
De nombreuses propositions de
lois ont été déposées pour
supprimer ou réduire très
fortement l'impôt de solidarité sur
la fortune ou les droits de
succession. Sarkozy les reprend à
son compte parce qu'il veut en
découdre avec la fiscalité du
patrimoine. Dans un pays où
10 % des ménages détiennent
46 % du patrimoine, ses
propositions, si elles étaient mises
en oeuvre, conduiraient à
l'explosion des inégalités. Sans
compter l'impact de ce type de
mesures sur les finances
publiques...
Imposer davantage les grandes
entreprises :
Les voeux du Président de la
République ont une nouvelle fois
engendré leurs promesses fiscales.
Après la réforme de la taxe
professionnelle (non aboutie) et
l'élargissement des cotisations
sociales à la valeur ajoutée
(même pas débattue par le
Parlement), c'est la baisse à
20 % de l'imposition des
bénéfices des entreprises qui a eu
les honneurs présidentiels.
Sarkozy est « pour », Or c'est le
contraire de ce qu'il faut faire.
Les grandes entreprises fabuleusement
riches, doivent cotiser au
bien public. On ne le sait que
trop peu, si le taux de l'impôt sur
les sociétés est encore (trop peu)
élevé en France, la base, elle, est
étroite du fait de nombreuses
déductions possibles en France,
de sorte que le produit de
l'impôt, rapporté à un solde
intermédiaire de gestion
commun à toutes les entreprises
ne fait pas apparaître une
moyenne plus mauvaise que les
autres pays. Il faut que la France
s'exprime sur l'harmonisation de
l'imposition des sociétés en
Europe, un chantier sur lequel de
nombreux travaux existent mais
qui est sacrifiés sur l'autel de la
concurrence fiscale « libre et non
faussée ».
La fiscalité locale restera-t-elle
la grande oubliée du modèle
social ?
La taxe d'habitation ne fait
l'objet quasiment d'aucune
proposition : or elle est
profondément injuste, ses bases
sont archaïques, mais rien n'y a
fait jusqu'à présent, elle perdure
ainsi, et elle augmente tous les
ans. De la même manière, la
question de la taxe
professionnelle reste posée : les
travaux effectués à ce sujet (le
Snui cite le rapport Fouquet par
exemple) n'ont pas été pris en
compte.
L'impôt est au coeur des choix de
société. La question du « modèle
social » ne peut pas faire
l'économie d'un débat de fond
sur le financement dudit modèle.
Lire à ce sujet le « projet FMDS » d'avril 2006
(D&S spécial n°134)