GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

Compte rendu et interrogations sur le forum NPS du 12 juin

Environ 600 camarades sont venus de 9 h 30 à 17 h assister à un "forum national" de Nps à Paris, à la Cité universitaire... Ils ont eu un grand mérite après cette campagne harassante que nous venons de connaître pour faire gagner le "non"... Monter à Paris après tant d'efforts depuis tant de mois, demandait une sympathique énergie. Mais il faisait beau. Bravo à toutes et tous.

L'ordre du jour de ce forum national vous a été communiqué par mel par ailleurs, il ne laissait pratiquement aucune place au débat et aux interventions de la salle...

Après les forums du matin, (un économiste invité nous a comparé les différents libéralismes...) il y eut deux interventions politiques de Christian Paul et de Thierry Mandon : ce qui m'a frappé, c'est le peu de temps consacré à l'analyse de l'immense victoire du non, à ses sources profondes, à ses origines, à sa dynamique, et à ses suites si lourdes, si durables...sur l'Europe, sur la France, sur la gauche, sur le Ps... Tout ce qui était contre la droite, le vieux Ps, la direction Hollande était plus applaudi...

L'après-midi fut fait d'une “plénière”, nous eûmes la douloureuse obligation d'entendre le “ouiiste” allemand Stéphane Colignon : après avoir défendu le oui autant qu'il a pu sur les radios françaises, en tant qu' “européen éclairé”, (car il a mis le paquet pour contribuer à faire perdre le non) il vient nous dire que “le traité est un mauvais traité puisqu'il a perdu...” Grâce à qui ? A ceux qui ont mis le paquet contre !

Qui a mouillé sa chemise pour qu'il perde et que le résultat éclaire S. Colignon ? Il est maintenant pour une Constituante, bravo, mais pas pour nous refourguer une autre version de la constitution libérale qui a échoué, du moins j'espère... Il se félicite au passage du “oui” espagnol, hélas, si le peuple espagnol revotait, éclairé, il voterait peut être différemment, et si le peuple allemand votait ce serait “non” ! Ca, il ne l'a pas dit !

Ensuite, on a du entendre une syndicaliste flamande ouiiste... qui au détour de ses phrases laissait voir sa nostalgie de la défaite de son camp, celui de la Confédération Européenne des Syndicats versus John Monks. Qui l'a choisi ? Là je ne comprends pas, il y a mille syndicalistes de haut rang, de lutte, courageux et brillants, qui ont appelé à voter “non” dans toute l'Europe, il y a des adversaires, probablement majoritaires, de John Monks, pourquoi va t on chercher cette ouiiste ? A quoi rimait ce plateau-forum ?

Ensuite, Benoit Hamon a parlé de la belle victoire du “non”.

Puis Arnaud Montebourg a fait une très jolie envolée littéraire sur l'histoire et la vie durable de Nps.

Et Vincent Peillon a fait, à son tour, un grand discours d'autocélébration

Je ressens une étrange attitude vis-à-vis de la magnifique victoire du “non” de gauche : comme s'il était sans conséquence durable, on s'en félicite, mais pas trop, comme s'il fallait qu'on le dépasse, comme si on était déjà plus loin sans y avoir été, comme si on cherchait à rabibocher les deux côtés.. du parti arbitrairement séparés à propos d'une peccadille... Mais ce n'est pas ce qu'a fait Hollande, lui, il a tiré des conséquences durables ! Il a viré ceux qui avaient eu raison de faire campagne !

Voulait-on profondément la victoire de ce “non” ? Bien sûr : elle est magnifique, pleine d'espoir, de force, c'est un non de gauche pro-européen, social, antilibéral ! Durable ! Personne n'est prêt d'oublier ce débat gigantesque, formateur, fondateur !

C'est en menant campagne que ce “non” s'est construit, car la victoire s'est arrachée, voix après voix, avec les dents, entre autre, dans l'électorat socialiste !

L'argument du “respect de la démocratie militante” ne tient pas une seule seconde puisque chacun sait que le vote a été insincère, la preuve en est que dans tous les départements des grandes fédérations qui ont voté oui à 80 %, les électeurs ont voté non à 80 %... Pourquoi se vanter de respecter une “démocratie” qui a été le fruit d'une fraude, et dont on claironne qu'elle ne devra(it) pas se reproduire au prochain congrès ? Il y a la une contradiction incompréhensible pour des politiques avertis...

En fait Nps a fait une erreur politique en ne faisant pas campagne, il fallait en être, la construire, il fallait être là en dépit du vote interne contestable, et parce que la majorité ne respectait même pas ses propres positions, parce qu'elle insultait les “nonistes”, parce qu'elle les comparait à Le Pen, parce qu'elle voyait son “oui” compatible avec celui de Sarkozy, il y avait mille motifs de raison et de coeur pour faire partie du combat majoritaire, extraordinaire qu'a mené notre peuple de gauche, notre peuple socialiste... Pourquoi ne pas le reconnaître ? Il n'y a pas de mal à “faire de la politique autrement” et à progresser ainsi !

Arnaud Montebourg écrit dans “Le Journal du Dimanche” de ce jour que “François Hollande a brisé le parti”... Quel intérêt y a t il à se réclamer du respect scrupuleux, quasiment sacrificiel, de la démocratie d'un parti “brisé” où le vote des militants a été truqué et ne correspond pas au vote massif de ses électeurs ?

J'ai donc été écarté de parole au cours du Cn du Ps par Nps (disons Vincent Peillon et David Assouline), mon intervention est quand même parue dans l'Hebdo des socialistes, mais Nps infos m'a écarté en ne la reproduisant, me censurant donc davantage que la majorité du parti... Ensuite, j'ai été écarté de toute intervention ce dimanche, en gros Nps m'a traité comme Hollande a traité Fabius, en pire, car Fabius était assis à la tribune du Cn et a pu parler, là, ils m'avaient mis au ban de la réunion de ce jour, sans explication, sans excuse, sans commentaire, ils ont même donné des explications contradictoires et embarrassées à des dizaines de camarades qui sont allés leur demander pourquoi... Il n'y a eu aucune discussion avec moi sur ce point, aujourd'hui, nul n'a proposé, comme je l'ai espéré, de corriger le tir et de me proposer d'intervenir...

Ce qui m'a un peu agacé, comme toujours, c'est un petit détail supplémentaire mesquin, c'est que David Assouline a annoncé à toute la salle, que des camarades de Nps écrivaient des livres et qu'ils étaient là sur une table et qu'ils pouvaient les acheter et se les faire dédicacer... Mais les miens n'y étaient pas, alors que, pour ma part, à chaque fois que j'ai fait une librairie, je me suis porté sur les épaules les livres de tous les camarades et pas seulement les miens... Cette exclusion bureaucratique, mesquine, est bien sûr intolérable, n'a rien à voir avec un nouveau parti socialiste pour lequel nous militons. D'ailleurs, on ne peut en vouloir aux responsables, ils rasaient les murs toute la journée. Mais comment et pourquoi s'explique t elle ? Parce que j'ai fait campagne pour le “non”... Les uns disent (en douce, jamais les yeux dans les yeux) que ça nuit au courant, les autres que c'était un désaccord... Et ils me le font payer ainsi...

Mais je réponds que presque tous les militants Nps ont fait campagne, je peux faire le témoignage de plus de 60 départements où j'ai vu les militants de Nps agir, courageusement se démener, coller des affiches, distribuer des tracts, être là aux meetings, bien sûr, venir me dire combien ils regrettaient, PARTOUT, la décision de la direction de leur courant... C'est aussi pour cela que j'ai ressenti une telle solidarité, et même une sérénité en dépit de ce déni de droit, il y avait eu au moins les deux tiers de la salle aujourd'hui qui sont venus me manifester leur solidarité, leur affection... Et qui sans doute, sont allé parler aux dirigeants sur ce point (sans parler des mels, des coups de téléphones, et je dis merci de tout coeur à toutes et tous...). Je me suis réfréné tout ce jour, je n'ai pas fait de protestation trop vigoureuse, ni d'esclandre, pas de lettre ouverte, ni d'appel, car, je ne veux, à ce stade, rien d'irrémédiable, sinon préserver, tant que ce sera possible, une chance prioritaire à l'unité, et à l'union de toute la gauche du “non” au sein du Ps. Ceci dit je partage les sentiments de camarades qui se sont dit indignés sans forcément savoir quoi faire, vu que moi même je ne bougeais pas, pour contrecarrer cette injustice perçue comme collective.

Ceci dit, cela n'enlève rien au sens politique de la chose : ce barrage de ce jour est évidemment politique et non personnel, et c'est une nouvelle erreur, après avoir refusé de faire campagne de traiter ainsi ceux qui l'ont fait. Ca diminue d'autant plus la crédibilité du discours de Vincent Peillon, car il y a eu là, un vrai malaise : une demie heure d'auto célébration de Nps, d'assurance que nous avons raison sur tout, que nous sommes les vrais, les bons, les plus justes, les plus forts, les incontournables, babababa, que nous ne devons répondre à aucune sirène, ne recevoir de leçons de personne, etc... Mais qu'est-ce que c'est que cette ligne ? Quel est le but ? Ou va t on ?

A quoi vont servir nos 17 % ?

Car il n'y a pas de place pour des “casques bleus” qui diraient en interne “paix mes frères” à leurs adversaires sans avoir eux-mêmes contribué à la suprématie du camp auquel ils appartiennent, ça laisse tout le monde dubitatif sur l'autorité de ces “arbitres”... Si nous sommes dans le camp du “non”, soyons lucides ! Si “la majorité a brisé le parti”, comme l'écrit Arnaud, c'est en refusant la victoire du “non” après le 29 mai !... Et tant qu'elle la refuse, la bataille du “non” et du oui” n'est pas derrière nous, elle est prolongée, il faut défendre le sens du “non” avec toute la gauche mobilisée qui l'a fait gagner...

D'où la nécessaire unité du camp du “non” au sein même du Ps.

A quoi servent 17 % dans un tel cas de figure ?

Nouveau Monde et Force militante nous proposent une motion commune, c'est dans la presse... On se réunit et on n'y répond pas...??? Pas un seul mot en une journée ?

J'ai un camarade qui me dit, en sortant, “mais on va faire l'unité... plus tard...” Mais si c'était vrai, il faudrait l'annoncer, la préparer dire comment et pourquoi... Ca ne se fait pas dans des coulisses de congrès dans le dos des militants, c'est maintenant qu'il faut un signe dedans et dehors pour tous ceux qui sont joyeux, mobilisés, dopés par le grand combat populaire qui a fait gagner le “non” le 29 mai...

J'ai bien entendu, en me frottant les oreilles : l'énormité : “le seul vote utile sera le vote Nps” (on n'a même pas commencé à discuter d'une contribution, encore moins d'une motion, on n'a pas répondu à ceux qui nous proposent d'en faire en commun... et “le seul vote utile sera le vote Nps ?” )

On n'a pas dit, au passage, aujourd'hui, si on abrogera les mesures de la droite ? Abrogera t on la loi Fillon sur les retraites pour en revenir à une retraite à 60 ans pour tous à taux plein, comme on l'a promis à l'unanimité au congrès de Dijon ? Abrogera t on la loi Douste Blazy sur la Sécu ? Rétablira t on des 35 h pour toutes et tous ? Haussera t on les salaires fortement ?

Dans “le projet-diagnostic” que Nps a déposé, sans débat interne, (on étaient bien les seuls en mars 2005 à considérer que cela urgeait), on ne parlait ni de la guerre d'Irak, ni de Bush, ni des 1000 milliards de dollars d'armement, on parlait de climat, d'énergie, de démographie, mais pas des retraites, ni de la Sécu, pas des 35 h ni du droit du travail, ni du périmètre des services publics... Alors, sans avoir discuté de tout cela sur le fond, aujourd'hui, on se réunit à 500 pour décréter que “le seul vote utile sera Nps” ?

Si on suit la ligne de Vincent Peillon, on refuse une unité dynamique du “non”, on retranche nos 17 % du jeu, et on laisse gagner le camp du “oui”... Y'aura pas photo !

Si c'est cela qu'on le dise ! Faisons parler d'autres syndicalistes de la Ces comme la ouiiste flamande, d'autres intellectuels partisans du oui, invitons dans nos “forums” indistinctement des ouiistes et des nonistes, comme si le peuple n'avait pas tranché, et faisons taire Gérard Filoche, bien sûr... (Je crois que j'aurais été pas mal applaudi, et si je vous disais ce que j'avais prévu de dire, il y aurait des regrets...)

Il n'y a qu'une façon de gagner ce congrès, c'est d'abord de rassembler le camp du non, puis à partir de cette dynamique, de convaincre une partie du camp du oui, lequel ne demande que cela puisque les électeurs ont tranché en ce sens, puisque le vote du 1er décembre n'était pas sincère... On ne gagne jamais en commençant par diviser son camp et en croyant qu'on va convaincre le camp adverse : d'ailleurs, il y avait pas mal de phrases des orateurs qui laissaient entrevoir qu'ils croyaient ce congrès perdu... Alors on anticipe la défaite et on garde 17 % pour les négocier ? Mais à qui ? La politique nouvelle ce n'est pas cela !

Si dedans et dehors, on voit, au contraire, on voit se construire une alliance allant de Montebourg à Emmanuelli et nous tous inclus, nouvelle et collective, sans exclusive, bien sur, sur un programme de transformation sociale alternatif, cela sera perçu comme un événement, une avancée, comme une victoire confirmant le “non” !...

Ce sera un immense espoir dans la base populaire du “non” qui nous observe, qui nous attend, qui ne désire que cela.

Et cela attirera une partie du “oui” socialiste confronté aux raisons de sa défaite, puis confronté aux conditions douteuses de sa première victoire, et aux exigences de rassembler la gauche pour gagner en 2007...

Beaucoup d'élus vont réfléchir sur leur avenir en regardant les votes de leur circonscription...

Et pour gagner en 2007 (ou avant, car tout cela peut se précipiter), il faut unifier la gauche autour du “non” et évidemment pour un candidat du “non”... pas pour un candidat du “oui” !

Pour avoir prise sur ce candidat du “non”, pour imposer une candidature de transformation sociale, d'alternative, il faut une gauche du Parti socialiste forte et unie...

Quel sens cela a t il, sinon, dans ces conditions aujourd'hui, de nous auto-célèbrer ?

Là où il faudrait l'unité le plus vite possible, à quoi ça sert de redire que nous étions les meilleurs ?

Vit-on comme une secte sans regarder autour de nous ?

Croit-on un seul instant que ca va marcher ?

L'idée de l'autonomie, du pivot va se transformer en girouette !

Ce serait une déroute totale, et Nps perdrait morceau par morceau , semaine après semaine dans les quatre mois à venir... Il y avait, cet après-midi d'immenses interrogations dans la salle, au fur et à mesure que se déroulaient les discours et que les militants voyaient l'unité s'éloigner, évanescente, qu'ils ne voyaient aucune réponse concréte venir...

En sortant, ce soir, des camarades s'interrogeaient et il y avait de quoi : si on fige 17 %, si on enlève 17 % de l'énergie du combat pour défendre le “non” et son sens, par simple soustraction, on redonne le parti à François Hollande, (qui se déchirera avec Strauss-Kahn): , est-ce cela que veut “Nps le pivot” ? “Le seul vote utile sera le vote Nps” ?

En guise d'indépendance, on aura perdu, et il ne restera plus qu' à vendre le solde dans une nuit de congrès, sans avoir menée une bataille claire, populaire, comprise de toute la gauche, et avec les militants...

Je résume : l'autonomie de Nps est une aventure catastrophique, décevante pour ceux qui ont gagné le non, décevante pour les socialistes, décevante pour la gauche qui nous regarde !

Je vous propose au contraire l'unité de la gauche, l'unité des socialistes autour du message du peuple du 29 mai et l'unité de la gauche des socialistes pour répondre aux aspirations tant de fois déçues du peuple de gauche.

Je demande à tous les camarades de bien réfléchir, il est bien sûr, encore temps, nous avons une responsabilité historique, sur Nos épaules, car une telle occasion ne se présentera pas souvent !

L'expérience est la chose qui se partage le moins. Mais Nps ne devrait pas faire une telle erreur après avoir porté tant d'espoir. Après le 21 avril, le 29 mai confie une mission à ceux qui ont créé Nps, j'en suis, je n'agis pas, comme dit Thierry Mandon, contre mes craintes, mais pour faire avancer vraiment ce qui est souhaitable tant que c'est encore possible.

Gérard Filoche, dimanche 12 juin, 21 h

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