GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

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Révolutions russes #9 : le problème de lʼinsurrection

Début octobre, les bolcheviks avaient arraché aux conciliateurs la majorité au Soviet de Petrograd, à Moscou et dans les grands centres industriels du pays. Le second Congrès des soviets devait permettre la transmission pacifique du pouvoir dʼun GP désavoué aux organes populaires. Toutefois, conscients que jamais Kerensky et ses alliés bourgeois ne se démettraient de leur plein gré, Lénine et Trotski persuadent leurs camardes de la nécessité dʼune insurrection armée, prévue début novembre.

Dans la suite logique du vote du 22 septembre, qui avait vu la liste bolchévique devancer celle du praesidium sortant, les délégués au Soviet de Petrograd portent Trotski à leur tête le 6 octobre. Le nouveau Comité exécutif comptait 13 bolcheviks, 6 SR et 3 mencheviks.

La contagion

Longtemps, les soldats avaient constitué la base sociale privilégiée des conciliateurs. Mais la liaison de plus en plus étroite entre les ouvriers et la garnison de la capitale suscita de profondes évolutions au sein de la troupe. Pour Stankévitch, un proche de Kerensky, « toutes les élections dans lʼarmée donnaient un stupéfiant accroissement des suffrages bolchéviques ». Le « bolchévisme » des soldats exprimait surtout leur aspiration à la fin des hostilités et nʼétait pas exempt dʼune certaine méfiance contre les nouveaux leaders soviétiques, naturellement suspectés – comme leur prédécesseurs – de tendance temporisatrice. Ainsi, les députations de soldats impatients, contournant des comités officiels qui nʼavaient pas été renouvelés depuis mars, affluaient vers la capitale. Une délégation du 33e corps dʼarmée le dit clairement, début octobre, devant le plénum du Soviet de Petrograd : sʼil nʼy a pas de véritable lutte pour la paix, « les soldats prendront eux-mêmes le pouvoir en main et arrangeront lʼarmistice »...

Lʼascension des bolcheviks était également vertigineuse à la campagne. Comme le signale Marc Ferro, « le nombre des exactions individuelles diminue progressivement et fait place aux exactions des comités agraires qui se constituent un peu partout ». Après un léger ressac estival, le nombre de domaines touchés par les conflits agraires augmenta de 30 % en septembre par rapport à août et de 43 % en octobre. Les propagateurs de la révolte paysanne, ce nʼétaient pas tant les agitateurs des soviets paysans que les déserteurs rentrés dans leur village avec en tête les mots dʼordre entendus lors des innombrables meetings qui avaient rythmé leurs dernières semaines sur le front. Selon le bolchevik Mouralov, « parmi la paysannerie qui entourait Moscou, il se produisait un formidable mouvement vers la gauche ».

Lʼinfluence des bolcheviks grandit rapidement. Lʼun dʼeux, Vratchev, se souvient : les paysans de la province rurale de Voronèje, « étant revenus de lʼasphyxie SR, commencèrent à sʼintéresser à notre parti, grâce à quoi nous eûmes déjà un bon nombre de cellules de village et de canton, dʼabonnés à nos journaux et nous reçûmes de nombreux moujiks dans lʼétroit local de notre Comité ». Selon Ivanov, dans la province de Smolensk, malgré la faiblesse du parti et la rareté de ses publications, « plus on se rapprochait dʼoctobre, plus le village se tournait vers les bolcheviks ». Malgré cette percée hautement significative, dans les mois qui suivirent, ce fut massivement sous le drapeau – pourtant fort équivoque – des SR de gauche que se regroupèrent les paysans en révolte contre les grands propriétaires.

Octobre constitue la conjonction de quatre dynamiques extrêmement profondes : lʼaspiration du salariat au contrôle ouvrier, le soulèvement paysan pour le grand partage des terres, la lutte des soldats pour la paix immédiate, mais aussi le soulèvement des nations opprimées au nom de leur liberté à disposer dʼelles-mêmes. Comme le rappelle Trotski en conclusion de son chapitre sur la question nationale avant Octobre, « à toutes les étapes de son développement, la bourgeoisie de la périphérie [...] dépendait invariablement des banques centrales, des trusts, des firmes commerciales, étant en somme lʼagence du capital de toute la Russie, se soumettant à ses tendances russificatrices ». Rien dʼétonnant, donc, à ce quʼune fraction des masses allogènes, ignorant jusquʼà leur existence quelques mois auparavant, se tournent vers les partisans de Lénine qui avait toujours défendu, notamment contre Rosa, le droit à lʼautodétermination jusquʼà « la liberté de séparation ».

La farce « démocratique »

Une formule de Tsérételli résumait à merveille la position des conciliateurs sur la question du pouvoir après la commotion que provoqua la mobilisation populaire contre le putsch de Kornilov : « Conserver lʼidée de la coalition et se débarrasser de tous les éléments qui pèsent dʼun poids trop lourd sur le gouvernement », ce qui revenait à reconduire un cabinet avec la bourgeoisie sans le parti cadet, cʼest-à-dire son principal parti, mouillé jusquʼau cou dans le complot konilovien ! Un Directoire hors sol se mit laborieusement en place. Il se composait de Kerensky, de Térétchenko – lʼâme de lʼEntente – aux Affaires étrangères, de Verkhovsky à la Guerre, assisté à la Marine de lʼamiral Verdérevsky qui avait été emprisonné après la défaite des conjurés, ainsi quʼà lʼIntérieur, du menchevik Nikitine qui nʼallait pas tarder à se voir exclu par son propre parti.

Avec le basculement du Soviet de la capitale, il devenait clair que lʼimminent Congrès des soviets risquait de condamner la coalition, voire de réclamer le transfert immédiat du pouvoir dans ses mains. Selon Pierre Broué, pour contrecarrer cette perspective funeste, le Comité exécutif panrusse des soviets élu en juin et composé de ce fait du gratin conciliateur « tenta dʼélargir la base de la coalition quʼil soutenait avec la convocation, sur le modèle de la Conférence d’État, dʼune Conférence démocratique ». Au dire de Trotski, pour les leaders modérés, cette assemblée – dont une partie des membres ne manqueraient évidemment pas dʼêtre désignés par leurs soins – devait « montrer la force de la démocratie, inspirer du respect […] et refréner Kerensky en proie à une nouvelle ardeur ». La bourgeoisie, ne regardant guère plus loin que le bout de son nez, fut immédiatement hostile à cette Conférence considérée comme une manœuvre pour consolider les positions conciliatrices arrachées à lʼissue du putsch de Kornilov.

La Conférence sʼouvrit le 27 septembre au théâtre Alexandre. Kerensky y brilla par son incapacité à dissiper les soupçons sur son rôle réel lors du putsch de Kornilov. Aucun dirigeant conciliateur ne vint à son secours sur ce point. Il faut dire que le temps de leur superbe était déjà passé. Lʼun dʼeux – le SR de droite Péchékhonov, ancien ministre du Ravitaillement – se lamenta même de la sorte : « Le pouvoir se présente maintenant tel que tous sʼen détournent en se signant ».

Il était alors courant dʼaccuser les bolcheviks de ne pas avoir le courage de prendre le pouvoir. Le Rietch – autant dire la bourgeoisie faite journal – avait écrit, deux jours auparavant que la meilleure façon de se débarrasser des partisans de Lénine et de Trotski serait de leur confier les rênes du pays, mais dut constater que « ces tristes héros du jour ne sʼempressent nullement de saisir le pouvoir dans son intégralité ». En séance, Kerensky menaça directement les bolcheviks en leur lançant : « Si vous entreprenez quelque chose, les chemins de fer sʼarrêteront, les dépêches ne seront pas transmises »... Les délégués bolchéviques répondirent aux provocations en déclarant que leur « parti nʼa jamais tendu et ne tend point à sʼemparer du pouvoir contre la volonté organisée de la majorité des masses laborieuses du pays ».

Il ne fallut pas moins de cinq votes, ainsi que le talent manœuvrier de Tsérételli, pour obtenir une large majorité en faveur de la reconduction de la coalition honnie. Le nouveau gouvernement, dont la composition fut dictée au Palais dʼHiver entre cadets et socialistes modérés, et non dans les rangs de la Conférence, regroupait six ministres bourgeois et dix conciliateurs. À lʼannonce de sa composition, le Comité exécutif du Soviet de Petrograd appela à son éviction, en prédisant que « le congrès panrusse des soviets créera un pouvoir véritablement révolutionnaire ».

Le piège du pré-parlement

Les conciliateurs entendaient transformer la Conférence démocratique en pré-parlement afin de disposer dʼune assemblée où ils seraient majoritaires et qui serait susceptible de disputer aux soviets « bolchévisés » le monopole de la représentation populaire. Ce pré-parlement, constitué de 15 % des membres de chaque fraction à la Conférence et de représentants de la bourgeoisie, siégea au palais Marie sous le titre frauduleux de « Conseil de la République ». Ses 308 sièges étaient occupés par 120 SR (dont seulement une vingtaine de gauche), 6o bolcheviks, 66 mencheviks, des coopérateurs, des délégués du Comité exécutif paysan et par 156 représentants de la bourgeoisie (dont la moitié de Cadets). En sʼappuyant sur les membres conservateurs de la « démocratie », la droite, pourtant décrédibilisée jusquʼau plus haut point depuis lʼéchec cuisant de Kornilov, avait donc la majorité ! Selon Trotski, ce pré-parlement croupion se trouvait « en contradiction criante et absolue avec toutes les manifestations de la volonté de la ville et du village ».

Ce « Conseil de la République » fut ouvert le 20 octobre par Kerensky, alors que les bolcheviks nʼavaient pas encore tranché la question de leur participation. Début octobre, le Comité central vota pour le boycott du pré-parlement à 9 voix contre 8. Mais le groupe des délégués à la Conférence démocratique opta, lui, pour la participation. Il fut alors décidé de soumettre la question à une conférence du parti composée des délégués de la Conférence démocratique, des membres du Comité central et du Comité de Petrograd. Le 20 septembre, lors de cette réunion extraordinaire, on valida par 77 voix contre 50 la participation au pré-parlement « pour dénoncer toute tentative de nouvelle coalition avec la bourgeoisie ». Pour Trotski, cette discussion interne « renouvelait les dissensions dʼavril et préparait celle dʼoctobre » sur la question de la conquête du pouvoir, car la décision de la conférence remplaçait au fond « la politique de lʼaction révolutionnaire par la politique dʼune opposition accusatrice ».

Cʼen est trop pour Lénine. Depuis la Finlande, il écrit quʼil faut donner aux masses « un mot dʼordre juste et clair : chasser la bande bonapartiste de Kerensky avec son fallacieux pré-parlement. [...] Trotski était pour le boycottage. Bravo, camarade Trotski ! ». Il menace même de démissionner de CC pour mener campagne auprès des militants de base sur son orientation personnelle. En sʼappuyant habilement sur lʼautorité naturelle quʼexerce Lénine sur des cadres chamboulés, Trotski parvient, le 18 octobre, à convaincre la fraction bolchévique de quitter cette caricature de parlement. La déclaration bolchévique, lue en séance par Trotski sous les huées indignées, se conclue de la sorte : « Avec ce gouvernement qui trahit le peuple et avec ce Conseil défaillant devant la contre-révolution, nous nʼavons rien de commun. En quittant le Conseil provisoire, nous appelons à la vigilance et au courage les ouvriers, les soldats et les paysans de toute la Russie ».

Le pré-parlement expurgé de ses membres bolchéviques nʼarriva même pas à adopter une position ferme sur le relèvement des capacités combatives de lʼarmée. La formule des SR regroupa 95 voix contre 127 et celle de la droite 135 contre 139. Selon Trotski, « lʼimpasse du pré-parlement était lʼimpasse du régime ».

Combat pour un congrès

Le congrès des soviets était censé être convoqué tous les trois mois, mais le Comité exécutif central élu en juin nʼétait guère pressé à lʼidée de remettre son pouvoir à une majorité de délégués bolchéviques... Le 4 octobre, peu avant la fin de la Conférence démocratique, les représentants du Soviet de Petrograd, sur rapport de Trotski et du moscovite Boukharine, avaient exigé sa convocation dans les plus brefs délais. La résolution, évoquant la nécessaire coordination des soviets « dans leur lutte contre le danger imminent » de contre-révolution, avait été conçue pour apparaître comme un texte purement défensif. Selon Trotski, cʼest « sur ce diapason politique [que] se développa désormais lʼagitation jusquʼau moment même de lʼinsurrection ». La question fut posée le 5 au Comité exécutif central. Mis au pied du mur, il fut contraint dʼavancer imprudemment la date du 2 novembre. Mais, le 9 octobre, Dan présenta sans vergogne au Bureau du Comité la proposition de différer la convocation en train de devenir, pour des chefs soviétiques devenus minoritaires, une véritable arlésienne.

Les conciliateurs sʼopposèrent de toutes leurs forces à cette décision, pourtant « prise deux fois par le plus haut organe soviétique », comme le remarque justement Trotski. Le journal SR Délo Naroda fit ainsi savoir que « le gouvernement Kerensky ne se soumettra en aucun cas » à ce qui risquait de mener au « pouvoir de Trotski et de Lénine ». Quant au Comité exécutif paysan, il qualifia cette convocation de « dangereuse et indésirable ». Dès le 7 octobre, le Comité central bolchévique appela les organes du parti, les soviets locaux et les organisations de soldats à mener une campagne offensive pour la convocation. Un congrès des soviets du Nord de la Russie, appelé par les seuls bolcheviks, et regroupant des délégués de Petrograd et de sa région, de Moscou, de Cronstadt, dʼHelsingsfors et de Reval fut un véritable succès. Une résolution proposée par Trotski, affirmant que « cʼest seulement par une marche audacieuse et unanime de tous les soviets que peut être résolue la question du pouvoir central », est adoptée à lʼunanimité moins trois absentions. Avec le Bureau issu de ce congrès régional, les bolcheviks disposaient dʼune institution sʼappuyant sur les masses pertersbourgeoises et moscovites, dont la légitimité populaire valait bien celle du Comité exécutif conciliateur en vue de la convocation du IIe  Congrès.

Ce combat démocratique à la base permit de gagner aux bolcheviks, parfois avec leurs alliés SR de gauche, les derniers soviets attachés aux conciliateurs, notamment dans la province de Smolensk et en Sibérie. Le 31 octobre, à Petrograd, la liste bolchévique pour le Congrès obtint 443 voix, contre 162 aux SR – tous marqués à gauche – et contre seulement 44 voix pour les mencheviks. Le lendemain, le congrès des soviets de lʼOural et la conférence panrusse des comités dʼusine se déclarent favorables à la transmission immédiate du pouvoir aux soviets. Le 2 novembre, à Ivanovo-Voznessensk, on déclare tous les soviets de la province éponyme « en état de lutte ouverte et implacable avec le gouvernement provisoire ». Signe des temps, cet appel à peine camouflé à lʼinsurrection est adopté à lʼunanimité moins une voix et une abstention ! Dès la fin octobre, de guerre lasse, le Comité exécutif avait confirmé la convocation du IIe Congrès tout en la repoussant de quatre jours, soit au 6 novembre (le 25 octobre dans le calendrier julien encore en vigueur).

Comme le note judicieusement Trotski, « coordonnant les efforts révolutionnaires […], leur donnant de lʼunité dans le but et fixant un seul délai, le mot dʼordre du Congrès des soviets couvrait en même temps la préparation à demi conspiratrice, à demi ouverte de lʼinsurrection par un constant appel à une représentation légale des ouvriers, des soldats et des paysans ».

Crise chez les bolcheviks

Dès le 28 septembre, en marge de la convocation de la Conférence démocratique, le Comité central bolchévique avait inscrit à son ordre du jour la discussion des deux lettres de Lénine à son intention : « Les bolcheviks doivent prendre le pouvoir » et « Le marxisme et lʼinsurrection ». « Nous étions tous abasourdis », reconnut des années plus tard Boukharine. Ce jugement est largement en deçà de la réalité, puisquʼà lʼissue de la lecture de ces missives de leur leader historique, les dirigeants bolchéviques décidèrent purement et simplement... de les brûler pour éviter toute fuite ! Le 12 octobre, Lénine persiste et signe en faisant parvenir à la rédaction du journal bolchévique « La crise est mûre ». Dans un addendum réservé aux cadres du parti, il déclare que « laisser échapper lʼoccasion présente et attendre le Congrès des soviets serait une idiotie complète ou une trahison complète ». Lénine vise ici la tendance du Comité central regroupée autour de Trotski qui entend faire coïncider le IIe Congrès et le soulèvement populaire. Installé clandestinement dans les faubourgs nord de Petrograd depuis quelques jours, Lénine fait parvenir au Comité central les « Conseils dʼun absent » où il rappelle les règles de lʼinsurrection consignées par Marx et Engels.

Le 23 octobre, selon P. Broué, « Lénine, déguisé et rasé, est à Petrograd, discute passionnément et obtient finalement, par dix voix contre deux, le vote dʼune résolution en faveur de lʼinsurrection, « inévitable et complètement mûre », invitant « toutes les organisations du parti à étudier et à décider toutes les questions dʼordre pratique, conformément à cette directive » ». Dès le lendemain, Zinoviev et Kamenev font appel de cette décision décisive en rédigeant une « Lettre sur le moment présent » adressée aux principales organisations du parti où les deux opposants se disent « convaincus que dʼappeler à présent à une insurrection armée revien[drai]t à jouer sur une unique carte non seulement le sort de notre parti, mais aussi celui de la révolution russe et internationale ».

Le 29 octobre, un Comité central élargi confirme, par 19 voix contre 2 et 4 abstentions, la décision du 23, puis repousse une résolution de Zinoviev proposant de suspendre les préparatifs de lʼinsurrection jusquʼà la réunion du congrès des soviets. Le soir même, Kamenev remet sa démission de membre du CC, comme Lénine avait menacé de le faire trois semaines plus tôt pour faire pression sur ses camarades irrésolus.

Deux états-majors sont nommés : un Comité bolchévique de cinq membres (Sverdlov, Staline, Dzerjinski, Ouritski et Boubnov) qui ne jouera pratiquement aucun rôle dans le déroulement des événements et un Comité militaire révolutionnaire du Soviet de Petrograd, présidé par Trotski et où les bolcheviks, majoritaires, sʼassocièrent à des SR de gauche. Cʼest ce second comité, déployant une activité débordante – autour de Podvoïski, de Krylenko et dʼAntonov-Ovseenko notamment – qui sera le véritable organe de la prise du pouvoir. Toutefois, aucune date nʼest réellement fixée par le Comité, tant il fut difficile dʼétablir une jonction solide entre la garnison de la capitale, la Garde rouge et la flotte de la Baltique.

 

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