GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

International – Europe

Avoir mis Ko la droite Les français méritent une bonne gauche aux européennes !

Une fois encore, comme il le fait inlassablement depuis un quart de siècle, le peuple français vient de démontrer son étonnante capacité de résistance au libéralisme. (...)

Les électeurs ont décidé de sanctionner la droite comme rarement dans l'histoire grâce notamment à une mobilisation bien plus importante que prévue des couches populaires et de la jeunesse. Ils l'ont fait avec intelligence, sans se priver d'envoyer un message en accordant au premier tour un bonus à toute liste dans laquelle ils ont vu - ou pensé voir parfois - la volonté à la fois de battre la droite et de changer la gauche. (...)

Pourtant, devant la carte électorale qui s'affichait dimanche soir sur nos téléviseurs, il serait dangereusement illusoire de penser que cette réaction populaire clôt la période symbolisée par le 21 avril 2002.

En deux ans, notre peuple n'a pas changé du tout au tout. Il existait probablement au printemps 2002 une majorité potentielle pour envoyer un Président de gauche à l'Elysée. Elle n'a simplement plus cru essentiel d'élire celui qui, depuis l'affaire Michelin, lui avait finalement expliqué que le politique ne pouvait plus rien face aux décisions du marché roi. Alors même que Lionel Jospin avait justement assis sa victoire de 97 sur le primat du politique sur l'économie et le retour de la République en toutes choses.

Conséquence de ce désaveu, les électeurs de gauche avaient été contraints de voter Chirac pour faire barrage au pire. Mais avec la rage au cœur. Plusieurs raisons seront certainement avancées pour expliquer la gifle infligée au locataire de l'Elysée mais c'est sans nul doute dans cette rage contenue depuis deux ans qu'il faut chercher la raison de sa brutalité.

Pour autant ce vote sanction ne vaut évidemment pas adhésion. Les tendances lourdes de la période marquées par une forte crise sociale et politique et l'incapacité de la gauche à présenter un projet alternatif aux dégâts du libéralisme sont toujours présentes. (...)

Mais l'autre grand rendez-vous politique, celui même auquel ces étonnantes régionales redonnent toute son importance, c'est bien sûr les élections européennes. Oubliée pour cause de refus des gouvernements espagnols et polonais, et pour le plus grand bonheur d'une partie de la gauche ayant ainsi la possibilité d'évacuer la question sans se mouiller, le projet de constitution Giscard revient au galop au point que l'on songe à l'entériner lors du sommet européen de mi-juin. Déjà son adoption est présentée comme incontournable, presque naturelle. Or ce rendez-vous décisif aura lieu quelques jours après les élections. Cette conjonction va donc contraindre la gauche à clarifier ses positions sur ce qui n'est rien de moins qu'un projet de société, celui-là même, globalisé à l'échelle de notre continent, que notre peuple vient encore de refuser. Un projet qui a le double défaut de graver le libéralisme dans les tables de la loi européenne et d'imposer par le haut une constitution dans le droit fil des méthodes de construction non démocratique de l'Union européenne. Les forces qui se revendiquent de la gauche antilibérale sont donc devant leurs responsabilités : la coïncidence de ces deux rendez-vous leur donne l'obligation d'articuler mobilisation populaire contre la constitution et campagne électorale. Cette situation d'urgence, mais également d'espoir, et le mode de scrutin tout aussi incompréhensible et pénalisant pour les « petites » listes, réclament que tous ceux qui, à gauche, ont le courage de rompre avec les dogmes ambiants et de s'opposer à l'Europe libérale, se présentent unis devant les électeurs. Notre peuple vient, une fois de plus, de trop bien se manifester pour ne pas mériter d'être doté d'une bonne gauche : celle qui aura pour volonté de mettre au centre de son projet politique pour la France et l'Europe le combat pour la justice sociale et le respect et le développement de la souveraineté populaire.

Eric Coquerel est Président du Mars (Manifeste pour une Alternative Républicaine et Sociale)

Christophe Ramaux est économiste à Paris 1

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