GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Actions & Campagnes politiques

Attac et les retraites

Objet : Propositions de la Commission travail, retraites, emploi pour le Conseil d'administration du 26 avril.

La Commission travail, retraites, emploi s'est réunie pour la première fois le mardi 15 avril(1). Compte tenu de l'offensive patronale et gouvernementale actuelle contre les retraites, la Commission propose différentes initiatives au Bureau d'Attac afin d'organiser un débat lors du Conseil d'administration du 26 avril.

La réforme des retraites et la décentralisation de l'Education nationale sont les deux terrains sur lesquels le gouvernement lance aujourd'hui son offensive afin d'obtenir une victoire sociale décisive. L'enjeu en est très politique. Il s'agit de la préparation d'un affrontement central.

Si le gouvernement l'emporte, la conséquence sera équivalente à la défaite des mineurs britanniques en 1986 : un reflux social de grande ampleur, pour de longues années, qui laisserait le terrain libre au néo-libéralisme.

Si le mouvement social qui est en train de se lever débouche sur un mouvement d'ensemble, comme en Nov-Déc. 95, ou une grève générale, le gouvernement sera plongé dans une crise politique.

Comme en Nov-Déc. 86 où Chirac-Devaquet ont cédé, comme en janvier 94 où Balladur-Bayrou ont cédé, comme en Nov-Déc. 95 où Chirac-Juppé ont cédé, nous sommes engagés dans la voie de l'affrontement que la droite cherche depuis longtemps. Nous devons faire céder Chirac-Raffarin mais, s'ils s'entêtent et vont jusqu'au bout, le résultat sera acquis pour longtemps. Tel est l'enjeu.

Pour le moment rien n'est joué, les camps se forment et se jaugent. La grève reconductible de l'Education nationale s'étend peu à peu et elle sera généralisée le 6 mai, lorsque toutes les académies auront terminé les vacances de Pâques. Les organisations syndicales ont, unitairement, ouvert cette perspective. Le gouvernement mène campagne pour faire croire que ses réformes sont indispensables, qu'elles n'ont que trop tardé. Dans un contexte où la droite dispose d'une telle majorité et que, en dehors d'une crise politique, il est assuré d'obtenir le vote des parlementaires ; où la commission européenne est à l'avant-garde de l'AGCS et du dumping social par l'élargissement de l'Europe ; où la Convention de Giscard enrobe de dentelle la mise en place d'une vaste zone de libre-échange, le néo-libéralisme dispose d'une fenêtre pour lancer ses initiatives contre les services publics et contre la République. Dans ce contexte, l'opinion publique est partagée par manque d'information, mais selon certains sondages nous disposons déjà d'un petit avantage. La campagne d'Attac, les choix des directions syndicales et le mûrissement du mouvement d'ensemble vont être déterminants.

Deux échéances vont tirer la mobilisation puis lui servir de tremplin : les manifestations du 1er mai et la manifestation nationale intersyndicale du samedi 24 mai pour les retraites. Nous devons caler nos initiatives par rapport à ces échéances. Le 24 mai, l'objectif de mobilisation doit être de l'ordre de plusieurs centaines de milliers de manifestants à Paris.

Deux types d'initiatives sont proposés :

une initiative politique centrée sur la demande d'un référendum à partir de nos contenus ;

la mise en œuvre d'une campagne d'Attac pour les retraites.

I. - Une initiative politique centrée sur la demande d'un référendum sur nos contenus

Si le Conseil d'administration retient l'idée d'un référendum, il faudra en justifier les raisons et préciser la manière de la populariser.

A. - Le choix de civilisation que représente le système des retraites justifie un référendum

La demande d'un référendum sur les retraites est justifiée par l'ampleur de la question des retraites. Celle-ci, en effet, ne saurait se limiter à un simple problème de financement des régimes de retraite. Elle concerne la solidarité entre les générations, le niveau de vie des retraités présents et futurs, l'égalité entre les hommes et les femmes, le rythme et le contenu de la croissance économique, l'avenir de nombreux départements français à dominante rurale et qui tirent une partie significative de leurs revenus des retraités…

La question des retraites prend donc la dimension d'un choix de civilisation. Un tel choix ne peut relever de la seule décision des parlementaires, même si Attac ne remet pas en cause leur légitimité. Il revient au peuple et à lui seul, directement, de trancher. C'est la raison pour laquelle Attac devrait lancer l'idée d'un référendum sur les retraites.

Certains pourraient rétorquer que la Constitution n'autorise un référendum que dans le cas d'une « modification de l'organisation des pouvoirs publics ». Sans entrer dans un débat de droit constitutionnel qui serait hors sujet, Attac peut simplement répliquer que la Constitution a été plusieurs fois modifiée ces dernières années pour différentes raisons, et qu'elle peut donc l'être à nouveau sur un sujet d'une si grande importance.

D'autres pourraient objecter qu'un référendum contribuerait à court-circuiter les syndicats en réduisant leur rôle dans les négociations avec le gouvernement. Un tel référendum, dans la perspective d'Attac, ne peut viser qu'à prolonger et amplifier l'action des syndicats pour une réforme progressiste des retraites.

Cette demande de référendum serait bien entendu associée au contenu que nous proposons pour une réforme progressiste des retraites.

B. - L'idée d'un référendum sur les retraites pourrait être lancée lors d'une conférence de presse

Si le Conseil d'administration admet l'idée du référendum sur les retraites, son lancement pourrait s'opérer à l'occasion d'une conférence de presse. Celle-ci devrait se tenir le vendredi 9 mai puisque le gouvernement doit annoncer le contenu de sa réforme le 7 mai.

Le 7 mai au soir, Attac pourrait diffuser un premier communiqué avançant l'idée du référendum et annonçant la tenue de la conférence de presse.

Un tract devrait être tiré dès le 9 mai pour diffusion massive.

Le communiqué de presse argumentant l'idée du référendum pourrait être adressé largement aux associations, syndicats, partis politiques.

Des conférences de presse identiques pourraient se tenir le même jour à l'échelon régional, départemental et local, à l'initiative des Comités locaux d'Attac.

Tout ceci serait accompagné d'une synthèse de nos propositions.

II. - Une campagne d'Attac pour les retraites

Cette campagne pourrait s'organiser autour de deux catégories d'initiatives :

la construction de fiches argumentaires, de tracts thématiques et d'affichettes ;

une série d'initiatives locales.

A. - Construction de fiches argumentaires, de tracts thématiques et d'affichettes

Ces fiches argumentaires devraient faire environ quatre feuillets et être associées à un tract. La Commission propose les thèmes suivants :

Les jeunes et la retraite.

Les femmes et la retraite.

Les chômeurs et précaires et la retraite.

Les non-salariés et la retraite.

Retraites et démocratie.

La croissance économique et les retraites.

Territoires et retraites.

Décryptage du projet gouvernemental.

Un référendum pour les retraites.

Les affichettes pourraient contenir les mots d'ordre suivants :

« Retraite à 75 % du salaire, 100 % pour les smicards ».

« Solidarité entre les générations ».

« Protégeons nos retraites par répartition ».

« Faire baisser le montant des retraites ou les maintenir en augmentant les cotisations ? »

« Au lieu de jouer nos retraites en Bourse, augmentons les cotisations sociales ! ».

« Abrogation des 3 mesures Balladur ».

« Egalité public-privé : 37,5 pour tous ».

« Par sa réforme des retraites, le gouvernement s'attaque aux jeunes ».

« La réforme Raffarin des retraites pénalise les femmes ».

« Les chômeurs et les précaires ont droit à une retraite de solidarité ».

« Les non-salariés ont droit à une retraite équitable ».

« Le gouvernement veut confier les retraites aux assurances privées ».

« La démocratie pour la Sécu ».

Etc.

Ce matériel de communication serait à diffuser au cours des manifestations du 1er mai, du week-end de mobilisation citoyenne des 16-17-18 mai et dans les trains intersyndicaux avec lesquels les Comités locaux organiseront la montée pour la manif nationale du samedi 24 mai.

B. - Une série d'initiatives locales

Six types d'initiatives locales peuvent être proposées :

conférences débat sur les retraites dans les Comités locaux ;

un week-end de mobilisation citoyenne pour les retraites ;

une pétition pour les retraites ;

mise en place de Comités de défense des retraites ;

organisation de « communes pour que vivent les retraites » ;

inscription de la question des retraites à l'ordre du jour des Forums sociaux locaux.

1. - Conférences débat sur les retraites dans les Comités locaux

Les Comités locaux pourraient être invités à organiser une conférence débat sur les retraites d'ici la fin du mois de juin. Cette proposition ne s'appliquerait évidemment qu'aux Comités n'ayant jamais tenu de telles conférences.

2. - Week-end de mobilisation citoyenne pour les retraites les 16, 17 et 18 mai

Annoncé lors de la conférence de presse du 9 mai (et lors des conférences de presse décentralisées), ce week-end de mobilisation citoyenne se déroulerait du 16 au 18 mai. Il pourrait se traduire par les initiatives suivantes :

distribution de tracts sur le plus grand nombre possible de marchés et de grandes surfaces commerciales (avec éventuellement des panneaux d'exposition) ;

distribution de tracts à la porte des entreprises, des lycées, dans les établissements universitaires.

3. - Pétition pour les retraites

Cette pétition serait proposée aux citoyens et adressée aux députés dans chaque circonscription. Elle viserait à demander au député de la circonscription de prendre l'engagement public de ne pas voter le texte gouvernemental sur les retraites lors du débat au Parlement. La remise de cette pétition pourrait donner lieu à des initiatives particulières (délégation ou manifestation à la permanence du député en convoquant le presse,etc.).

La pétition pourrait débuter lors du week-end de mobilisation sur les retraites et annoncée lors des conférences de presse du 9 mai.

4. - Mise en place de Comités de défense des retraites

Ces Comités de défense des retraites, organisés à l'échelon local (commune, canton, pays, circonscription…), auraient pour but de rassembler les organisations locales (associations, syndicats, partis politiques, élus) afin d'agir pour la défense des retraites.

Si des collectifs variés ont vu le jour ces derniers temps sur différentes questions (contre la guerre ou le G8 par exemple), d'autres collectifs peuvent voir le jour pour les retraites.

5. - Organisation de « communes pour que vivent les retraites »

Cette initiative viserait à obtenir des délibérations des conseils municipaux (éventuellement conseils généraux et régionaux) condamnant le projet gouvernemental sur les retraites et proposant une réforme progressiste. Un « modèle » de délibération pourrait être proposé aux Comités locaux d'Attac afin de le soumette à la discussion des élus de leur région.

Chaque commune ayant adopté de telles délibérations apposerait, sous les panneaux routiers indiquant l'entrée et la sortie de la commune, un placard indiquant « Commune pour que vivent les retraites ».

6. - Inscription de la question des retraites à l'ordre du jour des Forums sociaux locaux

Partout où des Forums sociaux se tiennent, et là où il n'en existe pas encore, les Comités locaux d'Attac pourraient proposer des séances consacrées aux retraites (plénières, ateliers…).

Parmi les propositions faites par la commission « travail-emploi-retraites », l'organisation de comités que nous pourrions appeler « égalité-solidarité de défense des retraites et des services publics » pourrait permettre de regrouper des militants qui, avec le soutien formel de syndicats et d'Attac (comité E-S soutenu par…) qui viendront pour participer à l'élaboration d'un matériel local (auto-collants, affichettes « égalité-solidarité avec attac, fsu… »), à l'organisation de différentes initiatives (le week-end des 16-17-18 mai…).

Les comités « égalité-solidarité » pourraient se former autour de la pétition adressée aux députés mais centralisée au niveau national pour être portée en copie à la Présidence de la République en ayant réuni plusieurs centaines de milliers de signatures (est-il utopique d'en rassembler peut-être davantage sur le modèle de la pétition laïque contre la loi Debré en 1960 ?). Autre option possible : au lieu de multiplier les pétitions, est-il préférable de reprendre la pétition lancée par cent personnalités avec le soutien de la Fondation Copernic et sur laquelle le Bureau avait proposé des amendements ?

Les propositions ci-dessus sont celles qu'Attac devrait faire à tous les partenaires possibles pour être d'emblée organisées dans un cadre plus large. Mais Attac devrait, sans attendre, se lancer dans les actions proposées, quitte à les transformer en actions unitaires lorsque les conditions seront créées.

Avec de l'audace dans ses propositions, Attac peut aider à la maturation de ce mouvement d'ensemble qui est en constitution et aider le mouvement social à répondre aux enjeux en exprimant consciemment la combativité qui se lève pour défendre les retraites et les services publics.

Pour qu'Attac puisse jouer ce rôle, l'information et la formation de ses militants sur les thème de la mobilisation est décisive : retraites essentiellement, mais là où cette question a été assez travaillée, services publics, notamment l'Education nationale face à la décentralisation, mais aussi Sécurité sociale et tous les services menacés par l'AGCS. Tel devrait être l'objet de conférences-débats organisées par Attac, mais aussi de Forums sociaux locaux qui ont une dimension unitaire et ouverte. Conférences-débats et FSL ont aussi un rôle de formation de nouveaux adhérents et de recrutement, à ce titre ils peuvent aussi venir comme préparation locale de l'Université d'été.

La Commission travail, retraites, emploi

Document PDF à télécharger
L’article en PDF

(1): Etaient présents : Catherine Carmer Duvernet (comité local), Cécile Ganeval (comité local), Jérôme Greffion (groupe Attac-Campus ENS), Michel Husson (conseil scientifique), Pierre Khalfa (Bureau national), Bernard Kervella (conseil scientifique), Anne-Marie Le Suérin (comité Nord Essonne), Jacques Nikonoff (président d'Attac), Robert Pallu (comité local), Christian Pilichowski (Bureau national), Daniel Rallet (Bureau national). (retour)

Inscrivez-vous à l'infolettre de GDS




La revue papier

Les Vidéos

En voir plus…