GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Au Parti socialiste

Après Cuincy, l'espoir?

Il se pourrait que notre université de rentrée qui s'est tenue fin Septembre à Cuincy ait avec le temps un impact politique significatif qui aille au-delà de ce qu'ont vécu les participants lors des Ateliers, des Tables Rondes , du Forum débat final, et naturellement du « Grand Oral » de Laurent Fabius. Et pourtant, de l'avis général, les militants présents ont apprécié la qualité des interventions et des discussions et sont ressortis de ces trois jours raffermis dans leurs convictions et décidés pour la pré-campagne interne qui s'est ouverte officiellement trois jours après. Alors, que s'est il donc passé de spécial à Cuincy ?

Au premier chef, Forces Militantes pour la Démocratie et le Socialisme (FMDS) a démontré sa capacité à maintenir de manière cohérente et lisible la ligne politique qui a toujours été la sienne :

Ancrage à gauche du parti sur des positions fermement anti- libérales et en vue de transformations profondes de la société actuelle, propositions d'une République sociale nouvelle, interactions permanentes avec le monde du travail et les associations , militantisme de terrain, fonctionnement démocratique, rénovation du parti socialiste et des pratiques politiques des responsables,.......En un temps où on voyait tant de nos compagnons de route à l'intérieur de la gauche du parti prendre des positions incompréhensibles, cette constance peut se révéler importante pour la suite. Dans cette perspective, notre soutien à Laurent Fabius, tout en restant nous-mêmes, s'est révélé logique; il a été approuvé à l'unanimité. Et ce d'autant plus que les échanges que nous avions eus ont montré que nos positions respectives se rapprochaient de plus en plus.

A cet égard, une précision s'avère nécessaire : Nous avons été les seuls à voter contre le projet « Réussir ensemble le changement », et Laurent Fabius, que nous soutenons, s'en fait le défenseur acharné. En fait, nous avons reproché au projet son flou qui pouvait donner lieu à toutes les interprétations, et notamment les plus droitières. La suite nous a donné raison : Il se trouve que L.Fabius a été amené à le prolonger et à le préciser, à partir d'une ligne de gauche, tandis que ses compétiteurs prenaient des distances avec « ce qui n'était pas le petit livre rouge » et en donnaient des interprétations plutôt droitières. Le projet était donc bien flou, et, en lui-même, il n'était porteur d'aucune dynamique vis-à-vis de nos électeurs. Pour qu'il ait un sens et qu'il parle au plus grand nombre, il faut donc le remettre en perspective. C'est ce que L.Fabius a fait, et dans le bon sens.

Deuxième fait important : Toute la gauche du Parti s'est trouvée rassemblée au travers des présences et des interventions de A.Ferreira, de M.Moglia, de J. Généreux,

d'A. Corbière, de M.N. Liennemann.

Ils ont tous dit la même chose : Certes, nous pouvons avoir eu des itinéraires différents, nos positions ne sont pas complètement identiques, certains ont voté la synthèse au Mans et d'autres ne l'ont pas votée mais, globalement, et on le voit à l'occasion de ce rassemblement à Cuincy et derrière L.Fabius, ce qui nous rassemble est très fort. Dans une situation politique qui exige une mobilisation de tous face aux agressions d'une droite dure et aux risques de démission idéologique du P.S., dans un monde où la résistance au capitalisme financier et aux dégâts qu'il cause s'organise, le P.S. se doit de peser de tout son poids, de ne pas décevoir et d'initier une dynamique nouvelle. Il ne le fera que si la gauche du parti joue son rôle non seulement d'aiguillon, mais de proposition et prend des initiatives, en relation avec toute la Gauche.

D'autres camarades, et en particulier d'anciens co-responsables de la motion 5 aussi éminents que V.Peillon et A.Montebourg, ne se sont pas inscrits dans cette dynamique. Ils ont préféré se joindre, au nom de la « rénovation », à tout un appareil de parti qu'ils dénonçaient vigoureusement hier pour suivre une candidate dont les options droitières ne font aucun doute, et dont toutes les déclarations montrent qu'elle veut remplacer le parti d'Epinay par autre chose qui ne peut qu'inquiéter. Nous sommes les premiers à appeler à la rénovation de P.S., mais pas sous la forme d'un parti de supporters fonctionnant sous le régime d'une « démocratie participative » particulièrement confuse au plan politique. Nous prenons date pour affirmer qu'il s'agit d'une erreur historique, à laquelle il ne faut s'associer, ni de près ni de loin. On y reviendra.

Les échanges que nous avons eus, à Cuincy et à propos de Cuincy, avec les autres forces de gauche (présence effective de G.Sarre -MRC-, message de F.Bavay-Les Verts-, discussions avec P.Cohen-Seat -PCF-, E.Zuccarelli -PRG- et C.Debons-Collectifs du 29 mai-,... ) mettent aussi en évidence une large base d'accord sur les grandes orientations d'une alternative anti-libérale.

Mais, pour autant, rien n'est encore clairement possible : On essaie de se réunir pour prolonger le magnifique élan collectif ayant conduit au vote du 29 mai, mais chacun est en même temps amené à vouloir préserver les intérêts à court terme de sa formation et veille à l'accès aux médias. La présidentialisation du régime, le calendrier électoral faisant précéder les législatives par la présidentielle, la loi sur le financement des partis..., tout concourt à des réflexes « boutiquiers » au détriment de ce qui pourrait être de la vraie politique au service de ceux qui souffrent. Sans même parler pour certains d'une défiance maladive vis-à-vis du P.S. et de tout acte susceptible de conduire à une participation gouvernementale, ce qui restreint totalement leurs analyses et les cantonne dans une éternelle attitude protestataire coupée du peuple.

Il n'en demeure pas moins que FMDS a montré qu'il pouvait constituer une passerelle solide entre une partie du P.S. et le reste de la Gauche. Et cela est précieux. Il faut continuer à échanger sur le fond, et pas seulement sur d'éventuelles circonscriptions. FMDS continuera donc à conserver ses liens privilégiés avec le reste de la Gauche et participera à tous les échanges nécessaires et utiles, aujourd'hui et demain.

A quoi sert FMDS ? A quoi cette sensibilité est utile ? Un courant, une sensibilité à l'intérieur d'un parti comme le P.S. ne devrait pas avoir pour objectif de perdurer ou de se développer au service des ambitions de tel ou tel responsable évidemment éminent, mais il n'a d'intérêt que s'il apporte quelque chose de spécifique et de nouveau à la collectivité intérieure et extérieure au parti. A Cuincy, nous pensons avoir été utiles.

Mais Cuincy n'est évidemment pas une fin ; c'est un moment dans une histoire ; en l'occurrence, cela a été en tout cas, le début d'une campagne interne de désignation dont chacun perçoit bien le caractère essentiel. Non du fait de l'affrontement de trois personnalités, de trois ambitions légitimes, et de trois visions politiques différentes. L'histoire de ce parti socialiste est riche de tels affrontements, depuis Jaurès et Guesde jusqu'à Mitterrand et Rocard ; elle s'est même enrichie des débats qui ont accompagné ces affrontements.

Dans notre cas, si par exemple l'opposition entre Fabius et D.S.K. relève bien du même schéma, nous avons le sentiment que S. Royal a introduit une dimension supplémentaire : Elle affirme qu'il faut passer par-dessus les partis, que ceux-ci sont inutiles parce qu'ils sont archaïques, que seuls les citoyens, lorsqu'ils sont consultés, en particulier par internet, détiennent un savoir utile, que le responsable politique doit entretenir avec l'Opinion des rapports privilégiés. Dans cette optique, parler de rénovation du parti a une saveur particulière : Cela ne touche pas la démocratisation, sa représentativité vis-à-vis de la société, la fabrication des « élites responsables », les pratiques politiques, le bornage des mécanismes de pouvoirs, toutes choses où il y a tant de choses à faire, tant à rénover. Non, cela touche la conception même de l'organisation de la vie politique.

Et il se trouve que cette conception tourne le dos aux fondamentaux du socialisme : Sans parler des excès du régime présidentiel, il ne saurait en particulier y avoir de rapport direct entre un dirigeant, même adoubé, et le peuple. Le rôle d'un parti de gauche ne se limite pas à la désignation des futurs élus, il contribue par les débats qu'il structure à l'élaboration sans cesse renouvelée de la pensée politique, il organise les participations aux combats qui sont une constante d'une démocratie vivante, et il assure les relations collectives avec le monde du travail et avec la société civile. Nulle trace de tout cela dans les conceptions avancées par S.Royal. C'est pourquoi ce processus de désignation revêt une particulière importance, C'est pourquoi FMDS s'y est engagé si fortement.

Sans jouer au petit jeu des pronostics, il est certain que Cuincy représentera bien plus qu'une université de rentrée. En tout état de cause, ce sera une base solide vers la construction de l'espérance.

Marc Dolez et Robert Spizzichino

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