GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

Alternative impossible à Gauche "à coté" ou sans les socialistes

Si le fait majeur des élections européennes a été l’échec retentissant des listes socialistes, la

leçon qu’on peut aussi en tirer est que ce ne sont pas les «autres gauches» qui en auront profité.

Toujours en panne de stratégie, à défaut d’un réel projet commun, d’ailleurs, les autres

organisations politiques de gauche sont désormais face à leurs responsabilités.

Avec 12,6 %, l’ensemble des listes de l’autre gauche,

écologistes mis à part, n’est pas très loin du résultat des

listes socialistes. C’est un fait : une grande partie des

électeurs, et plus encore des militants, de gauche ne se retrouvent

pas dans le PS, et se cherche depuis plusieurs années.

Aucune des solutions alternatives qui leur ont été proposées

n’ont cependant jusqu’à maintenant prouvé leur efficacité politique.

Ce qui caractérise peut-être le plus cette « mouvance » antilibérale,

c’est son extrême volatilité. La dynamique enclenchée

après le referendum sur le TCE avec les collectifs unitaires antilibéraux

a volé en éclat sur l’écueil de la présidentielle, avec les

résultats que l’on sait.

Force est de constater, aujourd’hui, que la division règne toujours

parmi ceux qui entendaient, à l’époque, incarner une alternative

au Parti Socialiste.

Etrange attelage « écologiste »

Ainsi, le ralliement aux Verts de José Bové, un des principaux

acteurs de l’explosion des collectifs avant la présidentielle, qui

avait ensuite tenté de porter une candidature à l’Elysée sans

grand succès, montre que les fondements politiques de cette

mouvance reste à définir. Comment, en effet, passer d’une ligne

politique qui prétendait rallier des trotskystes aux alter-mondialistes,

en passant par les divers mouvements « alternatifs » et les

communistes, à un rassemblement mené par un ancien gauchiste

rallié au centre-gauche « libertaire » et une représentante de

la droite libérale « morale » ?

Qu’une part non négligeable de l’électorat de gauche se soit

finalement rabattu sur cette offre électorale peut être en soi rassurant

: cela signifie que ceux qui, sans aucun doute, avaient

choisi Bayrou plutôt que Royal à la présidentielle ont voulu,

cette fois-ci, marquer leur refus d’une alliance des socialistes

avec la droite en réaffirmant leur ancrage à gauche, même si

c’est une gauche qui, au-delà de son message environnemental,

est bien floue.

Pour autant, la présence de José Bové dans cet attelage hétéroclite

n’a en rien permis de reposer les questions politiques qui

avaient été au centre du débat autour du TCE. Pis encore, on

peut penser qu’elle a permis de les taire et de laisser entendre

que ces questions étaient « dépassées ».

En tout état de cause, « Europe écologie » ne peut pas constituer

une force politique susceptible de porter un programme et une

alternative politique lors des échéances nationales, faute d’une

cohérence y compris sur les fondements d’une ligne politique.

Pas d’OPA du NPA

A l’inverse, le résultat des listes présentées par le Nouveau Parti

Anticapitaliste (moins de 5 %) montre l’échec de l’entreprise

menée par le courant majoritaire de la LCR. De fait, le NPA a

moins bien réussi que la LCR, alors que les trotskystes de Lutte

Ouvrière retombaient dans la marginalité électorale, ouvrant

ainsi une réserve au NPA. Le projet de faire de ce « nouveau »

parti, qui n’est en fait qu’une transformation cosmétique de

l’ancien, le rassemblement politique de toute la gauche endehors

du PS en tentant de rafler seul la mise et en mettant à

l’écart toutes les autres organisations, n’aura pas fonctionné.

Ce résultat, finalement assez surprenant au vu de la surface

médiatique du NPA et de la dynamique qu’il prétendait avoir

créé, témoigne du peu d’écho de sa logique de refus de l’unité.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la ligne consistant à

calquer les mots d’ordre politique sur les démarches syndicales

(et notamment les slogans autour de l’idée que les salariés ne

« paieraient pas » la crise), a surtout révélé l’écart entre la

démarche unitaire du syndicalisme et celle de rupture du NPA.

Malheureusement, renier cette démarche qui consiste à la fois à

refuser toute perspective de rassemblement de toute la gauche,

mais aussi condamner tout rapprochement avec ceux qui envisagent

une démarche unitaire, reviendrait à remettre en cause le

projet fondateur du NPA. Si l’on peut espérer un sursaut des

militants, notamment les plus nouveaux, il y a fort à craindre

que l’appareil, lui, reste fidèle à cette ligne qui, à défaut d’avoir

changé quoi que ce soit au rapport de force politique, lui a du

moins permis de se maintenir comme appareil.

Quel avenir pour le «Front de gauche» ?

Le Front de gauche, lui, a réussi une entrée discrète mais loin

d’être anecdotique, dans le paysage politique. Profitant à la fois

de l’organisation politique du PCF et de l’apport de nouveaux

militants qui ont rejoints, souvent en nombre, le Parti de

Gauche. La dynamique unitaire a profité à cette coalition qui

avait l’avantage d’une ligne politique claire, et d’un positionnement

qui, malgré des ambiguïtés, s’inscrivait dans une

démarche d’union de la gauche.

Pour autant, là encore, si l’unité a pu se faire sur la question

européenne, les approches sont différentes entre des communistes

en pleine crise d’identité, d’anciens socialistes qui ont

trouvé dans le PG un mode de rupture avec le PS, et enfin d’anciens

de la LCR, rassemblés au sein de la Gauche Unitaire, dont

le credo est précisément le rassemblement de tous ceux qui ne

veulent pas d’une union de toute la gauche ! Il semble donc

clairement que les rassemblements ou coalition ponctuelles

échouent tous plus ou moins sur l’écueil de la stratégie politique,

et plus particulièrement de l’attitude vis-à-vis des socialistes

qui, d’une certaine façon, détiennent la réponse à ce

problème.

En effet, si le Parti Socialiste s’engage résolument dans une

démarche de rassemblement de toute la gauche, et abandonne

l’idée un instant envisagé du retour à la « troisième force »,

c’est-à-dire l’union avec la droite, la donne serait évidemment

totalement différente. Or, le PS ne peut plus aujourd’hui prétendre

à représenter, du moins à court ou moyen terme, toute la

gauche. S’il est le parti du salariat, il n’est pas l’unique parti de

gauche et doit donc faire un pas en direction de l’ensemble de

la gauche pour créer une dynamique capable d’éviter le pire : la

reconduite au pouvoir de la droite sarkoziste.

Hervé Le Fiblec

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