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Airbus : Non aux 10000 suppressions d'emplois

Airbus en est un bien triste exemple, mais la seule chose que le capitalisme accepte de partager c'est les licenciements. En effet, le 28 février, Louis Gallois PDG d'EADS a dévoilé le plan « Power8 » qui n'a rien d'équilibré ni de juste.

Quel est le problème d'Airbus aujourd'hui ? Des retards successifs dans la livraison de l'A380 et le cafouillage dans le lancement du programme A350, ont généré des pertes financières. La direction se trouve ainsi face à un problème de trésorerie. Problème conjoncturel puisque par ailleurs, les carnets de commandes sont pleins avec plus de cinq ans de travail prévus. Il est donc clair que les difficultés que rencontre aujourd'hui Airbus sont avant tout dues sinon à de l'incompétence, tout au moins à des erreurs ou des choix de direction.

Quelle est la solution trouvée pour pallier à ce problème ? Suppression massive d'emplois. Au delà de l'injustice qui consiste à faire payer aux salariés les erreurs des dirigeants, il y a en plus un paradoxe terrifiant. Alors que l'on a besoin de sortir au plus vite l'A380, qu'il est urgent de faire aboutir nombre de projet, on aurait pu s'attendre à ce que la direction d'Airbus demande à ses actionnaires des moyens à la hauteur de ses ambitions. Eh bien non, la direction propose de se séparer de 10000 salariés, prenant ainsi le risque d'aggraver sa situation à court terme et de perdre du savoir-faire à long-terme. Le tout pour satisfaire des actionnaires obnubilés par la rentabilité immédiate. Et le projet industriel dans tout çà ?

Le plan en détail

Maintenant, rentrons un peu dans le vif du sujet en examinant le plan de plus près :

1- Réductions des coûts : 10 000 suppressions d'emplois

Ces suppressions d'emplois se feront à 50% chez AIRBUS et 50% sous-traitants sans licenciement sec chez Airbus. Cela signifie qu'il y aura très directement des licenciements secs chez les sous-traitant. Par ailleurs, la réduction des coûts du plan « Power 8 » très orientée sur les entreprises de sous-traitance (57000 salariés Airbus et 30000 sous-traitants avec 50% des suppressions d'emplois à supporter) les oblige à rentrer dans une logique de concentration pour simplement ne pas disparaître.

Chez Airbus, gels des embauches (depuis septembre déjà), regroupement de service Airbus/EADS, départs volontaires et départs anticipés sont envisagés. (Au passage après avoir fait passer en force sa réforme inique des retraites, le gouvernement, en partie aux commandes de l'entreprise, organise des départs anticipés) Si l'objectif, de 5000 suppressions chez Airbus n'est pas atteint dans 12 à 18 mois, des mesures plus coercitives seront prises : Comment peut-on encore dire qu'il n'y aura pas de licenciements secs ?

2- "Develop Faster, Customer First..."

Le plan présenté explique aussi pêle-mêle qui faut développer plus vite et que le client doit être au centre des priorités. Pour autant, sur 4300 suppressions d'emplois prévues en France, près de 1100 sont annoncées sur « Airbus Central Entity » à Blagnac, dont l'une des principales tâches est le support client. De même, alors que l'on sait que ces technologies demandent des cycles de productions relativement long (Boeing a aussi des difficultés de délais avec le 787), comment peut-on envisager de développer plus vite, alors que l'on n'a pas réussi à terminer l'A380 à la date voulue, que l'on annonce un nouvel avion (A350) avec des délais toujours plus serrés, en finissant l'A380 et l'A400M et le tout avec moins de monde ?

Voilà de bien beaux objectifs mais totalement irréalistes, vraisemblablement rajoutés au plan pour donner un semblant de perspective alors que dans le même temps on vire.

3- Recentrage sur le cœur de métier :

En fait, ce recentrage vise un changement de nature d'Airbus. Aujourd'hui Airbus conçoit, construit et assemble des avions. Le plan « Power 8 » annonce la couleur : Airbus va céder trois sites de production (Laupheim et Varel en Allemagne, Saint-Nazaire-Ville en France) et établir des partenariats industriels pour trois autres (Filton en Grande-Bretagne, Méaulte en France et Nordenham en Allemagne).

Pour les cessions la direction envisage, outre la vente à des fournisseurs clés, la provocation de proposer le rachat par les salariés. Quant à la mise en place de partenariats, elle vise à permettre l'investissement dans les matériaux composites.

On voit bien là, comment la direction d'Airbus se désengage de la construction, pour ne conserver que la conception et l'assemblage. Les risques sont clairs pour l'emploi industriel en Europe. On connaît le processus, pression concurrentielle sur les partenaires et les « fournisseurs clés » auxquels les usines ont été vendues, délocalisations, fermetures, au final les salariés risquent de rester sur le carreau. Et voilà comment Airbus essaye de faire passer une partie de sa production en zone dollar pour réduire ses coûts.

4- « Airbus has the full support of all EADS core shareholders for Power8 »

Enfin, et c'est le plus grave, la présentation du plan « Power 8 » le rappelle dans son introduction, Airbus a le plein soutien de tous les actionnaires de référence, donc de l'Etat Français, donc de la droite.

La droite responsable

En imposant Noël Forgeard à la tête d'EADS, le gouvernement a fait le choix la logique du tout financier, et persiste en cosignant ce plan. Aujourd'hui Nicolas Sarkozy essaye de se rattraper aux branches, mais sa première réaction a bien été de dire que l'état n'est pas l'actionnaire « le plus avisé », assumant ainsi les 5 ans de non contrôle et défaut d'anticipation de son gouvernement. Bayrou a fait le même type de virage à 180°.

Avec Ségolène Royal « Sauvons l'Aéronautique »

Comme l'a proposé Ségolène Royal pour répondre à l'urgence, un moratoire sur le plan « Power 8 » est indispensable.

Le détail du plan montre combien le projet industriel d'Airbus a été mis à mal ses dernières années. Il est donc urgent que la logique financière qui a contribué à fragiliser l'entreprise soit substituée par une véritable stratégie industrielle sans laquelle il n'y aura pas de perspective pour l'emploi. Ainsi sur la base d'un projet clair Ségolène Royal propose que l'Etat se substitue au désengagement des acteurs privés.

Par ailleurs, la politique aveugle de l'euro fort est en grande partie responsable de la volonté d'Airbus de réduire ses coûts. Cet exemple par la preuve, montre combien il est urgent de mettre un terme à l'indépendance de la BCE.

Ségolène Royal a raison, la puissance publique peut et doit prendre ces responsabilités dans cette affaire. Le nombre d'emplois dans ce secteur l'exige, l'avenir de l'industrie en France et en Europe en dépend.

Nicolas Tissot

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