GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur

1ere année pour la nouvelle direction du Parti Socialiste : une clarification inachevée !

La nouvelle majorité qui a pris la tête du parti socialiste au congrès de Reims est entrée en fonction au moment ou la crise faisait sentir ses premiers effets dévastateurs. Ainsi, si une inflexion à gauche de notre orientation à bien eue lieu, le PS peine encore à apparaître comme une opposition efficace, capable de répondre à une urgence sociale de plus en plus criante. Un premier bilan d'étape en forme de contribution au débat, traçant un tour d'horizon des principaux événements ayant marqué l'année écoulée, peut s'avérer utile.

Crises...

Début 2009: Crise financière, crise économique, crise écologique, crise sociale, Sarkozy et sa clique ont prouvé qu'ils sont incapables d'y répondre. Pire, ils en profitent pour accélérer leurs attaques contre les salariés, ce qui ne peut qu'aggraver la situation, et le roi du « travailler plus pour gagner plus » propose comme seule solution de faciliter le recours au chômage partiel, se changeant ainsi en champion du « travailler moins pour gagner moins ». Le résultat ne se fait pas attendre: des millions de salariés grévistes répondant à l'appel des huit syndicats, défilent dans les rues.

Quid du PS à ce moment-là?

Sur l'impulsion de Martine Aubry, notre parti publie un contre plan de relance à celui de Nicolas Sarkozy (« agir vraiment contre la crise »). Si ce plan reste timide à bien des égards (il propose une augmentation du SMIC de seulement 3%), il a le mérite d'exister et de mettre en bonne place la question de l'augmentation des salaires comme moyen de répondre à la crise par la relance de la consommation salariale.

Cependant, quand il s'agit de communiquer dans la presse, d'envoyer le message du parti socialiste à tous les citoyens, Martine Aubry, choisit d'insister sur une autre proposition: une prime immédiate de 500 euros pour tous les bas salaires. Ce choix malheureux fût décisif pour la suite: au lieu d'apparaitre comme le parti capable de répondre immédiatement à l'urgence sociale en mettant Sarkozy au pied du mur, le PS est apparu en décalage complet avec les aspirations populaires. Si nous avions choisis de mettre en avant, par exemple, l'exigence de la réunion immédiate d'une conférence nationale pour l'emploi et les salaires, l'impact eût été bien différent. La chose était d'autant plus facile à réaliser que nous pouvions nous appuyer sur l'exemple du LKP guadeloupéen qui, rappelons-le, venait d'arracher, par un processus similaire, au gouvernement et au MEDEF local une augmentation de 200 euros de tous les salaires.

Que fallait-il faire? Il est certes toujours plus aisé de répondre à cette question a posteriori, pourtant, l'expérience des années 1995 à 97 aurait dû nous éclairer: le parti socialiste devait œuvrer, s'appuyant sur le mouvement social, à l'ouverture d'une crise politique!

En effet, suite à l'énorme mouvement ayant secoué la France en novembre-décembre 1995, et face à un PS se déclarant prêt à assumer immédiatement l'exercice du pouvoir, Chirac, alors président de la république n'ose plus continuer l'application de son programme antisocial. Il tente donc le coup de bluff de la dissolution offrant ainsi le pouvoir à la gauche.

Soyons clair! Sarkozy n'est pas Chirac. Jamais il n'aurait commis la même erreur. Cependant, il nous était possible, en menant une campagne volontaire pour une autre répartition des richesses, de faire d'une pierre deux coups: mettre un coup d'arrêt à la nuisible politique de Sarkozy-Fillon tout en réinscrivant le Parti Socialiste comme alternative à celle-ci, débouché politique « naturel » du mouvement social.

Européennes

En politique, comme aux échecs, il est toujours risqué de ne pas porter un coup à l'adversaire quand on en a l'occasion. De fait, c'est lors des élections européennes du 7 juin que nous avons payé notre manque d'audace du mois de mars.

Nous le savons, les élections européennes sont une échéance particulière. Elles sont d'abord généralement marquées par une abstention massive due au rejet d'une Europe perçue - à juste titre - par la population comme peu démocratique et cheval de Troie de la mondialisation libérale. Ensuite, le scrutin proportionnel est source de grande dispersion des voix.

Ainsi, l'image d'un parti socialiste « à côté de la plaque » pendant les différentes explosions sociales des mois précédents, alliée à un programme qui, certes, allait dans le bon sens, mais n'apparaissait ni comme une opposition frontale à la politique de la droite, ni comme une réponse immédiate à la situation de millions de nos concitoyens subissant la crise de plein fouet, nous a mené droit vers une défaite électorale.

C'est ce qui explique la percée relative de la liste Europe Ecologie qui a bénéficié de l'abstention de l'électorat socialiste, le PS n'ayant pas su convaincre et de l'image « antisystème » de leurs têtes de listes E. Joly (anti-corruption), J. Bové (antilibéral) et D. Cohn-Bendit (qui, bien malgré lui, garde l'image du leader de mai 68).

Pour mobiliser massivement notre camp derrière le parti socialiste, il nous aurait fallut transformer ce vote en référendum contre la politique menée, en France, par Sarkozy et ne pas être effrayés par les pressions médiatiques.

Anti-sarkozysme

Les médias en campagne, à grands renforts de Manuel Valls, nous ont accusés de n'avoir pour seul projet que « l'anti-sarkozysme ». De cette expression à double sens, la presse n'en retient qu'un, sous entendant ainsi que le PS n'a d'autre ambition que de mettre des bâtons dans les roues du président en exercice. Mais cet anti-sarkozysme là, c'est celui de François Bayrou. De celui qui veut être calife à la place du calife, président de droite à la place d'un autre président de droite!

Cet anti-sarkozysme n'est pas le nôtre! Notre opposition à Sarkozy se situe justement au niveau du projet, et c'est ce que nous aurions dû dire clairement plutôt que de récuser ces prétendues accusations: nous voulons faire exactement l'inverse de ce que fait la droite au pouvoir! Tant que Sarkozy appliquera un programme antisocial, les socialistes seront anti-sarkozystes!

C'est en nous opposant terme à terme à tout ce qu'il fait en France et en Europe que nous aurions convaincu notre camp de la nécessité et de l'utilité du vote socialiste lors du dernier scrutin.

Mais on ne s'oppose jamais si bien qu'en proposant des solutions alternatives, et c'est là qu'un problème se pose. Non pas que le parti socialiste n'est pas d'idées ou de propositions à faire, c'est bien la nature de ces propositions qui est problématique. Aucune des propositions socialistes avancées publiquement jusqu'ici n'affichait une ambition sociale suffisante pour « accrocher » le peuple de gauche. Les mesures proposées ne trouvant aucun écho dans la population, le PS apparaît comme parfaitement inaudible. Lorsqu'en 1997, par exemple, nous avons lancé publiquement le débat sur la réduction du temps de travail en proposant une loi sur les 35h sans perte de salaire, les socialistes étaient, à juste titre, au centre du débat politique et il ne se trouvait aucun journaliste pour parler de nos dissensions internes.

Briser les tabous pour reprendre la main

Si nos propositions actuelles manque d'ambition, ce n'est ni un hasard, ni un simple problème de communication. Il s'agit de notre difficulté à achever la clarification à gauche, à rompre définitivement avec les tabous dus à plus de deux décennies de pensée unique néolibérale. Le logiciel social-libéral trop souvent utilisé par le PS ces dernières années, s'il n'a jamais été d'actualité, est aujourd'hui tout à fait obsolète.

Pour reprendre la main, il nous faut briser ces tabous et affirmer haut et fort que l'on ne pourra mener une politique de transformation sociale qu'à la condition d'imposer une autre répartition des richesses, en s'en prenant aux profits des grandes entreprises.

Pourquoi continuer, en proposant des primes de l'Etat aux plus bas salaires, à dédouaner de ses responsabilités un patronat rapace qui refuse de rogner le plus petit centime sur ses profits.

L'argument des libéraux disant que des salaires élevés nuiraient à la compétitivité des entreprises ne tient plus. Si elles veulent rester compétitives, qu'elles prennent sur leurs profits, pas sur nos salaires!

Comme le dit Martine Aubry, une prime « donne un coup de fouet ». Une augmentation substantielle de tous les salaires, ça s'inscrit dans la durée, ça relance durablement l'économie et ça permet à des millions de salariés de vivre décemment de leur travail.

De plus, des salaires revus à la hausse gonflent mécaniquement, par le biais de la part de salaire indirect, des cotisations sociales, les recettes de notre protection sociale.

Ces mêmes cotisations doivent d'ailleurs être augmentées pour sauver notre système social. Il faut l'annoncer clairement. Dans l'argumentaire du parti sur la santé, cette mesure est présentée comme une piste à suivre parmi d'autres. Mais ce n'est pas le cas, c'est la seule qui soit juste, les autres solutions étant insuffisantes ou ne permettant que de prendre aux salariés plus aisés pour donner aux moins aisés en ne touchant pas à la répartition capital/travail. Laissant ainsi les profits gonfler et les riches s'enrichir.

N'ayons plus peur de dire qu'une fois au pouvoir, nous reviendrons sur tout ce qu'à défait la droite, que nous referons de vraies 35H pour résoudre le problème de l'emploi, que nous augmenterons le Smic à 1600 euros avant d'organiser une conférence salariale nationale en vue de l'augmentation de tout les salaires, que nous maintiendrons la retraite à 60 ans, que nous sauverons le système de protection sociale par répartition!

Ce programme social est juste! Ce programme social est applicable! Alors, annonçons dès aujourd'hui que c'est ce que nous ferons demain et nous gagnerons aux régionales comme à la présidentielle !

Thomas Chavigné

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