GAUCHE DÉMOCRATIQUE & SOCIALE

Le social au cœur Actions & Campagnes politiques

12 juin : à Marseille et ailleurs

200 000 à Marseille ce matin 12 juin…

Interrogations après le 12 juin

Du point de vue de la détermination des masses enseignantes, des secteurs publics et du privé, pas de problème, le gouvernement Raffarin se fait maudire par les salariés les plus actifs, les plus engagés de ce pays, comme rarement un gouvernement… L'autisme, le refus de la majorité de l'opinion par Chirac-Raffarin-Fillon voulant passer en force, le mépris de la majorité évidente des salariés, le déni du droit syndical alors que les retraites sont une question relevant des rapports sociaux, (nous sommes pour des élections à toutes les caisses de Sécurité sociale, y compris les caisses vieillesse) fait des ravages en profondeur dont il devient difficile d'imaginer la portée et les conséquences dans ce pays. Elles sont et seront durables, vont rebondir, créer des surprises ces jours-ci, ces semaines-ci.

D&S


Abbeville est une petite ville de la Somme d'un peu plus de 20 000 habitants :

Mardi 10 juin, 150 enseignants sont partis en manifestation vers la zone industrielle. Ils ont interpellé les salariés aux portes des entreprises. 350 d'entre eux ont décidé de débrayé. Certains pleuraient disant que c'était la première fois qu'ils faisaient grève. C'est une manifestation de 500 salariés, à majorité de salariés de petites entreprises du privé, qui a défilé dans le centre ville.

Amitiés, JJ. C


St-Nazaire :

Chantiers de l'Atlantique

Du jamais vu, même pas en 68 ! Pour la première fois dans l'histoire des chantiers navals de St-Nazaire, une manifestation à défiler à l'intérieur du site.

Dès 9 h 30 du matin 10 juin, 2.500 salariés Chantiers et sous-traitants débrayaient à l'appel de l'USM. Après avoir parcouru le site en manifestation, ils sont allés à la porte principale pour attendre la manifestation interprofessionnelle qui partait de Saint-Nazaire. Ils ont été rejoints par les salariés de l'Aérospatiale, de la Raffinerie de Donges ainsi que de nombreuses boîtes sous-traitantes de ces deux entreprises. Vers 11 h00, la manifestation arrivant de la ville (20.000 personnes) s'est fondue avec les précédentes devant le site des Chantiers de l'Atlantique. Après une prise de parole faite par Daniel Lemasson, secrétaire de l'UL CGT, au nom de l'intersyndicale, la manifestation s'est engouffrée dans ce site, symbole du capitalisme (comme l'a indiqué Daniel Lemasson). Lorsque la manifestation est arrivée sur la darse où se construit le Queen Mary 2, des militants de l'USM-CGT ont déployé le long du pont principal du navire, sous les acclamations et les applaudissements, une banderole de 20 m "La Navale contre le Plan Fillon _USM-CGT". Les 250 indiens travaillant à bord du

Queen mary 2 ont débrayé avec nous, en solidarité ! La manifestation a ensuite rejoint la sortie où les attendait plusieurs barbecues organisés par les cheminots en grève et les salariés des Chantiers.


Boulogne sur Mer :

L'intersyndicale avait mis au programme de la journée du 10 juin le blocage de Capécure. A Capécure sur le port de Boulogne plus de 6 000 personnes travaillent pour la marée.

De 5 heures du matin à 15 heures les camions font la navette pour alimenter en produit de la mer le marché de Rungis. L'idée des grévistes était d'attaquer là où ça fait mal : le porte-monnaie.

Les Dockers ont été les premiers à mettre les barrages en place vers minuit. Nous étions en train de coller lorsque nous avons vu la fumée des barricades de pneus. A 6 heures du matin quelques enseignants viennent sur les barrages relevés les camarades. Il y a également des cheminots, des ouvriers de marée (dont une partie de non grévistes : ils occupent avant ou après leurs postes). Les 5 accès au port de Boulogne sont bloqués. On laisse entrer les camions mais toute sortie est impossible.

Neuf heures trente manifestation en centre ville : 2 500 personnes selon la Voix du Nord. Peut être plus. Alors que la manif devait rejoindre le quartier de la marée et qu'un militant de la CFDT Marée nous appelle pour avoir des renforts au rond point de la Glacière, la tête du cortège CGT part en divaguant dans le centre ville. Nous ne sommes qu'une poignée à venir renforcer les barrages. La détermination des ouvriers de marée est impressionnante. La fumée des pneus indique que les barrages tiennent toujours. Premier incident, un patron de marée connu pour sa politique sociale musclée tente de forcer un barrage. Dommage pour sa Mercedes... Maintenant elle va rouler moins bien.

Une rumeur courre Capécure, les camions vont forcer le blocus à 12 heures, à 13 heures à 14 heures. Ce qui est sûr c'est que la grève n'est pas générale et qu'on travaille dans les magasins de marée. Vers 13 heures première vague d'assaut. Les flics de Boulogne ont revêtu leurs tenus anti-émeute. Le commissaire lance les sommations au rond point de la Glacière. Manque de bol pour eux le vent nous est favorable et une colline pleine de cailloux les surplombe. Quelques occupants se placent là. Petit à petit des renforts nous arrivent. Nous étions vingt à 11 heures nous sommes maintenant une cinquantaine. Les flics avancent nous repoussent avec leurs boucliers (pas de coups échangés) au delà de la barricade. Nous sommes au milieu du rond point. Les pompiers venus avec les cognes éteignent le brasier.

Honneurs au boulonnaises : Dans le face à face qui suit le démantèlement de la barricade, les camions se préparent à partir. Des ouvrières de marée posent des planches à clous sous les roues. Les chauffeurs ont compris le message et n'insistent pas. Les hommes interpellent les flics qu'ils connaissent et à plusieurs reprises se mélangent à eux ce qui oblige le commissaire à faire reculer ses troupes pour prendre de la distance. Finalement ils retournent à leur point de départ. Nous reconstruisons une nouvelle barricade qui est enflammée immédiatement. Sur les autres barrages ils arrivent qu'on laisse sortir les particuliers. Les camions ne circulent toujours pas. Certains ont même placé leur bahut en renfort de la barricade.

A 15 heures le commissaire nous annonce la venue d'une compagnie de CRS de Calais. Ils sont signalés devant la poste par les camarades qui tiennent le barrage près de la douane. 15 heures trente ils prennent position devant nous. Un groupe est chargé de nettoyer la colline en surplomb. Un paquet est envoyé en vedette sur notre gauche. Incertitudes chez les 200 grévistes à présent regroupés. Un rendez vous est donné en cas de dispersion : Le rond point qui se trouve derrière les keufs. Des camarades dockers, cheminots ou mareyeurs tentent de résister à la charge. Quelques caillasses volent. La lacrymo couvre la fumée des pneus. Un camarade est frappé au sol, un est victime d'un tir tendu. Les CRS nous insultent copieusement.

Nous filons à travers les camions arrêtés et rejoignons tous le nouveau point d'occupation. Les camions sont de nouveau bloqués. Les boulonnais sont motivés pour résister aux keufs. Et jouer avec eux au chat et la sourie de rond point en rond point. Les CRS arrivent de nouveau. Un nouvel affrontement s'annonce quand deus ex machina le maire ps de Boulogne ramène sa fraise. Il a avec lui les leaders syndicaux enseignants. On t'avait pas vu avant ti !

Le deal qu'il a fait avec les patrons de la marée c'est de faire lever les barrages. Le nôtre, qui aurait sans doute été levé dans l'indifférence durant l'après midi, se trouve radicalisé par la répression policière. la négociation est difficile. Très difficile d'autant que le temps travaille pour nous : les camions ne peuvent toujours pas circuler. Finalement, le maire obtient un barrage filtrant contre le retrait des CRS. Ils a beau essayer de négocier les délais de passage plus importants les manifestants restent fermes.

A 18 heures nous partons, les filtrages continuent

Le soir à 10 heures, cheminots, dockers ouvrier de marée installent deux barrages : rond point de la glacière et sur celui où nous nous étions repliés. De nouveau les pneus et palettes brûlent. Nous faisons la navette pour les alimenter. Il y a de moins en moins de monde pour tenir les barrages et à 4 heures du matin on va se coucher.

Quelques réflexions en vrac : 200 personnes ont suffi pour bloquer complètement tout un secteur. Ce qui montre que les syndicats qui prétendent ne pas pouvoir bouger faute d'effectifs nous baladent. A 400 nous aurions été beaucoup plus efficace des délégués syndicaux allaient bosser en saluant les grévistes... Et si tout Capécure avait débrayé on aurait même pas eu à se faire chier sur les barrage. Il est évident que cette action a permis de souder les ouvriers du public et du privé, que la détermination des camarades du port ou du rail a impressionné les enseignants, alors que la durée de la grève chez les enseignants a frappé le monde de la marée. Ce n'était hier pas un affrontement entre flics et casseurs mais entre force de l'ordre et une partie de la classe ouvrière. Les tactiques sont moins rodées mais les mots d'ordres sont appliqués à la lettre.

(témoignage plutôt libertaire, vous l'aurez compris).


CERGY + 78 + REFLEXIONS :

Ce que dit Jean-Yves correspond exactement avec ce que j'ai constaté, et développé, hier soir.

J'avais pris ma soirée pour aller à une réunion du collectif interpro de Cergy Ville nouvelle.

J'avais assisté à une première réunion, dix jours auparavant, il y avait 150 personnes, beaucoup d'enseignants, mais aussi des cheminots, postiers, salariés d'EDF, impôts, et très peu de gars du privé (cinq, dont moi). Un souffle et une dynamique impressionnants.

Pendant la semaine, ils ont multiplié les actions (manif départementale, 2500 personnes, diffusions de tracts, pique-nique unitaires, opération péage gratuit, collages pour recouvrir les saloperies du MIL, prises de paroles interprofessionnelles, etc.).

Hier, il n'y avait plus qu'une soixantaine de personnes. Très peu de CGT, plutôt enseignants, SUD, un peu de CNT, CGT La Poste.

Cheminots pessimistes, enseignants amers et désabusés, La Poste déterminés. Assemblée très contrastée, propos parfois amères, voire méchants, contre les directions syndicales et leurs trahisons (pas de la part des gauchos classiques), volonté d'une radicalisation minoritaire, mais aussi chez d'autres le désir de positiver davantage les choses. J'ai pu développer une analyse assez proche de celle de Jean-Yves, à savoir :

Grâce à nous, Raffarin a perdu la bataille de l'opinion.

Il faut continuer la mobilisation, continuer les actions, mais commencer à nous dire que Raffarin, qui a perdu la bataille de l'opinion, fera probablement passer son texte à l'AN.

Ce qui peut faire encore basculer les choses, c'est une énorme connerie-provocation du gouvernement (évacuation de grévistes qui passe mal, images fortes à la télé, etc.). Mais qu'aussi les opérations minoritaires style mecs cagoulés ne nous aident pas forcément.

Il est important donc, en sachant qu'en principe les grandes manifs sont derrière nous, de continuer un travail pédagogique, et surtout de permettre que les équipes qui ont travaillé ensemble pendant des semaines ne se quittent pas avant les vacances avec un sentiment amer. Multiplions les actions pédagogiques, distributions de tracts, etc. et surtout grande fête (mais oui) avant les vacances, tous ensemble.

Pensons surtout que la deuxième mi-temps, c'est la rentrée, et la Sécu. Cela sera bien plus brutal que les retraites, et immédiat. Plus facile à regrouper public-privé là-dessus, donc on n'a pas perdu notre temps, ce qu'on a fait sera vite utile...

Ces arguments passent bien, ils n'apparaissent pas comme défaitistes, mais évitent le "on va gagner" de moins en moins convaincant.

Je crois qu'il nous faut également développer avec pédagogie les arguments style : "Si Blondel-Thibault avaient lancé le mot d'ordre de GG, on gagnait à coup sur..."

Sans opportunisme vis-à-vis d'eux, mais sans tomber dans la facilité dénonciatoire des gauchos...

A part cela, les enseignants reprennent le boulot ce vendredi, en faisant un tract d'explications aux parents.

A part cela, des actions vont continuer dans la semaine : banderole sur l'autoroute, distribution de tracts sur les marchés, et sur les lieux automobiles très passagers.

A part cela, beaucoup viendront ce vendredi soir 13 juin à Triel, à la fête du mouvement social (intervention de Gérard Filoche et de Denis Andlauer, cheminot CFDT). Bien à tous. Pierre


VAUCLUSE ET MARSEILLE :

Après 5 semaines et 2 jours de grève reconductible, la tendance est à la reprise pour vendredi sauf fait nouveau significatif demain au meeting des 4 à Marseille. La suite ne nous appartient plus. Bien à toi, Philippe


Chinon : 100 agents edf au barrage filtrant sur le pont de Port Boulet pour l'acces à la centrale de Chinon

2h de beau bordel, 500 tracts et un petit sondage (pour les 37.5ans pour tous = resultat oui à 75%)

Demain on remet ca à Chinon cette fois.

Emportement du capitaine de gendarmerie de Chinon ce matin :

"mais vous vous rendez pas compte, pas une manif en 6 ans et la une tous les jours depuis 15 jours, je ne peux plus plannifier les repos de mes hommes"

c'est veridique sinon ca n'aurait pas de sens...

Cordialement, J-M G


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